Le Nouvelliste, 22 avril 2021
L’Observatoire haïtien des crimes contre l’Humanité a présenté, ce jeudi 22 avril, un rapport sur les crimes contre l’humanité perpétrés en Haïti au cours de ces dernières années. L’ensemble des informations ont été conciliées dans un document intitulé: « Massacres cautionnés par l’Etat : règne de l’impunité en Haïti ». Lequel a été préparé avec le support de l’international Human Right clinic de la Faculté de droit de l’Université Havard. Me Mario Joseph qui l’a présenté continue d’indexer des hauts fonctionnaires de l’Etat qui ont, soit cautionné, commandité ou participé dans ces massacres. « Jovenel Moïse doit être jugé comme responsable de crime contre l’humanité suivant la doctrine de responsabilité du supérieur hiérarchique », plaide Me Mario Joseph.
La publication de ce rapport arrive à un moment où l’insécurité fait rage dans le pays. Haïti est un pays de permissivité où l’impunité alimente l’escalade d’insécurité a analysé, Hérold Jean François, porte-parole de l’Observatoire haïtien des crimes contre l’Humanité(OH CCH) qui a noté la passivité de l’Etat face aux différents massacres enregistrés dans des quartiers populaires. « La façon dont le pouvoir a réagi face à ces massacres laisse croire qu’il veut l’imposer comme la réalité », a-t-il dit.
Mario Joseph, responsable du Bureau des avocats internationaux, lui, n’y va pas avec le dos de la cuillère. Il affirme clairement que les bandits ont bénéficié du soutien de l’Etat pour commettre leurs forfaits « Durant les quatre années de la présidence de Jovenel Moise, des observateurs des droits humains ont documenté au moins dix attaques brutales menées dans des quartiers défavorisés de la capitale. Trois attaques particulièrement grave- à la Saline, dans le quartier populaire de Bel-Air et à Cité Soleil sont particulièrement bien documentées », peut-on lire dans ce rapport.
« Ces attaques illustrent bien les méthodes et les moyens employés pour mener les attaques, ainsi que la façon dont les acteurs étatiques ont appuyé l’organisation et l’exécution de celles-ci » poursuit le rapport. Selon Me Joseph, au moins 240 personnes ont été tuées durant ces massacres, au moins, 45 blessés graves, au moins 25 femmes violées, plusieurs centaines de maisons incendiées, des déplacés.
Les attaques sont des outils de répression utilisées par le pouvoir
Ces attaques dans lesquelles sont impliqués des hauts dignitaires de l’Etat ciblent la population civile et servent d’outil d’oppression pour la museler. « Les gangs supportés par le pouvoir ont commis ces massacres dans ces quartiers populaires pour empêcher la population de gagner les rues, pour exiger le départ du président de la République, Jovenel Moise », a-t-il souligné rappelant que « Saint Jean Bosco » est une espace où les manifestations font généralement recettes. « Ces attaques commises contre La Saline, Bel-Air, Cité Soleil ont eu lieu pour des raisons politiques, contre des bastions politiques. Ces attaques contre ces personnes ont eu lieu pour des raisons politiques et lorsqu’il y a des raisons politiques, de race… qui mènent à d’autres incriminations on peut parler de crime contre l’humanité », a indique le responsable du BAI.
« Au regard du droit international, la responsabilité pénale pour crime contre l’humanité implique les personnes qui ont posé des actes qui constituent ce crime contre l’humanité, puis les personnes qui l’ont planifié, incité, commandité ou aidé dans le cadre de la commission de ces attaques » a rappelé Me Joseph. « Les gangs et les chefs sont les auteurs de ces actes. Il y a des fonctionnaires qui ont participé à ces actes directement, ils sont auteurs et complices. Il y a des autorités de la police qui n’ont pas assisté la population civile, il y a des policiers qui ont aidé les gangs, ils ont leurs responsabilités. Il y a la responsabilité des autorités de l’Etat [..] Jovenel Moïse doit être jugé pour responsable de crime contre l’humanité, suivant la doctrine de responsabilité de supérieur hiérarchique », plaide Mario Joseph.
En guise de recommandations, les responsables de l’OCCH invitent Haïti à enquêter sans délai de façon rigoureuse sur les crimes qui font l’objet du rapport et à traduire en justice les personnes qui en sont responsables. A la commission interaméricaine des droits de l’homme, ils demandent de considérer les crimes contre l’humanité commis en Haïti comme une situation qui requiert une attention particulière dans son rapport annuel. Les Nations-Unies et les Etats-Unis sont aussi appelés à jouer leur partition pour le jugement des crimes contre l’humanité perpétrés en Haïti.