Frapper fort pour marquer les esprits. Depuis l’assassinat de Samuel Paty, il n’y a aucun doute : l’exécutif a mis le pied sur l’accélérateur sur le terrain de son offensive islamophobe.
Après la mise en chantier avec la loi séparatisme il y a quelques semaines, l’exécutif est définitivement passé aux travaux pratiques : le ministère de l’intérieur a appelé coup sur coup à la dissolution du CCIF et de Barakacity, l’expulsion de personnes étrangères fichées comme « radicalisées », avant de demander la fermeture de la mosquée de Pantin, et la remise en débat de la loi Avia facilitant la censure de contenus sur les réseaux sociaux et internet. Une offensive qui, semble-t-il, n’en est qu’à ses débuts, tant l’exécutif prévoit d’ores et déjà d’amender son projet de loi sur le séparatisme, insuffisant selon ses dire. Une façon de profiter de l’effet de sidération pour un nouveau tour de vis autoritaire.
Déjà dimanche soir, Macron avait ouvert la voie à l’issue du Conseil de défense. « La peur va changer de camp. Les islamistes ne doivent pas pouvoir dormir tranquilles dans notre pays », avait-il lancé. Et c’est Darmanin qui a lancé les premières attaques, dans son costume préféré de premier flic de France, avec tout d’abord des opérations de police lancées tôt ce lundi matin contre « des dizaines d’individus pas en lien forcément avec l’enquête mais dont nous avons manifestement envie de passer un message […] : pas une minute de répit pour les ennemis de la République », comme il l’a expliqué au micro d’Europe 1 à une heure de grande écoute. Le « message » est donc clair : il s’agit de passer de la théorie à la pratique du projet de loi séparatisme qui, pour l’heure, n’est pas encore adopté. Ainsi, avec l’assassinat de Samuel Paty, le gouvernement saisit l’occasion de donner corps à une loi sur le séparatisme.
« Il faut faire une démonstration de force républicaine : on débarque, on coffre, on expulse, tranche-t-on au sein de l’exécutif. Nous n’en sommes plus aux lampions, aux bougies ou aux banderoles. Les Français attendent de nous une réponse ferme et radicale », explique une source de l’exécutif au Figaro.
Parallèlement, l’opération d’instrumentalisation de l’assassinat de Samuel Paty se poursuit. Pour ancrer dans la durée son saut répressif opéré avec le couvre-feu, le gouvernement compte bien sortir le grand jeu pour marquer les esprits. Après l’opération d’« union nationale » ce dimanche, le gouvernement prépare une cérémonie d’hommage national ce mercredi « dans la cour de la Sorbonne ». L’Élysée indique que la Sorbonne est « le monument symbolique de l’esprit des Lumières et du rayonnement culturel, littéraire et éducatif de la France ». Une manière pour le gouvernement de se rattacher sur le plan idéologique à une histoire passée pour se poser en chantre de l’universalisme contre l’obscurantisme religieux.
Alors que l’annonce du couvre-feu avait exprimé de manière flagrante l’échec de la stratégie sanitaire du gouvernement, c’est une séquence qui tombe à pic. Dans la droite lignée de la loi séparatisme, le gouvernement joue sur l’effet de sidération pour emprunter bloc par bloc le programme de l’extrême-droite, obligé de surenchérir en réclamant une « législation de guerre » dont on ne sait ce qu’elle revêt tant l’exécutif s’enfonce déjà dans la surenchère autoritaire, moyennant couvre-feu, opérations de police, fermeture de la mosquée de Pantin. Le pari du gouvernement est ainsi de couper l’herbe sous le pied à l’ensemble de l’opposition politique qui avait tiré à boulet rouge sur le couvre-feu.
Dans ce cadre, l’opération d’union nationale à laquelle la gauche institutionnelle et les directions syndicales ont été parties prenantes participe de fait à cautionner non seulement l’instrumentalisation gouvernementale, mais aussi le saut répressif qui en découle. Car il y a bien un lien entre l’offensive islamophobe et le couvre-feu qui apparaît bien plus comme une mesure policière que comme un « confinement nocturne » à des fins sanitaires.
Alors que gouvernement compte bien profiter de cette offensive islamophobe de grande ampleur pour durcir le renforcement répressif opéré par le couvre-feu, il est plus que nécessaire de refuser toute opération d’« union nationale » qui cherche, en dernière instance, à désarmer le monde du travail et la jeunesse. Il s’agit, pour l’ensemble des organisations politiques et syndicales qui se revendiquent du mouvement social, de dénoncer avec force ce saut répressif qui s’incarne sur plusieurs terrains, des mesures islamophobes aux attaques contre les droits démocratiques.
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