C’est en 1890 que le 1er mai est souligné pour la première fois par le Parti ouvrier français, fondé en 1882 par Jules Guesde et Paul Lafargue. La date n’a pas été choisie par hasard. En effet, quatre ans plus tôt, à Chicago, les événements de Haymarket Square ont suscité l’indignation des ouvriers et ouvrières d’un peu partout dans le monde. Lors d’une action pacifique, une bombe a été lancée sur la police qui intervenait pour disperser les manifestantes et manifestants. Le procès qui s’en suivit fut biaisé et, malgré le manque de preuves, quatre syndicalistes furent exécutés, d’autres furent condamnés à la prison à perpétuité. En 1893, ils furent réhabilités par le gouverneur de l’Illinois qui a jugé que la répression policière envers les travailleuses et travailleurs en grève a causé la tragédie.
Les «martyrs de Haymarket», comme on les connaît maintenant, restent un symbole fort pour le mouvement ouvrier mondial. Dans de nombreux pays, le 1er mai est un jour férié et les organisations syndicales, les groupes de gauche, communistes et socialistes en profitent pour manifester et souligner les luttes passées et courantes. Aux origines, on revendiquait la journée de 8 heures comme un moyen pour améliorer les conditions de vie de la classe ouvrière.
Pour la deuxième année de suite, le 1er mai sera fortement teinté par la pandémie mondiale. Un peu partout dans le monde, les travailleuses et travailleurs de la santé ont témoigné de conditions de travail plus que difficile. Par exemple, en Belgique — un des pays d’Europe les plus gravement frappés par le COVID — des travailleuses et travailleurs de la santé se sont organisés pour revendiquer de meilleures conditions de travail, mais aussi des soins de santé publique de qualité et la fin des stratégies de rentabilité au détriment de la santé des patients. La santé en lutte regroupe autant des travailleuses et travailleurs de la santé que des usagers des services publics, mettant ainsi de l’avant que la lutte pour des services de qualité est une lutte universelle qui concerne toute la population.
Au Mexique, les pepenadores, des travailleuses et travailleurs du recyclage informel ont risqué de perdre leurs maigres revenus à la suite de la fermeture de dépotoirs ou à l’obligation de porter des équipements de protection. Bien entendu, comme il s’agit de travail informel, il n’y a pas de réel employeur pour fournir ces équipements qui peuvent représenter une grande dépense pour quelqu’un qui gagne sa vie au jour le jour. Toute dépense imprévue pour quelqu’un qui ne bénéficie d’aucune protection sociale peut être une montagne insurmontable.
La pandémie a exacerbé les inégalités — pendant que les plus riches et leurs entreprises transnationales engrangent des sommes inimaginables, partout dans le monde, les travailleuses et travailleurs essentiels s’exposent au virus pour tenter, tant bien que mal, de survivre. Les plus riches se sont enrichis, les plus pauvres se sont appauvris. Nous ne savons pas encore quelles seront toutes les conséquences de la pandémie et du confinement sur la population d’ici et d’ailleurs.
Une chose me semble évidente : ce 1er mai, la classe ouvrière doit manifester en grand nombre et démontrer une grande solidarité qui va bien au-delà des frontières. Nos conditions de vie et de travail sont intimement liées à celles des travailleuses et travailleurs de partout. Notre solidarité n’a ni frontière ni limite!
Chantal Ide est vice-présidente du Conseil central du Montréal métropolitain‒CSN et responsable politique du dossier solidarité internationale