M. Trudeau, mettez fin à la persécution de Hassan Diab, Le Droit, 10 mai 2021
Après quarante ans, l’État français n’a toujours pas repéré le coupable de l’attentat de la rue Copernic à Paris en 1980. Impuissantes à identifier l’auteur du crime, les autorités françaises n’arrivent pas à avouer leur défaite. Depuis quatorze ans, elles poursuivent un homme innocent, Hassan Diab, professeur de sociologie à Ottawa.
Mettez-vous dans sa peau. La France l’accuse d’être le coupable de l’attentat terroriste ayant fait quatre morts en 1980 à la synagogue de la rue Copernic. À la demande des autorités françaises, qui exigeaient qu’il soit extradé en vue d’un procès criminel, la police canadienne l’arrêta en novembre 2008.
Son extradition en France eut lieu en novembre 2014. Rendu là-bas, il fut emprisonné, mais aucun procès n’était prévu. La durée de son incarcération restait indéterminée, apparemment sans fin.
Deux juges d’instruction firent l’analyse de son dossier et affirmèrent son innocence. À huit reprises, ils ordonnèrent sa libération sous caution. Chaque fois, la Cour d’appel se plia aux demandes du procureur et refusa de le libérer.
Il resta donc dans sa cellule vingt-deux heures par jour dans une incertitude agonisante. Il languit en prison pendant plus de trois ans, loin de sa conjointe, loin de ses très jeunes enfants.
Après enquête, les juges d’instruction établirent qu’il n’était même pas en France le jour de l’attentat, mais rédigeait au même moment des examens à l’Université de Beyrouth. Plusieurs témoins et documents confirmèrent son alibi.
En 2018, il fut enfin libéré. Faute de preuves, les juges d’instruction décidèrent d’un non-lieu. Il rentra à Ottawa espérant retrouver une vie normale. Le cauchemar se dissipait petit à petit, mais son spectre demeurait.
Le 27 janvier 2021, le cauchemar a repris de plus belle : à l’encontre de tous les éléments du dossier qui prouvent son innocence, la Cour d’appel en France a ordonné qu’un procès ait lieu. C’est une histoire ahurissante, digne d’un récit de Kafka.
Selon le journal Le Monde : « Exceptionnelle également la décision des magistrats de la cour d’appel, qui jamais, en matière terroriste, n’avaient jusqu’ici contredit les juges d’instruction ayant décidé d’un non-lieu en 2018. » Cette décision de la Cour d’appel est manifestement une mise en scène politique et non un acte de justice.
Accusations sans fondement
Le cas de Hassan Diab a été marqué d’emblée par des accusations sans fondement, par des allégations provenant de services de renseignement agissant dans l’ombre et par l’occultation de preuves qui auraient disculpé M. Diab. Les autorités françaises détenaient depuis 2008 (avant même l’extradition) les empreintes digitales du présumé terroriste, savaient qu’elles n’étaient pas celles de M. Diab et n’avaient pourtant pas divulgué cela lors des audiences d’extradition.
Aussi, il y a une dizaine d’années, les autorités françaises commandèrent une analyse graphologique, qui comparait l’écriture de M. Diab à celle de la personne qui avait fait sauter la synagogue parisienne. Des experts internationaux trouvèrent cette analyse gravement défectueuse, une conclusion endossée par des experts français récemment mandatés par les tribunaux français. S’effondraient ainsi la justification officielle de l’extradition de M. Diab et le dernier fondement des accusations criminelles à son égard.
La persécution de cet innocent n’a que trop duré. Il est donc urgent que le premier ministre Justin Trudeau intervienne pour mettre fin à l’injustice subie depuis quatorze ans par M. Diab, un homme innocent.
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Les auteurs de cette lettre sont :
Pierre Beaudet, professeur associé, Université du Québec en Outaouais
Louise Blais, professeure émérite, Université d’Ottawa
Mélissa Blais, professeure, Université du Québec en Outaouais
Guy Chiasson, professeur, Université du Québec en Outaouais
Bill Clennett, militant des droits humains, Gatineau
Thomas Collombat, professeur, Université du Québec en Outaouais
Catherine Lanaris, professeure, Université du Québec en Outaouais
Paul Leduc Browne, professeur associé, Université du Québec en Outaouais
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