Carolina Dominguez Restrepo, collaboration spéciale
La présence des entreprises transnationales sur les territoires en Amérique centrale entraîne une détérioration des droits humains des communautés vivant dans les zones d’exploitation des ressources, en particulier au Honduras, au Guatemala et au Chiapas. Il existe toutefois une résistance issue de la population locale. Les interventions lors de l’assemblée « Mobilisation pour les droits et les territoires » du 19 novembre dernier en témoignaient.
Le Comité pour les droits humains en Amérique latine (CDHAL) et le Centre international de solidarité ouvrière (CISO), avec la collaboration de Déveloement et Paix et de Solidarité Laurentides Amérique centrale (SLAM) ont pris l’initiative de tenir une rencontre à Montréal dans le cadre des Journées québécoises de la solidarité internationale (JQS).
Trois perspectives qui s’entrecroisent
L’activité réunissait Ervin Hernandez, un journaliste hondurien qui a exposé les injustices causées par l’extractivisme; Leocadio Jucaran, un activiste guatémaltèque qui a travaillé
pour la régularisation des personnes déplacées dans une perspective contre-hégémonique;
et Libertad, une éducatrice populaire qui s’est consacrée à la dénonciation de la diplomatie criminelle et des liens paraétatiques qui favorisent l’investissement étranger au Chiapas. Au cours de la réunion, chaque personne a caractérisé le mode de fonctionnement de l’intervention étrangère et a décrit la résistance qui s’exerce à partir de la base sociale. Les trois perspectives s’entrecroisent : l’articulation du capital étranger, des réseaux de corruption de l’État et du crime organisé. Elles caractérisent les obstacles quotidiens qui oppriment les communautés et entravent la résistance.
Honduras
Dans le cas du Honduras, les investissements se concentrent sur deux types d’activités productives : l’exploitation des terres par l’extractivisme et les monocultures, ainsi que l’industrie de fabrication de tissus pour des entreprises canadiennes telles que GILDAN. Ces activités économiques et l’importance que leur accordent certaines entités étatiques entraînent le déplacement des populations qui habitent ces territoires, ainsi que la précarisation des travailleuses et des travailleurs de cette industrie.
Cependant, les actions collectives qui résistent à ces dynamiques d’exploitation font face à des défis, tels que la persécution politique des activistes qui luttent pour la souveraineté de leurs territoires, l’interventionnisme de l’État qui exerce une violence systémique à travers ses appareils, et la criminalisation de la mobilisation. Ce dernier défi représente une contrainte significative dans la lutte pour le territoire et sa diffusion, car la criminalisation provient non seulement des opérateurs légaux, mais aussi des médias et de l’opinion publique. Ceux-ci cherchent à polariser et à atomiser l’organisation afin de faire de la place aux intérêts étrangers, en plus de donner peu de visibilité à la situation.
Guatemala
Au Guatemala et au Honduras, la reconnaissance de l’autonomie territoriale et le droit de la population à être consultée au préalable de la réalisation d’un projet ont pris du retard. C’est au Guatemala qu’il a progressé et qui fut abordé sous l’angle de la nature ancestrale originelle des espaces territoriaux qui ont été appropriés par les communautés. L’autogestion exercée sur ces localités et menée par les organisations de base repose sur le principe de la solidarité globale Nord-Sud décolonisatrice. C’est pourquoi les plans d’action mis en œuvre encouragent la participation aux assemblées territoriales et prévoient une assistance juridique.
Chiapas, Mexique
Au Mexique, et plus précisément au Chiapas, on observe une intensification des effets négatifs de l’interventionnisme attribué à la présence de bandes armées, étant donné qu’il s’agit d’un lieu important sur les routes de la migration irrégulière. Ce facteur aggravant compromet non seulement les conditions de vie des communautés, mais démontre également que la configuration du territoire est au service du capital mondial et de la criminalité qui exerce un contrôle sur ces zones. L’État, ses entités et l’interlocution diplomatique entre le Nord et le Sud sont complices de cette situation.
Face à cette réalité, le Canada a une position marquée par l’absence de politiques qui limitent et contrôlent les dommages causés par les activités productives des transnationales canadiennes sur l’environnement. Celles-ci détériorent également les moyens de subsistance des communautés et des populations dans les territoires du Sud global. Dans ce contexte, la solidarité internationale prend tout son sens et devrait chercher à intégrer des piliers démocratiques dans les processus et les décisions qui affectent les communautés latino-américaines.