Haïti : dix ans après le séisme, quelle reconstruction?[1]

James Darbouze[2]

Ecoute plus souvent
Les choses que les êtres,
La voix du feu s’entend

Entends la voix de l’eau
Ecoute dans le vent
Le buisson en sanglot :

C’est le souffle des ancêtres.
Ceux qui sont morts ne sont jamais partis
Ils sont dans l’ombre qui s’éclaire

Et dans l’ombre qui s’épaissit,
Les morts ne sont pas sous la terre …

Birago Diop, « Le souffle des ancêtres »

Le 12 janvier 2010, un séisme de magnitude 7 a causé la mort de plus de 200 000 mille personnes (280.000) et provoqué des dégâts matériels s’élevant à des milliards de dollars en Haïti (7,8 milliards selon l’Evaluation Post Désastre des Besoins et Dégâts). Ce désastre, le plus grand que la société haïtienne ait connu de toute son histoire, a détruit ou endommagé plus de 300 000 édifices, jeté plus de 1,5 million de personnes à la rue, laissé plusieurs dizaines de milliers d’amputés et des centaines de milliers de traumatisés. Dix ans après, le pays ne s’est toujours pas relevé de cette catastrophe « naturelle ». L’onde de choc du séisme se fait toujours sentir. Il a fait beaucoup de mal à l’économie déjà fragile du pays. De plus, une crise sociale et politique aigues, dont les racines remontent à plusieurs décennies, fait des ravages sur la vie de la grande majorité de la population.

J’ai été invité à intervenir sur le thème « Haïti, 10 ans après quelle reconstruction? ». Il sera question de sonder les contours de la reconstruction : les principaux protagonistes et l’apport de la population haïtienne au processus.

Introduction

Avant toute chose, je tiens à saluer le Rehmonco (Regroupement des Haïtiens de Montréal contre l’Occupation d’Haïti) qui fait un travail extraordinaire d’accompagnement de l’incessante lutte du peuple haïtien pour son indépendance et une existence digne. Vifs remerciements aux organisateurs-trices ayant pris l’initiative de cette activité et une pensée spéciale pour tous nos morts en général, en particulier ceux et celles du 12 janvier 2010 (entre 250.000 et 280.000 selon les chiffres officiels) – en effet ce dimanche 12 janvier 2020 marque le dixième anniversaire du moment où, à 16 h 53, un tremblement de terre d’environ 35 secondes a changé la face d’Haïti[3]. Aujourd’hui, nous commémorons le 10ème anniversaire du tremblement de terre, dans un contexte extrêmement difficile où le peuple haïtien connaît une autre tragédie. Depuis plusieurs mois, des gangs sous le contrôle du pouvoir d’Etat tuent et massacrent dans les quartiers populaires. A côté de la longue marche vers l’indépendance, l’autonomie, le bien-être, la résistance, l’histoire du peuple haïtien est une longue litanie de tragédies. Pourtant, aujourd’hui, demain et après-demain par delà les tragédies que nous vivons au quotidien, nous nous souviendrons encore et encore du tremblement de terre qui est maintenant dans sa 10ème année.

La vraie histoire qui nous rassemble ici, celle dont nous sommes tous les protagonistes, c’est celle de la reconstruction post séisme d’Haïti.

Rappelons qu’il y a théoriquement trois phases dans une dynamique de gestion post catastrophe : la phase d’urgence, celle de réhabilitation ou de relèvement rapide et la phase de reconstruction. L’urgence des premiers jours est de sauver ceux qui peuvent encore l’être, soigner les blessés et évacuer au plus vite les corps des victimes sorties des décombres. Le relèvement rapide (early recovery) et la reconstruction post catastrophe constituent une occasion pour les populations, les communautés touchées, de renforcer leur résilience face à la reproduction de tels phénomènes. L’intégration de la réduction des risques dans les mesures de développement, en particulier l’aménagement du territoire et l’amélioration des normes et des codes dans le domaine du bâtiment devient un impératif catégorique de durabilité.

La phase de reconstruction commence à partir du mois de mars 2010, quand par le biais de la loi d’Urgence (9 septembre 2008, modifiée le 15 avril 2010 et maintenue par arrêté du 20 avril) est créée, pour une durée de 18 mois, la Commission intérimaire pour la reconstruction d’Haïti (CIRH). Décidée lors de la conférence internationale des donateurs à New York, le 31 mars 2010, la CIRH est consignée par l’arrêté du 21 avril 2010. En tant qu’instrument de coordination et d’allocation efficace des ressources, elle devait répondre aux défis de la transparence et de la responsabilisation afin de rendre opérationnel le « Plan d’Action pour le Relèvement et le Développement National (PARDN).»

