Vous appréciez cet article ? Il a été écrit par un.e jeune stagiaire ou correspondant.e du Journal. Aidez-nous à les soutenir, contribuez au Fonds Jeunesse du Journal des Alternatives ! Toute contribution est appréciée !

Claire Comeliau, correspondante en stage au Journal des Alternatives

Dans le cadre du Forum Social mondial sur les intersections, organisé à Montréal en 2025, un espace dédié aux peuples originaires a été mis en place. Le conseil traditionnel Kanienkehaka, dont Edith Mora Castelan est membre, a proposé des cercles de partage sur la décolonisation et le soin de l’environnement.

Le traité de Wampum à deux voies, pour la paix et le vivre ensemble

Initié en 1613, le traité de Wampum à deux voies dérive directement de la constitution spirituelle, sociale et politique de la confédération sociale des Cinq Nations. C’est un traité de paix et d’amitié qui prône le vivre ensemble en empêchant l’imposition des coutumes, des traditions et des lois à l’autre.

Les divergences de gouvernance entre les instances européennes et celles des peuples originaires sont notables : le vote démocratique est la méthode mise en avant par les colons, celle qu’ils ont tenté d’imposer, tandis que les autochtones s’organisent via des conseils nécessitant un consensus. Trois conseils se complètent : le clan du loup chargé de l’initiation, le clan de l’ours, qui délibère et le clan de la tortue, qui vérifie et observe le processus et veille à ce qu’il soit respecté.

En 1876, la Loi sur les Indiens a été adoptée par le gouvernement fédéral canadien, forçant l’intégration des autochtones à la société canadienne en les assimilant et en les dépossédant de leurs terres. Cet acte barbare et colonial explique en partie la grande méfiance et la crise de confiance des peuples originaires à l’égard des politiques actuelles.

Les interférences politiques : méfiance et désillusion

Les différents gouvernements n’ont pas respecté le traité de Wampum, et l’ont bafoué. Cette trahison alimente la désillusion croissante que beaucoup ressentent envers les élu,es. Ils sont perçus comme des hommes assoiffés de pouvoir qui ne tient pas parole et voulant imposer des systèmes n’appartenant pas aux peuples originaires. Toute considération de l’autre disparaît, anéantissant esprit d’écoute et respect mutuel. Le mode de décision que l’on connaît aujourd’hui, issu du système de vote, génère constamment des conflits et une volonté d’avoir raison qui ne peuvent qu’aboutir à un climat malsain.

Le modèle de société matrilinéaire

La grande Loi de la Paix et le traité de Wampum sont issus d’une loi matrilinéaire. Les peuples originaires ont décidé, il y a deux mille ans, de replacer les mères de nos nations au centre de l’autorité qui leur revenait et de s’en remettre à l’ordre naturel : tout le monde est né d’une femme. La primauté n’est donc pas donnée aux hommes, mais aux femmes. Un dialogue entre les deux entités de la création, constituées par la donneuse de vie et le protecteur de vie, est alors entretenu dans les conseils.

La protection de la Terre et la solution des peuples originaires

Les peuples originaires ont observé le comportement des membres des colonies européennes au cours des cinq cents dernières années. Leurs agissements ont été si destructeurs que l’ONU a fixé la date limite de 2030 pour inverser leurs actions. Il est clair qu’une action mondiale doit être entreprise pour contrer le changement climatique et protéger notre terre. Cependant, la corruption au niveau politique et l’obsession pour le pouvoir empêchent tout progrès.

Pour répondre aux enjeux écologiques actuels, les communautés autochtones offrent une solution : le plan de « Hemp-Unity » (Union de chanvre). Edith Mora Castelan affirme que le chanvre est « une médecine magique qui peut guérir notre mère Terre ». Mais pour cela, il est nécessaire de dédiaboliser cette ressource, souvent mal perçue, car elle appartient à la même famille que la marijuana, malgré le fait qu’elle contient moins de 1 % de tétrahydrocannabinols. Le chanvre dépollue et désintoxique la terre et a notamment été utilisé lors des désastres nucléaires de Tchernobyl. C’est une fibre qui peut être utilisée dans la médecine, pour faire des vêtements, dans la construction ou encore la nourriture. Une véritable panoplie d’usages est donc possible, permettant ainsi une transformation de l’économie capitaliste en économie circulaire et écologique.

Une volonté d’engagement qui donne de l’espoir

Selon Edith, l’espoir est toujours là. Les peuples originaires prévoyaient une période de noirceur, mais savaient que le soleil allait à nouveau se relever. Il faut absorber tout ce poison de la mentalité colonisatrice de destruction insensée et trouver une ouverture à la guérison des traumatismes transgénérationnels, porteuse d’un espoir pour les générations à venir et tournée vers l’amour.

« Pour prendre soin de la terre, il faut s’occuper des femmes », affirme résolument Edith. Ce grand déséquilibre de domination des hommes doit être réparé, et c’est aussi comme cela que nous pourrons évoluer vers des solutions concrètes et durables pour préserver la santé de notre planète.

Le FSMI a été évocateur d’une volonté d’engagement forte chez les jeunes, notamment concernant des enjeux actuels tels que le changement climatique. L’ouverture à des alternatives promouvant un monde rééquilibré, où les femmes et la paix retrouvent leur place, est un cheminement permettant de retrouver le grand équilibre. La Terre est vue comme une mère et les femmes jouent un rôle fondamental dans la transmission et la protection du vivant : ainsi, écologie et féminisme deviennent indissociables.