Élections à New York : Quel avenir pour la gauche américaine ?

Rencontre avec Mamdani lors d'une réunion avec le DSA à New York. Crédit : Bingjiefu He
Vous appréciez cet article ? Il a été écrit par un.e jeune stagiaire ou correspondant.e du Journal.
Bien que la campagne de financement du Fonds Jeunesse soit terminée, il est toujours possible d’aider la relève du journalisme engagé en cliquant sur le lien ici.
Toute contribution est appréciée !

Laila Abed Ali, correspondante en stage.

À New York, les élections municipales de novembre 2025 ont marqué un tournant historique. Zohran Mamdani, figure du Democratic Socialists of America (DSA), a été élu maire. Son élection ne symbolise pas seulement un changement politique, mais l’affirmation d’un nouveau modèle fondé sur l’organisation populaire, la justice sociale et la conviction que l’espoir peut redevenir un moteur de l’action publique.

La renaissance d’un espoir collectif : « Vous pouvez le faire aussi ! »

La victoire de Zohran Mamdani n’est pas le fruit d’un hasard. Elle s’est construite dans la durée, au cœur des quartiers, avec les habitants. Dès les premiers jours de sa campagne, l’ancien membre de l’Assemblée législative de l’État de New York a misé sur une stratégie participative : porte-à-porte, réunions communautaires, discussions dans les parcs, cafés et écoles. Cette approche directe a donné à son mouvement une force inédite.

Dans un contexte de défiance vis-à-vis des élites politiques, Mamdani a réussi à rassembler celles et ceux qui se sentaient exclus du débat public : les locataires menacés par la spéculation, les travailleurs précaires, les immigrés oubliés des programmes économiques. Dans son discours de victoire, il a rendu hommage à ces soutiens invisibles : « Cette victoire est la vôtre. À chaque chauffeur de taxi, à chaque infirmière, à chaque vendeur de rue, cette ville est la vôtre. »

Pour beaucoup de militants de la gauche américaine, la victoire de Mamdani démontre qu’il est possible de gagner en restant fidèle à des principes de justice et d’égalité. La déclaration publiée par la DSA sous le titre « Zohran won, and you can do it too » le dit clairement : cette victoire n’est pas un miracle, mais le résultat d’un travail patient et collectif, que d’autres peuvent reproduire ailleurs.

La campagne new-yorkaise a montré que la gauche n’était pas condamnée à être marginale. Avec des moyens limités, mais une organisation solide, elle peut concurrencer des appareils politiques puissants. « Vous pouvez le faire aussi », écrit le DSA. Ce message a circulé dans toutes les sections locales : l’élection de Mamdani doit être perçue comme un signal, une invitation à agir.

Une victoire de mouvement avant tout

L’un des atouts majeurs de Mamdani a été son programme. Il a placé au cœur de son projet des mesures concrètes : un contrôle renforcé des loyers, la gratuité des transports publics pour les plus modestes, un plan d’investissement dans les logements sociaux et les infrastructures de proximité. Sa campagne a insisté sur la nécessité de rendre la ville plus juste et plus vivable, notamment pour les classes populaires et les minorités.
Mais au-delà des mesures, c’est la philosophie du projet qui a séduit. Mamdani parle d’un New York qui n’est pas seulement une vitrine mondiale, mais une communauté. Il oppose à la logique du profit celle du soin et du partage : « Hope is alive. Hope is a decision », a-t-il déclaré lors de son discours. Cet espoir n’est pas naïf ; il est construit sur la conviction que la solidarité peut redevenir une force politique.

De plus, comme le rappellent les observateurs du Democratic Left, la campagne de Mamdani n’a jamais été centrée sur sa personne. Elle a été celle d’un mouvement, d’un collectif, d’une génération. L’organisation de terrain, portée par les sections du DSA, a joué un rôle déterminant. Des centaines de bénévoles ont sillonné les rues, organisé des réunions, distribué des tracts dans plusieurs langues, pour faire de cette élection un moment d’éducation populaire et d’action directe.
Cette victoire est donc bien plus qu’un succès électoral. Elle est la preuve qu’une autre manière de faire de la politique est possible. Elle redonne confiance à une base militante qui, depuis des années, cherchait des raisons d’y croire à nouveau.

Quel avenir pour la gauche américaine ?

L’élection de Mamdani dépasse les frontières de New York. Elle s’inscrit dans une dynamique plus large de renouveau de la gauche, des États-Unis jusqu’à d’autres mouvements progressistes dans le monde. Les victoires locales s’accumulent, et chacune devient un point d’appui pour la suivante.

À l’heure où le pays s’apprête à affronter de nouveaux défis politiques, cette victoire rappelle que l’alternative n’est pas seulement théorique. Elle existe déjà, dans les luttes quotidiennes, dans les solidarités qui s’organisent, dans la confiance retrouvée des citoyens envers la politique.

La victoire de Zohran Mamdani ouvre une nouvelle étape pour la gauche américaine, mais elle pose aussi une question essentielle : comment transformer cet élan en force durable ? Pour beaucoup de militants, l’enjeu dépasse la mairie de New York. Il s’agit désormais de construire un mouvement capable de peser à l’échelle nationale, de relier les luttes locales à une vision commune. Le DSA, fort de cette victoire, espère inspirer d’autres campagnes dans des villes comme Chicago, Los Angeles ou Austin. L’idée n’est pas seulement d’élire des figures progressistes, mais de redéfinir la manière même de faire de la politique, en plaçant la justice sociale, le logement et le climat au centre du débat public. Si Mamdani a montré qu’il était possible de gagner en restant fidèle à ses convictions, c’est désormais à toute une génération d’en faire un modèle de transformation durable.