De la guerre et de l’économie : Trump contre ses alliés-subalternes du G7

 

 

VIJAY PRASHAD, Front Line (Inde), 26 juin 2018

Donald Trump est arrivé en retard et est parti tôt du sommet du Groupe des Sept à Québec, Canada. Il est arrivé prêt pour un combat. Il avait déjà commencé une guerre commerciale contre le Canada et l’Europe. Les États-Unis demandent depuis des années aux puissances européennes de contribuer davantage à l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), leur alliance militaire. L’OTAN compte 28 États membres, mais les États-Unis paient 22% du budget de l’OTAN. La norme établie par les États de l’OTAN est de consacrer 2% de leur produit intérieur brut (PIB) à l’armée. À l’heure actuelle, seuls cinq États le font (États-Unis, Grèce, Royaume-Uni, Estonie et Pologne).  Le Canada, par exemple, ne délègue que 1,02% de son PIB à ses militaires.

Trump est venu au Canada déterminé à lier la question des dépenses militaires aux négociations commerciales. Les États-Unis dépensent plus pour leur armée que n’importe quel autre pays dans le monde. Ce sont les États-Unis qui dominent effectivement la mission de l’OTAN en Afghanistan et ce sont les États-Unis qui ont mené l’essentiel des bombardements contre la Libye.

Mais l’OTAN est une alliance avec un problème. Les pays vaincus lors de la Seconde Guerre mondiale – l’Allemagne et le Japon – se sont montrés circonspects à l’idée de se réarmer à un niveau plus élevé. L’Allemagne a retenu ses dépenses militaires pour des raisons économiques et d’inquiétude en France. Les Etats-Unis ont pris la défense de l’Europe afin de contourner toute tension entre ces partenaires clés. Le Japon ne fait pas partie de l’OTAN, mais c’est un « allié majeur non-OTAN », un concept créé par l’OTAN pour réclamer une coopération étroite en matière militaire. La Constitution du Japon lui interdit de constituer une force militaire offensive. La pression sur le Japon pour qu’il augmente ses dépenses l’obligerait à retravailler sa Constitution.

Le charme discret du G7

Le G7 a été créé en 1975 dans la ville française de Rambouillet. Ce qui a réuni six grands pays industriels, c’est la crise pétrolière et l’émergence des États postcoloniaux. En 1973, ces États ont voté en bloc à l’Assemblée générale des Nations Unies pour un nouvel ordre économique international (NOEI). Le NOEI a proposé une base alternative pour l’activité économique à l’intérieur et à travers les frontières. Lors de la réunion inaugurale du G7, le chancelier ouest-allemand a déclaré à ses collègues qu’il était prêt à détruire l’industrie textile allemande si cela signifiait que l’ordre économique mondial serait renforcé au nom des capitalistes occidentaux en général. Les réunions du G7 après 1975 ont fonctionné comme une plate-forme secrète où les dirigeants de l’Ouest pouvaient se réunir et établir des politiques pour le reste du monde. Quand ils ont pu s’entendre avec une certitude raisonnable que leurs intérêts seraient bien servis, le G7 avait du sens pour eux. Par exemple, c’est au sein du G7 que les principales discussions ont eu lieu pour établir l’ordre du jour de l’Organisation mondiale du commerce (créé en 1994).

Maintenant que la crise économique mondiale catapulte au-delà de sa première décennie, l’utilité du G7 n’est pas aussi évidente pour ses États membres. Les attentes hémorragiques à l’intérieur des États-Unis ont poussé Trump à miser sur le nationalisme économique plutôt que sur la mondialisation du G7. C’est ce nationalisme économique qui brise la vision du monde des dirigeants du G7.  La guerre tarifaire mise en branle est la première salve contre l’unité du G7. La guerre des mots qui a suivi la réunion du Canada suggère qu’il sera difficile de maintenir l’alliance.

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