Un deuxième rappel nécessaire concerne l’inexistence dans la plupart des cas de normes pour la construction, de systèmes de pronostics et d’alertes, d’un service de protection civile. Comme le perçoivent Gilbert (2010) et Schuller (2016), l’ampleur de l’hécatombe laisse entrevoir que le désastre, loin d’être naturel, a été « socialement planifié »[4].

Autrement dit, des interventions – ou absence d’interventions – humaines ont augmenté l’impact du phénomène. En ce cas précis, l’ampleur de la catastrophe a été rendue possible par des décisions désastreuses qui ont fait régresser la société haïtienne pour reprendre un titre du professeur Emmanuel Buteau (2003). Comme toujours, des décisions du gouvernement haïtien prises dans l’intérêt des entreprises et institutions internationales ainsi que des oligarchies locales.

Une fois ces rappels réalisés, revenons au thème de notre intervention « Haïti, 10 ans après quelle reconstruction? »

Comme mentionné au début, je vais m’atteler à sonder les contours de la reconstruction : les principaux protagonistes et l’apport de la population haïtienne au processus. Le propos est séquencé de la manière suivante : dans un premier temps, je catégoriserai les deux grands groupes d’acteurs de la reconstruction (les protagonistes et les antagonistes); ensuite, je passerai à pieds joints sur les accords majeurs du projet dominant avant de faire une rapide synthèse autour du bilan dans un troisième temps et je conclurai en rappelant les termes du projet alternatif de reconstruction formulé dans l’immédiat après-séisme par les organisations du mouvement social haïtien.   

  1. Les acteurs de la reconstruction

Le protagoniste est celui qui tient un rôle de premier plan ou le rôle d’un personnage clé dans une histoire. Autour de lui se développent les événements et pour lui on est souvent censé éprouver de l’empathie… car il vit le plus de conflit dynamique et, par conséquent, il est celui avec qui on tend à s’identifier. Le personnage principal est le personnage qui correspond au sujet de l’œuvre. En ce cas précis, le sujet de la reconstruction haïtienne ce sont toutes les victimes que l’on retrouve essentiellement dans les couches populaires. Les masses, les classes démunies- le secteur le plus nombreux de la population qui a payé le plus lourd tribut humain au séisme. Les gens qui, pour le meilleur, aspirent à voir le pays reconstruit durablement sur de nouvelles bases, sures et inclusives.

Cependant il y a aussi les antagonistes de la reconstruction d’Haïti. Les antagonistes, ce sont les adversaires de la reconstruction. Ceux et celles qui sont opposé-e-s à la reconstruction. Leurs intérêts lui sont contraires.

Un antagoniste (du grec ἀνταγωνιστήςantagonistes, de άντιface à et άγώνcombat : « opposant, adversaire, rival »), est un personnage, un groupe de personnages, ou une institution, qui représente l’opposition du protagoniste. En d’autres termes, « une personne, ou un groupe de gens qui s’opposent au(x) personnage(s) principal/principaux ». L’antagoniste représente une menace ou un obstacle au personnage principal. On trouve dans le livre de Daniel Holly (2011) de l’Etat en Haïti, une illustration parfaite du mode de fonctionnement des antagonistes de la reconstruction dans leur appropriation de l’appareil d’Etat[5].

Alors, pour bien comprendre le point où l’on se trouve actuellement, dix années après le 12 janvier 2010, il faut partir de deux faits 1) qu’il n’y a pas que des protagonistes dans le processus de reconstruction d’Haïti mais qu’il y a aussi des antagonistes. Premier fait : protagonistes versus antagonistes de la reconstruction. Aussi paradoxal que cela puisse paraitre, le statu quo haïtien a des partisans. Ces gens qui ne pensent qu’à eux-mêmes se positionnent en face des idées et actions qui luttent pour un changement radical et la viabilité d’un développement alternatif en Haïti. Or, comme le dit une citation prêtée à Voltaire, qui ne pense qu’à soi (à ses propres intérêts) ne pense à rien! Le deuxième fait 2) c’est que depuis 2011, nous sommes parvenus à une étape historique où ce sont les antagonistes qui occupent le devant la scène.

