Jordana Dias Pereira, extrait d’un texte paru dans Nueva Sociedad, novembre 2020
Les élections municipales au Brésil ont eu lieu le 15 novembre dernier. Il est possible de résumer certaines tendances de ces élections : a) affaiblissement du bolsonarisme; b) victoire du centre et de la droite traditionnels; c) constitution de fronts de gauche et signes de résistance. Il est important de garder à l’esprit que sur les 5 567 municipalités brésiliennes, 95, celles qui comptent plus de 200 000 électeurs, devront aller au second tour (les petites n’ont qu’un tour). Il faudra attendre le deuxième tour du 29 novembre pour connaître les résultats.
Affaiblissement de Bolsonaro
Bolsonaro, qui a quitté le Parti social-libéral (PSL) en 2019 en raison de conflits internes, n’a pas réussi à rendre viable son propre parti, Aliança Brasil. Sur les 78 «Bolsonaristes» enregistrés par le Tribunal suprême électoral, le seul gagnant a été le fils du président, Carlos Bolsonaro, qui a conservé son siège de conseiller à Rio de Janeiro.
De tous les maires qui ont eu un soutien du président, seuls deux sont allés au second tour : Wagner Sousa Gomes, connu sous le nom de « Capitaine Wagner » (Parti républicain de l’ordre social, PROS); et à Rio de Janeiro, Marcelo Crivella, l’actuel maire évangélique, qui est arrivé derrière le candidat de droite Eduardo Paes. À Sao Paulo, le candidat du président est arrivé quatrième, avec moins de 10 % des suffrages. Bolsonaro est donc sorti affaiblide ces élections, ce qui l’obligera à chercher des alternatives de soutien s’il veut atteindre la course électorale en 2022 avec des possibilités.
La victoire de la droite traditionnelle et du centre
Les élections municipales placent le Mouvement démocratique brésilien (MDB) en tête du classement des maires obtenu par parti (777 des 5 567 communes). Le Parti progressiste (PP) et le PSD et DEM sont ceux qui ont proportionnellement le plus augmenté dans le nombre de communes gouvernées dans le pays. Le conservatisme peut ainsi montrer des signes de renouvellement.
Percée modeste de la gauche
Les leaders de moins de 40 ans sont devenus les grands protagonistes du champ gauche. À la tête de ce phénomène, le candidat du PSOL à la mairie de São Paulo, Guilherme Boulos, 38 ans, qui a obtenu 20% des voix et ira au second tour avec l’appui du PT et du Parti communiste brésilien (PCdoB). Boulos appartient au Mouvement des travailleurs sans-abri (MTST) et est devenu une figure capable de renouveler le soutien à la gauche.
Dans le sud du pays, à Porto Alegre, Manuela D’Ávila est une autre jeune candidate de gauche qui a obtenu un vote fort : 29% des suffrages valables. A Recife, le second tour sera disputé par deux jeunes âgés de moins de 40 ans: Marília Arraes (PT) et João Campos (Parti socialiste brésilien).
À Bélem, Edmilson Rodrigues, du PSOL, est arrivé à la première place et s’en va au second tour avec une bonne avance. Le PT et le PSOL ont de bonnes chances de remporter 15 grandes villes.
Selon le journal O Estado de S. Paulo, plusieurs candidats qui ont présenté les agendas LGBTI, féministes, antiracistes ou autochtones ont été élus dans différentes régions, tel Erika Hilton (PSOL), la deuxième conseillère layant obtenu le plus grand nombre de votes à Sao Paulo.
À Curitiba, Carol Dartora, du PT, a été élue première conseillère noire de la ville. À Belo Horizonte, le professeur Duda Salabert (Parti travailliste démocrate), qui est trans, a eu le plus grande nombre de votes en tant que candidat individuel. A Belém, Bia Caminha (PT), une jeune féministe noire et bisexuelle est sortie des urnes en tant que plus jeune conseillère de l’histoire de la ville. Et ce scénario se répète pratiquement dans toutes les capitales. À Rio de Janeiro, l’héritage de Marielle Franco (jeune conseillère du PSOL et militante des droits humains assassinée en 2018 par des milices d’extrême droite) était également présent, à travers la victoire des femmes de son collectif dans la ville. Les taux de désapprobation les plus élevés à l’égard de Bolsonaro se trouvent parmi les femmes et les jeunes âgés de 16 à 24 ans.