Lula : une condamnation courue d’avance

Autres Brésils,  25 janvier

L’ancien président du Brésil Luiz Inácio « Lula » da Silva vient d’être condamné à l’unanimité, en seconde instance, dans une procédure judiciaire qui mime par son caractère fallacieux et farcesque la procédure parlementaire qui a destitué en 2016 la présidente Dilma Rousseff. Précipitée, courue d’avance, sans preuves matérielles, médiatisée et truffée de vices de procédure.

L’aboutissement du procès entamé par le juge Sergio Moro, en 2014, concrétise une nouvelle étape du coup d’État parlementaire et juridique. La condamnation de Lula, sans preuves, sonne le glas des institutions d’une démocratie formelle alors que d’autres politiciens négocient leur impunité, entre initiés [1] – y compris le président en exercice Michel Temer. Les juges s’érigent en compas moral d’un autoritarisme des instances judiciaires bien connu des couches populaires brésiliennes. Condamné, Lula ne disputerait pas les élections de 2018, ouvrant la voie à l’hégémonie réactionnaire des partis de la vieille oligarchie brésilienne, mais aussi de ses nouvelles métastases d’une extrême droite nostalgique des Juntes Militaires (le Mouvement Brésil Libre, le projet École Sans Parti et l’ascension du député fédéral Jair Bolsonaro [2], par exemple).

Si le gouvernement putschiste et ses meilleurs ennemis de la nébuleuse parlementaire démantelaient déjà un à un les acquis sociaux et sauvegardes environnementales, les services publics ainsi que les libertés et les droits civiques, cet événement marque un coup décisif dans l’évincement d’opposants politiques.

Le rôle des médias n’est pas anodin et encore moins celui des éditocrates. Cette fois c’est au tour de la chaîne de télévision BandNews d’annoncer le résultat « par unanimité » bien avant que les juges n’aient lu leur vote. Un « problème technique » en serait la cause, mais Internet a bonne mémoire et la capture d’écran aura circulé parmi les médias alternatifs. Serait-ce une préméditation, une anticipation, un acte manqué ou un geste délibéré de résistance d’un employé s’emparant des techniques du pouvoir médiatique pour le subvertir et en dénoncer son rôle ? Libre à vous de lui donner un sens.

En attendant, Autres Brésils continuera son travail de décryptage de l’actualité et de la démocratie brésilienne.

[1] Selon Le Monde : « Pas moins de 45 sénateurs sur 81 doivent répondre d’accusations criminelles auprès de la Cour suprême. Aucun n’est en prison. Il semble étrange que la justice ne soit rendue que contre un homme de gauche, favori de la présidentielle », commente Sylvio Costa, à la tête du site Congresso em Foco, qui scrute l’actualité parlementaire.

[2https://www.bastamag.net/Raciste-homophobe-pro-torture-Bolsonaro-l-ancien-militaire-qui-pourrait-devenir

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