Par une ruse inconséquente de l’Histoire (si je peux m’exprimer ainsi), après le séisme du 12 janvier, comme si le tremblement de terre à lui seul ne suffisait pas pour mettre la population à genoux, les antagonistes de la reconstruction adoubés de leurs tuteurs internationaux sont devenus hégémoniques, ils occupent le haut du pavé et sont arrivés à imposer leur vision Haïti-cide (pour utiliser un mot du professeur Leslie Manigat). A partir de ce moment, il y a lieu de considérer la reconstruction comme un non-événement.

  1. Le triomphe du projet Haiticide des antagonistes.

Pour torpiller les processus de reconstruction réelle, les projets portés par les antagonistes dans l’après-séisme ont pour la plupart été élaborés à partir de documents de projets antérieurs, avec peu d’informations tenant compte du nouveau contexte spécifique créé par le séisme[6]. Ils ont opté pour la reproduction du même, le renforcement de l’idéologie néolibérale qu’ils ont imposée avec les résultats néfastes de la globalisation et de la privatisation. Et depuis, Haïti languit sous le contrôle d’une classe politique pourrie, servile devant l’international et une élite économique largement corrompue, sans aucune préoccupation pour le bien-être et le progrès humain. Les dirigeants en totale symbiose avec l’internationale, sans vision propre sont volontairement soumis aux intérêts stratégiques des américains. Avec le support de la communauté internationale, le gouvernement américain en tête, ils se sont accaparés des structures de l’Etat ainsi que de la société civile. On se retrouve au final avec un gouvernement absent, incompétent, déprédateur qui continue de ruiner l’économie du pays et cause des émeutes de la faim. Résultat : dix ans après le séisme, on prévoit pour 2020 que 4,6 millions d’Haïtiens/Haïtiennes seront en situation d’insécurité alimentaire. La part du budget allouée à la santé est passée de 16,6 % en 2004 à 4,4 % en 2017. Est-ce là les plans de l’ONU et des pays dits amis d’Haïti ? Comme le dit un adage, quand on a ce genre d’amis, point n’est besoin d’avoir d’ennemi.

  1. 10 ans après où en est-on ?

Alors qu’environ 15 milliards de dollars semble avoir été engrangé dans l’aide internationale post-séisme, du point de vue de la population, nous sommes au degré zéro de la reconstruction. Des fonds effectivement décaissés – au nom d’Haïti et non pour Haïti[7] – l’État en Haïti n’administrera que 4 % du total. La presque totalité de l’aide financière internationale a été versée aux ONG et aux organisations internationales au détriment de l’État en Haïti. Comme me le faisait remarquer un collègue journaliste, nous sommes aujourd’hui le 13 janvier 2010. C’est comme si le tremblement de terre s’était produit hier. Ce ne sont pas les dix (10) bâtiments publics sortis de terre dans le cadre de la cité administrative ni les quelques logements abandonnés du Morne à Cabris qui vont contredire un tel énoncé. Il suffit de faire un coup d’œil même furtif sur le niveau de dégradation de l’environnement haïtien aujourd’hui pour avoir un miroir du processus de reconstruction. On peut également considérer l’aspect « chaotique » et désespérant de la situation haïtienne actuelle. L’espace haïtien n’a jamais été organisé dans le sens du bien commun, dans le sens des intérêts de la majorité, du plus grand nombre. 10 ans après, le pays n’est pas meilleur. Le processus de reconstruction n’a pas contribué à construire de meilleurs horizons pour tout le monde.

Un autre indicateur que le projet des antagonistes de la reconstruction d’Haïti a triomphé – et que du point de vue de la population, nous sommes toujours au degré zéro – c’est la vague migratoire de jeunes haïtiens et haïtiennes qui a déferlé sur l’Amérique du Sud, notamment le Brésil, le Chili, l’Argentine et l’Équateur, entre 2012 et 2017. Plusieurs centaines de milliers selon les observateurs. Ces jeunes ont émigré avec l’espoir de trouver accès à l’éducation et de reconstruire leur projet de vie. Cette vague migratoire témoigne du désespoir et de l’impression de fin du monde. Le pays est appréhendé par ces jeunes comme invivable et les perspectives comme hors d’atteinte. Inutile de dire qu’un pays en phase de reconstruction, offrant des perspectives pour toutes et tous, ne laisserait nullement pareille impression. 

