Les cinq défenseurs de l'eau après leur acquitement - crédit photo Marvin Diaz pour CISPES

Massi Belaïd, correspondant en stage

Bien que le tribunal ayant présidé le procès des cinq «défenseurs de l’eau» du Salvador ait rejeté les fausses accusations portées contre eux, le procureur de l’État fait appel et refuse de reconnaître le verdict. Cela relève d’une décision purement politique dans le pays de Nayib Bukele, «le dictateur le plus cool de la planète». Il s’agit d’accusations qui violent les Accords de paix de 1992 et la Loi de réconciliation nationale. Face à ce refus, il devient primordial de réaffirmer que la mobilisation doit se poursuivre tant que le président persiste à ne pas reconnaître son propre système de justice.

Le 18 octobre dernier, Miguel Angel Gámez, Alejandro Laínez García, Pedro Antonio Rivas Lainez, Antonio Pacheco et Saul Agustin Rivas Ortega ont tous été innocentés du chef d’accusation de meurtre d’une femme en 1989, pendant la guerre civile du pays.

Rappelons-le, ces individus sont de fervents militants de la défense de l’eau dans le pays au travers de l’Association de développement économique et social (ADES). Ils luttaient d’ores et déjà contre l’installation de mines de forage pour l’extraction de métaux précieux. Leurs revendications ont pris une telle ampleur qu’elles finirent par avoir gain de cause. Les cinq Salvadoriens se trouvent accusés d’un meurtre et emprisonnés dans des conditions difficiles dans le but de les faire taire, dans le contexte de la lutte du mouvement social allant à l’encontre des intérêts des politiques du pays.

Les «défenseurs de l’eau» du Salvador agissaient comme figures de proue de la lutte pour la préservation des eaux. Leur combat au Salvador a résonné internationalement, passant par toute l’Amérique latine jusqu’au Canada. Leur lutte est d’autant plus primordiale puisque la défense de ces eaux implique principalement de grandes compagnies minières canadiennes qui occupent la zone. Ceci établit un rapport Nord-Sud d’exploitation flagrante, soulignant l’importance d’un tel intérêt pour la cause.

Un bon nombre de mobilisations ont montré leur soutien à l’ADES et ont condamné ce jeu de pouvoir répressif. 251 organisations de défense de l’environnement et des droits humains de 29 pays ont exprimé leur solidarité. Au Canada, ce sont 38 organisations, dont Alternatives, qui agissent pour faire pression sur le gouvernement canadien et les autorités salvadoriennes.

L’objectif est simple : faire cesser le harcèlement exercé contre les défenseurs de l’eau en plus de mettre en garde contre l’évidente intention du gouvernement salvadorien de revenir sur l’interdiction nationale historique de 2017 de l’exploitation minière.

Comme le prouve la décision du tribunal, il ne s’agit pas d’une condamnation légitime. On voit là une volonté de persécution des mouvements de défense des eaux, et plus généralement des mouvements sociaux dans le pays. Sous couvert d’un «état d’exception», Navib Bukele bafoue les droits inaliénables, sous simple motif de profit au détriment de son peuple et de l’environnement.

Ce procès remet en question la crédibilité du gouvernement de Nayib Bukele et son refus du verdict ne fait que réaffirmer sa volonté d’écarter la justice environnementale et les droits humains au profit de l’exploitation. Il faut continuer de suivre cette affaire, car, bien que les pressions aient permis d’améliorer la situation des accusés, il y a toujours une évidente volonté de les garder derrière les barreaux.