Europe : le mouvement social confronte la COVID

Pierre Galand (ex-sénateur socialiste et militant altermondialiste belge

 

Le 13 septembre dernier, tout le personnel soignant était dans la rue à Bruxelles pour appeler le gouvernement à sérieusement reconsidérer la politique de la santé. Ils étaient nombreux et pacifiques, ce que le commissaire en chef de la Police de Bruxelles n’eut pas l’air de comprendre. Très vite le dialogue fut rompu, un mauvais signe.

À la veille d’une troisième vague de la pandémie qui a perturbé l’ensemble de notre vie sociale, culturelle et économique, les lignes ont-elles bougé ?

Si l’on s’en tient aux choix privilégiés par le G20, ce sont toujours les obsessions ultralibérales, la croyance dans les vertus du libre marché comme seul moteur des biens et services à rendre à nos populations, qui servent d’unique boussole. En Occident, ce sont donc les GAFAs et les méga-pharmas qui sont maîtres de notre destin.

Dans le même temps, le désordre planétaire, les guerres et leurs conséquences dramatiques pour de plus en plus d’êtres humains et la nature sont dénoncés par les grandes institutions des Nations Unies et du GIEC.

Chez nous, la pandémie a amené nos gouvernants à prendre des mesures qui restreignent nos libertés, musellent les artistes et isolent les travailleurs. Ces mesures dites provisoires se prolongent dangereusement, car mixées avec les mesures sécuritaires qui sont sensées combattre les risques d’attentats terroristes. Nous voilà sur un terrain extrêmement dangereux, fissurant et fragilisant pour longtemps le modèle de nos démocraties sociales avancées.

Il n’y aura donc plus de retour à la normale, si tant est que ce début de XXIe siècle puisse encore être considéré comme tel.

Nous avons, en effet, été entraînés par les États-Unis, obsédés par leur volonté hégémonique planétaire, sur une voie opposée à celle que laissait entrevoir la chute du Mur de Berlin et la fin de l’Apartheid.

Nous sommes, comme en 1970, revenus aux heures noires de la folle course aux armements nucléaires entre Russes et Américains, sauf que, pour les USA, l’ennemi aujourd’hui est plus que jamais la Chine identifiée comme le pire concurrent économique.

Les dépenses militaires ont explosé et si c’est le G20 qui nous dicte les orientations économiques à respecter, c’est l’OTAN qui nous impose les nouvelles règles de la confrontation à l’égard des Russes, de la Chine et des États dits voyous.

Revenir à la normale, c’est-à-dire à une coexistence reposant sur des normes garantissant à l’ensemble de notre humanité bien-être, liberté, entraide et respect de la nature, ne reposant pas seulement sur des vœux pieux on non nécessitera des mobilisations citoyennes d’une importance sans précédent.

Fini donc l’individualisme égoïste et voici venue ou revenue l’obligation de mettre au vestiaire les vieilles théories de « ruissellement de la richesse ». Finies les pseudo-vertus de la concurrence sur le libre marché, qui n’est que l’occasion pour quelques-uns de s’accaparer du magot et de le mettre à l’abri dans des paradis fiscaux comme à l’époque de la flibusterie.

Nous voilà obligés, dans l’urgence, de penser notre avenir et celui des générations du futur en des termes de coopération et d’entraide tant locale que nationale et internationale. Penser collectivement, imaginer, avec les moyens modernes de communication, comment partager les savoirs et les avoirs pour sortir ensemble de l’impasse actuelle.

Voilà le magnifique défi que nous sommes appelés à résoudre, voilà l’exigence pour notre survie.

Les attentes sont grandes en ce début d’année. Heureusement, les moyens existent et les jeunes volontaires pour cette renaissance moderne sont sur les starting-blocks.

À nous de ne pas leur fermer la porte et d’ouvrir grand les fenêtres