J’ai vu récemment un article sur le bilan des 10 années qui mentionnait que le Canada avait aussi été impliqué dans le relogement des réfugiés des camps et qu’il a fallu presque cinq ans pour reloger 90 % des habitants de ces camps. Faut-il souligner que moins de 20 % des solutions de relogement proposées peuvent être considérées comme durables. Alors qu’il aurait fallu environ 10,000 dollars pour construire des logements définitifs, des abris provisoires conçus pour durer de trois à cinq ans ont coûtés unitairement 4 226 dollars. Aujourd’hui nombre d’entre eux, en piteux état, sont venus augmenter le lot des habitats précaires, quand ils ne sont pas tout simplement détruits. Globalement, rien n’a été fait pour rendre les bâtiments plus résistants et protéger la population contre d’autres éventuels séismes. A contrario ! C’est à  juste titre que Newdeskarl Saint Fleur écrivait, il y a de cela quelques jours, que nos maisons sont devenues « des armes de destruction massive [8]», véritable épée de Damoclès suspendue sur nos têtes.

S’agissant toujours de la problématique du logement, le point le plus emblématique du bilan de ces 10 années depuis le séisme reste le bidonville de Canaan. Comme conséquence d’une décision de la communauté internationale supportée par l’Etat en Haïti, aujourd’hui plus de 250.000 personnes vivent sur une superficie de 50 km2 dans des conditions exécrables au sein de maisonnettes construites n’importe comment et dépourvues de tous services sociaux de base. Vous avez dit reconstruction (Build Back Better) ? Avant avril 2010, ce vaste bidonville à la sortie nord de la région métropolitaine de Port-au-Prince n’existait pas.    

Dix ans après le séisme, la fracture urbaine a augmenté. Le droit à la ville est contesté au plus grand nombre. La majeure partie des espaces populaires de vie fait partie des territoires de la relégation. Les habitants sont assignés, confinés, dans des configurations socio spatiales spécifiques. Ce n’est pas vrai de dire que l’actuel gouvernement – ou l’Etat – a perdu le contrôle d’une partie du territoire et que ces espaces sont devenus des zones de droit. Il parait plus adéquat de dire que l’actuelle équipe mise au pouvoir par l’International pour défendre ses intérêts – le parti haïtien Tèt Kale – a cédé la gestion de ces portions de territoires à des groupes de bandits armés évoluant sous la férule d’agents du gouvernement. Et la population dans tout cela ?

  1. Realpolitik de destruction versus projet politique de la reconstruction

Quelle reconstruction ? La quête de sens !!!

La reconstruction post-séisme a constitué et constitue encore un immense défi économique, social mais également moral. Dans l’immédiat après séisme, au mois de mars 2010, dans une « Position des mouvements sociaux haïtiens sur le processus de reconstruction d’Haïti» plus de cinquante associations paysannes et urbaines avaient opté pour un « processus alternatif » recommandant un certain nombre de ruptures dans la reconstruction: rupture avec l’exclusion, rupture avec la dépendance économique, rupture avec la centralisation excessive du pouvoir et des services publics, rupture avec les rapports actuels de la propriété de la terre. Cette position incluait des recommandations sur l’éducation publique, la valorisation de la langue créole, la protection de l’environnement, la santé, une justice égalitaire, la gouvernance de l’Etat, les relations internationales et la mobilisation des masses pour la défense de leurs intérêts. En clair, on trouve là les balises d’une philosophie sociale alternative de la reconstruction telle que conçue par les protagonistes. Dans le domaine économique pratique, la reconstruction devait permettre d’améliorer les conditions de vie des masses urbaines et rurales. Elle devait permettre également d’achever l’idéal d’un relèvement pour le bien commun, une reconstruction au service du bien-être pour toutes et tous. La reconstruction comme réponse à la nécessité de construction d’une bonne société. Malheureusement, ce n’est pas cette voie qui a été priorisée et nous sommes là où nous sommes aujourd’hui et le pays avec nous. Que faire maintenant pour changer de cap? C’est la question que je soumets à la réflexion de tous et toutes.

Repères bibliographiques

BUTEAU, Emmanuel, « Des décisions qui ont fait régresser la société haïtienne », Rencontre, 2003, pp. 40-47.

COLLIER, Paul, « Des catastrophes naturelles à la sécurité économique », rapport préparé à l’intention du Secrétaire Général des Nations Unies, janvier 2009.

GILBERT, Myrtha, La catastrophe n’était pas naturelle, L’Imprimeur II, 2010.

HOLLY, Daniel A., De l’Etat en Haïti, L’harmattan, 2011

KLEIN, Naomi, La Stratégie du choc : la montée d’un capitalisme du désastre (titre original : The Shock Doctrine: The Rise of Disaster Capitalism), Acte Sud, 2013.

LUCIEN, Georges E., LE NORD-EST D’HAÏTI, La perle d’un monde fini : entre illusions et réalités (Open for Business), L’harmattan, 2018.

