Jade Saint-Georges, collaboration
Dans un monde incertain, les États généraux de la solidarité internationale se voulaient ancrés dans l’espoir et l’engagement vers des pistes concrètes pour se mettre en action pour un monde plus juste. À l’initiative de l’Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI), cet exercice, qui s’est déroulé à Montréal du 4 au 6 juin 2025. a été le point culminant de plus d’un an de travail par l’AQOCI, ses membres et ses partenaires.
L’objectif de l’évènement visait à rassembler les actrices et acteurs des organismes de coopération et de solidarité internationales, leurs partenaires et leurs allié·e·s des mouvements sociaux québécois afin de tenir une réflexion collective sur les enjeux, actuels et futurs, de la solidarité internationale. Sans avoir la prétention d’unifier tout le monde sur le détail de l’ensemble des modalités, l’AQOCI a été claire sur l’objectif de développer une vision concertée où chacun et chacune s’entende sur un fond commun.
Cohérence dans le fond et dans la forme
Ce qui est rafraîchissant avec un tel évènement et une organisation comme celle accomplie par l’AQOCI et son équipe, c’est la cohérence entre le message porté et les pratiques mises en place tout le long de l’évènement. Bien que rien n’est jamais parfait et que la route vers la mise en lumière de nos biais et angles morts est un travail continu, il est à souligner que les États généraux s’illustrent en modèle en termes d’organisation accessible.
Moi-même ayant demandé des accommodements familiaux pour faciliter ma participation, j’ai été conquise par l’accueil et les efforts de l’ensemble de l’équipe pour faciliter ma participation. J’ai également été ravie de constater que l’essentiel de l’espace était dédié aux groupes et organisations pour des échanges qui se voulaient engagés tout en étant sécuritaires. Il va de soi que le succès de l’évènement n’est pas non plus étranger à l’engagement et aux valeurs portés par les participants et participantes. Clairement cet espace était attendu dans le secteur.
Une déclaration d’engagement aux pistes d’actions immédiates et concrètes
Outre les ateliers, les espaces de réseautage et les forums tous aussi passionnants les uns que les autres, le point culminant des États généraux est sans aucun doute l’aboutissement de la Déclaration d’engagement qui a été adoptée le 6 juin 2025 par les participants et participantes.
Cette déclaration qui se décline en 24 engagements s’inscrit dans une perspective qui cherche à être plus décoloniale, antiraciste, féministe et intersectionnelle. La vision de la Déclaration est ancrée « dans l’espoir d’un monde plus juste, inclusif, solidaire et respectueux de l’environnement et de la nature, où la solidarité internationale est indissociable des luttes contre les inégalités, les oppressions et la pauvreté ». Sans s’y limiter, les engagements affirment clairement vouloir contribuer à lutter contre le racisme, le capacitisme, le classisme, l’homophobie, l’hétéronormativité, la transphobie, le sexisme, le cissexisme, l’âgisme et les discriminations religieuses tout en reconnaissant que ces systèmes d’oppression se croisent, se renforcent mutuellement et produisent des formes spécifiques d’exclusion souvent invisibilisées.
Autre élément à mettre en lumière, les terminologies porteuses d’un sens transformateur des rapports de pouvoir ont été utilisées sans gêne alors qu’on voit une montée de l’autocensure dans le secteur comme stratégie de survie face aux coupures drastiques. Pensons ici au démantèlement abrupt de USAID et au lexique environnemental et social que les scientifiques ne peuvent plus utiliser aux États-Unis sous peine de perdre leur financement. Dans ce contexte, il est salutaire et essentiel que l’AQOCI et ses membres se tiennent fièrement debout et réaffirment leur position pour la justice sociale tout en assoyant cette position sur des engagements concrets.
Une solidarité renouvelée avec les peuples historiquement et socialement opprimés
Dans le contexte de la montée des droites, de la crise climatique, des violations à répétions du droit international par les grandes puissances, du génocide en Palestine et des crises humanitaires au Congo, au Soudan, en Ukraine, pour ne nommer que celles-ci, un espace comme celui qu’a réussi à mettre en place l’AQOCI fut d’une nécessité telle qu’il me manque de mot pour l’exprimer.
Bien que les défis semblent si grands qu’il faut chercher notre espoir pour un monde meilleur très profondément dans nos cœurs et nos convictions, nous retrouver entre personnes portant l’espoir d’un autre monde possible a été extrêmement ressourçant et réénergisant pour nourrir l’engagement vers des pistes concrètes d’action. Loin d’idéaliser le secteur de la coopération et de la solidarité internationales qui a ses biais et ses paradoxes, l’évènement et la déclaration qui en découle ont permis de réaffirmer notre solidarité avec les communautés historiquement et socialement opprimées, mais également de porter une réflexion critique sur nos rôles dans les systèmes qui reproduisent et perpétuent ces mêmes oppressions. Une prise de conscience plus que nécessaire qui tombe à point et qui, espérons-le, saura être renouvelée de manière continue.
Signez la Déclaration d’engagement des États généraux de l’AQOCI : ici !