PAPDA et FONDAMA, 26 février 2019
Notre pays vit une profonde crise avec des dimensions systémiques et conjoncturelles. Cette situation qui semble s’aggraver tous les jours a de dramatiques conséquences sur les conditions de vie de la population. Depuis juillet 2018, l’Exécutif ne gouverne pas et tous les indicateurs sont au rouge. En fait l’effondrement des institutions étatiques a commencé depuis de longues années connaissant cependant une brusque accélération depuis 2010. Depuis 2 mois l’’Etat a des difficultés pour rémunérer ses employés. L’approvisionnement du marché national en produits stratégiques ne se fait plus avec régularité. Depuis décembre 2018 la rareté des produits pétroliers génère une situation chaotique avec ces derniers jours un blocage presque complet de la vie économique. Dans la capitale des quartiers entiers sont privés d’électricité durant de longues périodes. Le déficit fiscal continue à se creuser avec l’explosion du crédit fournit par la Banque centrale au fonctionnement de l’appareil de l’État surendetté. Entre octobre 2017 et décembre 2018 la quantité de citoyens et citoyennes en phase critique de malnutrition est passée de 1.7 millions à 2.3 millions et on prévoit que ce chiffre peut atteindre 2.8 millions entre mars et mai 2019. Les réserves internationales nettes sont au plus bas niveau depuis plusieurs décennies.
L’orientation néolibérale des politiques publiques se maintient et se renforce à travers un nouvel accord de prêt avec le FMI [1] assorti des conditions classiques de privatisation conduisant à une aggravation des conditions de vie des couches les plus pauvres, une augmentation des subventions aux grands importateurs de riz. La privatisation complète de l’importation des produits pétroliers fait probablement partie du paquet de conditionnalités signées avec le FMI. Des incidents tragiques au niveau de la frontière qui ont causé la mort de plusieurs agents douaniers dans l’exercice de leurs fonctions ne semblent pas avoir été suivis de mesures adéquates de redressement et d’affirmation de mécanismes de contrôle des frontières alors que cette mission est attribuée à un noyau d’une soi-disant nouvelle armée totalement transparente. L’absence d’investissements publics et privés dirigés vers les secteurs productifs persiste.
La grande majorité des citoyens et citoyennes connait une brutale et rapide paupérisation suite à la détérioration accélérée de la gourde face au dollar étatsunien au cours des 3 dernières années, une inflation importante et continue durant les 38 derniers mois, une maladroite tentative de dé dollarisation très mal gérée en mars 2018, des instruments budgétaires recherchant une brutale augmentation de la pression fiscale de 12 à 18% dans un contexte de précarité généralisée [2]. Un budget qui fait reposer l’assiette fiscale de façon prédominante sur les couches les plus appauvries. Un système gangrené par la corruption et l’impunité avec une volonté affichée des pouvoirs publics de maintenir les privilèges exorbitants des membres de l’exécutif, du pouvoir législatif et le gaspillage des fonds du Trésor Public.
Dans ce contexte de grande fragilité dominé par une tendance croissante à l’accaparement des terres occupées par la paysannerie pour les transférer vers les entreprises transnationales et haïtiennes les contestations populaires réclamant notamment la démission du Président de la République, la mise en place du procès petroCaribe et des mesures rapides et énergiques pour une récupération du pouvoir d’achat de la population se multiplient. Ces protestations ont culminé avec d’impressionnantes manifestations populaires massives les 17 octobre, 18 novembre 2018 et 7 février 2019 aboutissant à une rupture totale entre les 3 Pouvoirs et le pays avec une hallucinante période de 10 jours de cessation quasi complète de toute activité économique sur le territoire national. Une indignation généralisée secoue de larges couches de la population face aux décisions prises au sommet de l’Exécutif et face à des événements inacceptables comme le vote contre le gouvernement de Nicolas Maduro, les scandales financiers à répétition et l’issue donnée à la présence des 7 mercenaires venus des États-Unis.