MAGUIRE, Robert, FRIEMAN, Scott, Who owns Haiti? People, power and sovereignty, University Press of Florida, 2017

PETRELLA, Ricardo, Le bien commun : Eloge de la solidarité, Labor, 2016.

SCHULLER, Mark, Humanitarian Aftershocks in Haïti (Répliques Humanitaires en Haïti),  2016.


[1] Ce texte a servi de base pour une intervention dans le cadre d’un panel du Regroupement des Haïtiens de Montréal contre l’Occupation d’Haïti (REHMONCO) à la Tohu le 11 janvier 2020. 

[2] Chercheur multidisciplinaire avec un focus dans les domaines de l’éducation populaire, la philosophie et la sociologie politique, l’aménagement du territoire et les études urbaines, il est affilié depuis 2012 au Centre de recherche et d’appui aux politique urbaines (CRAPU – UniQ-UQAM). Il anime le blog Epochê… mouvances théoriques et politiques contemporaines (https://penseretagiracontresens.wordpress.com/). Membre depuis 2013 du réseau transdisciplinaire Human Dignity and Humiliation Studies (Human DHS), il est également membre du réseau État de droit saisi par la philosophie de l’Université Paris VIII ainsi que du comité directeur du Centre Culturel Selide. L’intervenant qui a enseigné la philosophie au secondaire de 1999 à 2007 et à l’Université d’Etat d’Haïti de 2004 à 2011 est, depuis 2014, responsable de la rubrique «Aménagement du territoire, urbanisme et développement durable» / au Journal Haïti-Monde. Membre de divers collectifs citoyens dont Assumer Ayiti, il est depuis 2016 l’un des principaux animateurs du Forum Politique des Socioprofessionnels Progressistes Haïtiens (FPSPH/FPSPA en créole). Depuis juin 2019, il œuvre en tant que chargé de recherche au Centre EQUI, structure indépendante de recherche-action ainsi que d’intervention sociale et alternative, dont il est co-fondateur.

[3] Le contexte ne s’y prête peut être pas mais je veux avoir également une pensée spéciale pour nos morts plus récents, ceux et celles que les divers massacres opérés par l’actuel bloc au pouvoir ont emporté inutilement à la mort.

[4] Depuis la validation de la thèse de l’Anthropocène – défini à partir du XIXème siècle par le géologue italien Antonio Stoppani (1824-1891) comme une nouvelle époque géologique marquée par le poids des activités humaines sur les phénomènes géophysiques – il est reconnu que les catastrophes « naturelles » sont de moins en moins naturelles et de plus en plus construites socialement (cf. Virginia García-Acosta, « Leçons apprises à partir des perspectives anthropologiques et historiques », in Penser l’Anthropocène (2018), pages 325 à 338).

[5] Pour certains, les antagonistes ne sont pas nécessairement des adversaires de la reconstruction, ils s’opposent juste à une reconstruction qui n’est pas conforme à leur vision ou projet. Pour ma part, il me semble tout à fait correct de dire qu’ils sont des adversaires de la reconstruction dans la mesure où qui ne pense qu’à soi (à ses propres intérêts) ne pense à rien. Pour leurs intérêts spécifiques, les antagonistes sont engagés dans une lutte contre le droit des peuples à une vie digne.  

[6] Avant et après le séisme, les grandes lignes du projet restent les mêmes : connecter Haïti @ l’économie-monde selon la vision impériale néolibérale (Haïti is open for business – Diplomatie d’affaires) d’un pays pourvoyeur de main d’œuvre à bon marché. Pour ce faire, Bill Clinton, investi de ses pouvoirs de co-président plénipotentiaire de la CIRH, va réactualiser le rapport Paul Collier (2009). On lira sur ce point l’excellent livre de Georges Eddy Lucien, « Le Nord-Est d’Haïti » : La perle d’un monde fini : entre illusions et réalités (Open for Business), l’Harmattan, 2018 notamment le chapitre consacré à l’initiative étrangère du parc de Caracol. (Dans un territoire très fertile où l’économie locale reposait sur la culture des arbres fruitiers du manguier, du chêne, du citron vert, de l’avocatier, du maïs, du pois-congo et du manioc, le 22 octobre 2012, Hillary Clinton, en tant que Ministre des Affaires Étrangères (Secretary of State) américain, a inauguré de concert avec Bill Clinton le Parc Industriel de Caracol).

[7] La formule est de Ricardo Seitenfus

[8] Newdeskarl Saint Fleur, Nos maisons sont des «armes de destruction massive», publié le 2020-01-07 | Le Nouvelliste.