Canada : un nouveau traité de libre-échange qui ressemble beaucoup à l’ancien

Scott Sinclair, Centre canadien des politiques alternatives, 10 décembre 2019

 

Bien que le Canada ait été mis de côté dans les dernières discussions concernant le traité de libre-échange Canada-USA-Mexique, les Démocrates des États-Unis ont imposé des améliorations au « nouvel ALENA ». Le plus grand changement est la suppression des périodes de protection des données pour les médicaments biologiques, tels que les traitements de la maladie de Crohn et de la polyarthrite rhumatoïde. Avec cela, les fabricants de médicaments génériques pourront produire des versions moins chères, appelées biosimilaires.

Les Démocrates ont obtenu d’autres améliorations, notamment la limitation de la pratique de la mise à jour permanente, où les entreprises peuvent obtenir de nouveaux brevets sur la base de petites modifications des médicaments existants, bloquant ainsi les concurrents génériques.

L’un des principaux points d’achoppement lors de la conclusion d’un accord a été l’application plus stricte des normes du travail, le Mexique étant la principale cible. Les Démocrates ont réclamé une inspection indépendante des lieux de travail soupçonnés de violer les normes du travail et la possibilité de retirer le traitement préférentiel des exportations de ces usines en cas de violation.

Les employeurs mexicains s’y sont opposés avec véhémence. Le président mexicain Manuel Lopez Obrador a également rejeté la demande comme une atteinte à la souveraineté mexicaine.

Dans la pratique, ces inspections sont une caractéristique régulière du commerce international. Les organismes de réglementation canadiens et américains, par exemple, inspectent régulièrement les établissements alimentaires étrangers pour s’assurer qu’ils respectent les normes de salubrité des aliments. 

En fin de compte, un compromis a été trouvé avec le Mexique. Les plaintes concernant les lieux de travail pourront être entendues par des groupes d’experts indépendants et les violations confirmées pourront entraîner des sanctions.

Parallèlement, les trois pays ont convenus d’assouplir la condition selon laquelle les abus du travail devraient être « soutenus ou récurrents » pour déclencher des sanctions,  ce qui fut dans la version antérieure de l’ALÉNA un obstacle important permettant des violations des droits du travail.

Ces changements et des règles plus strictes protégeant les droits des travailleurs mexicains ne combleront pas de sitôt le grand écart salarial dans le secteur manufacturier avec le Mexique. Entretemps, General Motors a annoncé son intention de fermer cinq usines aux États-Unis et au Canada.

Dans l’important secteur de l’automobile, les États-Unis ont obtenu une clause spécifiant que l’acier utilisé dans ce secteur doit être « fondu et coulé » dans la zone commerciale de l’ALENA. Cela pourrait être une aubaine pour les producteurs d’acier américains et canadiens.

Les Démocrates ont peu progressé en matière de protection de l’environnement. 

Les groupes environnementaux américains sont fermement opposés à la ratification d’un accord commercial qui ignore la menace du changement climatique et intensifie les échanges commerciaux et les flux énergétiques écologiquement non durables.

Les Démocrates ont probablement amélioré le nouvel ALÉNA pour certains travailleurs et consommateurs dans les trois pays. Mais sur le fonds, c’est la même logique qui prévaut.

Comme l’ALENA original, le nouveau traité privilégie le capital multinational et l’augmentation des flux commerciaux. Il affaiblit la politique environnementale en insistant pour qu’elle n’interfère pas avec le commerce ou n’impose pas de coûts réglementaires plus élevés aux entreprises.