A. Maktour, Le Soir d’Algérie, 8 mai 2019
A l’allure où vont les choses sur le plan économique, entre autres dans le redressement des finances publiques du pays, il y a bel et bien matière à craindre que l’on aille jusqu’au bout de l’échéancier prévu légalement par le dispositif de mise en place du financement non conventionnel. La planche à billets devrait donc fonctionner jusqu’au bout des cinq années prévues.
Il faut dire que rares sont ceux qui ne s’attendaient pas à ce que les bouleversements politiques qui secouent le pays depuis deux mois et demi maintenant n’allaient pas influer sur la vie économique, déjà plutôt morose et surtout brillant par une grande incertitude dans ses perspectives, malgré l’embellie sur le marché des hydrocarbures de ces dernières semaines.
La conjoncture que le mouvement populaire a imposée au pays a donc eu une influence telle que, par exemple, il se profilait chez beaucoup d’analystes et de spécialistes des questions économiques et financières l’idée selon laquelle le recours au financement non conventionnel décidé par Ahmed Ouyahia allait être finalement plus court que prévu et les nouveaux «maîtres» du pays pourraient décider d’opter pour des alternatives autrement plus… conventionnelles pour le financement de l’économie, et mettre sur les rails une politique conjoncturelle de relance, comme le rappelait l’économiste Brahim Lakhlef dans une contribution sur l’édition d’hier du Soir d’Algérie, qui s’appuie sur deux instruments essentiels. L’instrument budgétaire d’abord avec une politique pour stimuler la croissance, réduire le chômage et redynamiser les investissements. La politique monétaire ensuite. Cette option est l’ensemble des mesures décidées par un gouvernement dont le but est de pouvoir agir sur les conditions du financement de l’économie.
Si l’on doit se fier aux prédictions de la Banque mondiale, le rééquilibrage budgétaire pourra reprendre au second semestre de cette année pour ensuite être suivi d’un léger ralentissement des secteurs hors hydrocarbures sur l’année 2019, neutralisant une légère augmentation de la production d’hydrocarbures. En conséquence, la croissance du PIB réel est attendue à 1,9%. Avant la remontée des cours de ces dernières semaines, et eu égard à la tendance à la baisse des prix du pétrole d’avant le mois d’avril dernier, il était logiquement attendu que l’on assiste, comme le déclarait le dernier compte-rendu de la Banque mondiale, à une aggravation des déficits budgétaire et courant ; lesquels devraient atteindre respectivement 8,5 et 8,1% du PIB alors que l’inflation demeurera contenue.En tous les cas, une impasse politique qui s’étalerait pour de longs mois encore ne serait pas sans conséquences sur l’économie nationale qui ne nageait pas non plus en pleine confiance avant le début du mouvement populaire, comme le montraient il y a quelques jours les statistiques de l’Office national des statistiques et surtout les perspectives énoncées par le FMI.
L’institution monétaire internationale qui prévoit une croissance algérienne en 2019 à 2,3%, alors qu’en octobre dernier, elle avait prédit que ce taux atteindrait 2,7% pour cette même année. D’après le FMI, le déficit du compte courant augmentera à 12,5% du PIB alors qu’il était de 9,% en 2018, et devrait remonter à 9,3% du PIB en 2020.
Quant au taux de chômage, il devrait progresser à 12,6% en 2019 et à 13,7% en 2020, contre 11,7% en 2018. Pour le taux d’inflation, il devrait connaître un rebondissement à 5,6% cette année et à 6,7% en 2020, alors que les autorités du pays s’accrochent aux 4% et alentours, bien que la réalité quotidienne du citoyen ne partage que modérément, pour ne pas dire pas du tout, la réalité socio-économique des Algériens, chiffres dépeints par les statistiques, entre autres celles de l’ONS, depuis un bon bout de temps déjà, et le Hirak n’y est pour rien, contrairement à ce qu’insinuent de la façon la plus sournoise, pour ne pas dire grossière, quelques parties pas très «innocentes».