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Mario Gil Guzman, correspondant

Le nouveau gouvernement de gauche en Colombie fait face à la résurgence des violences entre les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et l’Armée de libération nationale (ELN) aux frontières du Venezuela dans la région de Catatumbo. Le président Petro est-il impuissant devant ces affrontements, pire, passera-t-il pour du pareil au même des régimes colombiens ? Sa proposition de paix totale réussira-t-elle à vaincre la culture de la loi du plus fort ?

La région du bassin de Catatumbo en Colombie aux frontières du Venezuela

La population colombienne a voté pour la première fois dans l’histoire de la Colombie pour un gouvernement de gauche en 2022 alors que sévissait une grande violence contre la population depuis au moins 40 ans. La guerre en Colombie est le karma de toute l’histoire du pays. Que peut changer ce gouvernement de gauche au destin de la Colombie ? Retour sur l’histoire de la violence en Colombie.

Des accords de paix depuis les années 80  !

Après la conclusion d’un accord de participation politique avec la guérilla des FARC et autres mouvements sociaux au début des années 80, un parti politique, l’Union Patriotique (UP), s’est constitué et a ouvert un espace pour d’autres forces politiques. Celles-ci avaient vu leur accès à la vie politique écarté durant plusieurs décennies avec le sophisme de l’élection aux quatre ans, alors qu’elles étaient dominées, voire contrôlées depuis toujours par les mêmes familles et classes au pouvoir.

Malgré cet accord, a commencé en 1985 le massacre de cinq mille membres de l’UP, qui ont été décimé.es par une alliance entre l’armée colombienne et les paramilitaires. Parmi les victimes, deux candidats présidentiels, Bernardo Jaramillo et James Pardo Leal, et plusieurs conseillers municipaux et maires. La Cour Interaméricaine des droits de la personne a appelé ce massacre, le Génocide de l’UP en 2023.

Un premier accord de paix avec une guérilla en Amérique latine fut signé en 1990, entre le Mouvement 19 d’avril (M19) et le gouvernement colombien. D’autres groupes de guérilla se sont ensuite joints à cet accord. Une réforme de la constitution nationale fut alors entreprise pour favoriser la participation politique des rebelles. Malgré l’assassinat d’ex-combattant.es, plusieurs ont commencé à participer à la vie politique, entre autres l’actuel président Gustavo Petro.

Par ailleurs, la réforme agraire paramilitaire a mené au plus grand massacre de la population paysanne dans les années 90. Cette décennie fut la plus sanglante. Beaucoup des terres de familles déplacées ont fini dans les mains des élites locales liées aux paramilitaires.

Un plan d’investissement, appelé le plan Colombie, fut signé en 2000. Il s’est traduit par l’accroissement de la violence contre la population. C’est dans ce contexte, en 2002, qu’arrive au pouvoir Alvaro Uribe Velez. Il fait passer de 35 000 personnes à 250 000 les forces armées du pays. Cette période a vu un accroissement en force des politiques guerrières et néolibérales de ce président qui a eu recours à la fraude pour se faire réélire.

La façon de réagir devant la situation de conflit qu’a adopté ce gouvernement a amené une escalade de bombardements, sans se soucier des êtres humains sur le territoire ni que les guérillas recrutaient aussi des enfants. Uribe faisait la publicité de son gouvernement avec des morts, avec du sang.

Une stratégie d’assassinats extrajudiciaires, aussi appelés faux positifs, fut dévoilée en 2008. Ça consistait à amener des jeunes des quartiers appauvris dans de zones de conflit, en faisant miroiter du travail et des opportunités. Ils étaient assassiné.es et montré.es comme morts au combat. La commission de la vérité a dénombré, en 2016, 6 400 personnes assassinées, mais les organismes des droits de la personne prétendent plus de dix milles.

Le conflit était la meilleure façon de justifier une forte violence contre les oppositions et la gauche politique. Après l’accord de paix de 2016, la guérilla des FARC est passée à la transition à la paix. Certaines dissidences sont restées, surtout celles liées au narcotrafic et l’exploitation minière illégale. L’Armée de libération nationale (ELN) était en négociation, quand Ivan Duque, allié d’Uribe, a pris le pouvoir. Toutes les négociations se sont terminées avec les groupes armés et la guerre a repris avec une forte violence contre la population tant urbaine que rurale. Beaucoup des ex-combattant.es ont été assassinées.

La politique de la paix totale de Petro

Domaine public

Le nouveau gouvernement présidé par Gustavo Petro propose une paix totale, avec tous les groupes armés, tant de droite, de gauche ou criminalisés. Mais, la diplomatie de la guerre est plus forte. À Catatumbo, dans le nord-est du pays, des groupes convoitent le territoire pour sa position stratégique, proche de la mer et à la frontière avec le Venezuela.

Le ralliement à la proposition de paix totale a vu ses jours comptés avec la persistance de la loi du plus fort : la concurrence est à l’ordre du jour. L’ELN a voulu faire des actions sans tenir compte des secteurs dissidents des FARC. Étant donné que l’ELN est le plus fort militairement, ça a déclenché une guerre entre les deux groupes qui met la population locale en danger.

Au moins trois mille personnes ont été déplacées et 80 personnes sont mortes. Un bilan désastreux pour un gouvernement qui s’est fait élire avec la promesse de la paix totale. À la différence des anciens gouvernements, le gouvernement Petro a décidé de protéger la population civile en priorité, de réduire les effets du conflit et de construire un plan pour l’organisation du territoire avec les organismes paysans et communautaires.

Un hôpital temporaire s’est mis en place pour toute la population. On a inauguré une université. Le président fut le premier dignitaire à visiter la région. Au moins deux cents membres de la dissidence ont rendu les armes, entre autres plusieurs enfants recrutés par la force.

Depuis l’Indépendance bolivarienne en 1810 et jusqu’à aujourd’hui, les conflits se sont suivis les uns après les autres, et la population en a subi les violences les plus atroces. Le nouveau gouvernement Petro a choisi de construire la paix pour la communauté et est disposé que les groupes armés puissent amorcer des négociations pour une sortie du conflit. Le gouvernement Petro met l’humanité au centre de son action.