Canada : plus de rhétorique que d’action dans la défense des droits

Groupe McLeod 11 octobre 2018.

 

Nous entendons souvent parler du Canada exhortant d’autres pays à respecter les droits de la personne, par exemple récemment, avec l’Arabie saoudite.

Cette année, le Canada a eu à subir une évaluation intitulée « Examen périodique universel (EPU) » au Conseil des droits de l’homme à Genève. Lors de l’examen, 275 pays ont formulé au total 275 recommandations au Canada.

Lors de la session du Conseil des droits de l’homme, l’ambassadrice du Canada auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, Rosemary McCarney, a annoncé que le Canada avait accepté 205 des 275 recommandations et en avait partiellement accepté trois autres. Le Canada a en particulier accepté les recommandations suivantes:

  • Renforcer les mesures visant à garantir la responsabilité des entreprises canadiennes en ce qui concerne les violations des droits de la personne commises à l’étranger et assurer l’accès des victimes à des recours;
  • Mettre pleinement en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et créer des mécanismes pour rendre opérationnel le consentement libre, préalable et éclairé;
  • Veiller à ce que toutes les réserves autochtones disposent d’eau potable d’ici mars 2021;
  • Mettre en œuvre toutes les recommandations de la Commission de vérité et réconciliation dans les meilleurs délais; et
  • Mener des enquêtes et assurer la collecte et la diffusion de données sur la violence à l’égard des femmes autochtones.

Avant de livrer sa réponse officielle au Conseil des droits de l’homme, le gouvernement canadien a lancé une vaste consultation auprès d’organisations de la société civile (OSC) et de groupes autochtones afin de définir des recommandations prioritaires et des suggestions pratiques de mise en œuvre. Il a co-organisé plusieurs événements avec des organisations de la société civile canadiennes, telles que Canada sans pauvreté, et a invité la société civile à soumettre des critiques écrites par courrier électronique ou via sa plateforme en ligne. Selon Alex Neve, secrétaire général d’Amnesty International Canada, les organisations de la société civile et les groupes autochtones ont été déçus par les consultations, car les suggestions formulées au cours de ces réunions ne figuraient pas dans la réponse du Canada aux recommandations de l’EPU.

En outre, le Canada a rejeté plusieurs recommandations importantes, notamment la ratification de la Convention n ° 169 de l’Organisation internationale du Travail sur les peuples indigènes et tribaux, la non-explication étant que cette question n’est « pas en cours d’examen». Le Canada a invoqué le même motif pour refuser de ratifier le protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, même si le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Stéphane Dion, avait promis en 2016 que le Canada le ratifierait.

Le gouvernement canadien a également refusé les recommandations visant à aligner son régime de détention pour immigrés sur les normes et obligations internationales en matière de droits de l’homme, notamment en ce qui concerne la durée de détention d’un détenu immigré pour des raisons administratives et non pénales – encore une fois, sans fournir d’explication claire. De même, le Canada a rejeté la recommandation visant à établir un plan national complet de lutte contre la violence à l’égard des femmes, déclarant qu’il mettait déjà en place de nombreuses mesures pour lutter contre la violence sexiste et qu’un plan national n’était pas nécessaire.

S’agissant de l’aide étrangère, le Canada a refusé de s’engager à augmenter le niveau de l’aide publique au développement (APD) afin d’atteindre l’objectif international de 0,7% du PIB. Il a justifié sa décision en déclarant que «le Canada a augmenté et s’emploie à mobiliser ses investissements dans l’aide internationale», une déclaration surprenante étant donné que le Comité d’aide au développement (CAD) de l’Organisation de coopération et de développement économiques a récemment critiqué son manque de ressources à la hauteur de ses ambitions et de sa rhétorique.

En fin de compte, comme Amnesty International Canada note dans son communiqué de presse, « l’examen périodique universel du Canada est une occasion manquée d’intensifier les engagements relatifs aux droits de l’ homme « puisque le Canada ne s’engage pas à des progrès substantiels et confirme essentiellement les initiatives déjà en cours ».

En 2017, le Canada s’est engagé à élaborer un protocole et une stratégie de mobilisation des intervenants afin de coordonner la mise en œuvre des obligations internationales en matière de droits de la personne dans les administrations fédérale, provinciales et territoriales, en consultation avec des organisations de la société civile. Depuis lors, aucun progrès concret n’a été accompli.

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