Canada : la faillite de l’État devant la pandémie mondiale

Elizabeth McAllister et Brian G.Bédard, Groupe McLeod, 6 octobre 2020

La pandémie de COVID-19 était prévue et évitable. Les prochaines pandémies sont également prévisibles et évitables. Environ 60% des maladies infectieuses humaines et 75% des maladies infectieuses émergentes sont d’origine animale sous forme de zoonoses . Le nouveau coronavirus n’est que l’un des nombreux, avec ses retombées des animaux aux humains, son amplification locale et régionale, puis sa propagation à des niveaux pandémiques dévastateurs.

Les terribles avertissements des sciences médicales, vétérinaires et environnementales et les leçons tirées du SRAS, du MERS, de la grippe aviaire, de la grippe porcine, d’Ebola et d’autres maladies émergentes récentes ont été ignorés. Les programmes mondiaux et les initiatives nationales de préparation à une pandémie ont été négligés, abandonnés ou sous-financés. Le système d’alerte mondiale en cas de pandémie, respecté internationalement, du Canada , par exemple, n’était pas suffisamment centré sur le Canada pour justifier un financement continu.

La Banque mondiale a estimé il y a huit ans qu’un investissement de 3,4 milliards de dollars EU dans les systèmes de santé 0ne dans le monde permettrait d’éviter des pertes supérieures à 30 milliards de dollars EU dues à des réponses retardées ou inadéquates aux zoonoses. Les pays n’ont pas répondu.

Aujourd’hui, le FMI estime que le coût de cette pandémie évitable pour les seuls gouvernements est déjà supérieur à 9 000 milliards de dollars. Les économies sont au point mort. Les pays en développement sans systèmes et institutions de santé solides risquent de perdre des décennies de progrès en matière de développement soutenus par le Canada et d’autres. Les effets en cascade de la pandémie mettront en péril les efforts de lutte contre le changement climatique et de promotion de l’égalité des sexes.

L’incidence croissante des maladies zoonotiques est causée par une forte augmentation de la population accompagnée d’un empiètement humain sur l’environnement naturel. Cela a créé les conditions pour que les maladies zoonotiques se développent avec des opportunités pour les agents pathogènes (virus, bactéries et champignons) de traverser la barrière des espèces des animaux aux humains.

La population en plein essor a augmenté la demande de protéines d’origine animale, en particulier pour la «viande de brousse», de la part de ceux qui sont trop pauvres pour acheter des protéines d’origine animale domestiques. Cela a conduit à une intensification non durable de l’agriculture, à une exploitation accrue et au commerce illégal des espèces sauvages et à l’expansion des infrastructures et des industries extractives.

Ces intrusions dans les écosystèmes entraînent des infections zoonotiques trans-espèces. Des systèmes de voyage mondialisés, une pléthore de marchés humides et des réseaux commerciaux internationaux contribuent à propager des infections précédemment localisées dans le monde. Dame Nature riposte avec des impacts socio-économiques dévastateurs et une terrible perte de vies. Qui porte le plus lourd fardeau de l’échec de la prévention des pandémies? Les femmes , les jeunes et les pauvres – partout.

Dans un rapport récent du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et de l’Institut international de recherche sur l’élevage, ces organisations se sont éloignées de l’objectif médical et de santé publique actuel visant à atténuer les effets de cette pandémie pour prendre en compte les causes systémiques profondes des maladies zoonotiques et leur impact futur. . Le rapport appelle à une approche « One Health », un concept qui existe depuis les années 60 mais qui n’a pas encore été pleinement adopté.

Les dispositions institutionnelles One Health reflètent le fait que la santé animale, humaine et écosystémique est indissociable et que leurs interactions s’intensifient rapidement. Les agences internationales (Banque mondiale, PNUE, OMS, FAO, OIE, etc.) ont appelé à une approche One Health qui opère du niveau communautaire au niveau mondial. Il se concentre sur la prévention, la détection précoce et la réponse rapide. La propagation de virus et d’autres agents pathogènes des animaux aux humains a déjà été bloquée à plusieurs reprises grâce à la surveillance et à une réponse rapide . Cela peut être fait à l’échelle mondiale.

Irresponsabilité

Le Canada et d’autres pays n’ont pas eu la volonté politique de soutenir les investissements à des niveaux proportionnés à la menace de pandémies récurrentes. Nous ne devons pas retomber dans un cycle de crise, de réponse, de reprise et de négligence après la reprise jusqu’à ce que la prochaine crise éclate.

Nous ne savons pas comment gérer de gros problèmes complexes poilus qui traversent les disciplines humaines, animales et écosystémiques. Cela nécessite un partenariat soutenu avec un financement prévisible des gouvernements, de la société civile et, en particulier, du secteur privé. Notre façon de gouverner repose sur un monde plus simple où le bien-être humain et les économies pourraient être gérés secteur par secteur par des ministres qui, malheureusement, ne voient peut-être pas l’avantage de financer des programmes multisectoriels qui, à leur avis, réduisent les contributions de leur propre ministère.

De même, les donateurs perdent leur attachement au multilatéralisme. Des milliers de programmes fragmentés et pilotés par les donateurs créent plus de concurrence que la collaboration qu’exige la préparation à une pandémie.