L’Europe en crise : comment dépasser les choix binaires

Catherine Samary, ATTAC, 21 mai 2019

 

La proximité des prochaines élections européennes a catalysé la production de plusieurs ouvrages collectifs partageant une optique anticapitaliste et internationaliste, ainsi qu’une caractérisation radicalement critique de l’UE : c’est vrai du livre d’Attac-Copernic [1] comme de celui du Collectif « Chapitre 2 » [2] qui ont l’objet à Paris d’une présentation croisée le 13 mai [3]. C’est également l’optique du recueil Europe alternatives démocratiques, Analyses et propositions de gauche [4] que je voudrais commenter ici. Tous défendent l’idée – appuyée sur l’expérience de Syriza notamment – qu’une politique progressiste implique une confrontation et une rupture nécessaires avec les traités et politiques dominants.

Cette base commune – qu’on omet souvent de commencer par souligner – n’implique pas, dans l’état actuel, des élaborations et échanges au sein de ces divers collectifs et entre eux, une analyse consensuelle de l’histoire, des crises et contradictions de cette « construction européenne » et du capitalisme mondialisé post-1989 où elle s’inscrit. Il s’agit d’élaborations partielles, mais associées à des expériences de résistance et soulevant des interrogations légitimes : elles sont salutaires, exprimant à la fois l’urgente nécessité de sortir d’un anticapitalisme abstrait et la volonté de surmonter une réelle crise « stratégique » du mouvement altermondialiste – manifeste dans l’échec de Syriza, comme face au Brexit et à la veille des prochaines élections européennes.

Telles sont, dans l’urgence, les tâches auxquelles contribue l’ouvrage Europe, alternatives démocratiques. Analyses et propositions de gauche, coordonné par Benjamin Bürbaumer, Alexis Cukier et Marlène Rosato, qui s’inscrit dans la mouvance du Manifeste pour un nouvel internationalisme des peuples d’Europe [5]. L’ensemble des contributions qu’il rassemble se répartit en trois grandes parties : la première intitulée « la crise de l’Union européenne » introduit en fait les grands défis stratégiques auxquels se confronte la gauche de transformation sociale [6]. La deuxième (« Union économique et monétaire ») porte principalement sur les inégalités structurelles entre pays du « centre » et diverses périphéries de cet ensemble [7]. La troisième partie, intitulée « Dette, euro, emploi », présente des exemples significatifs de luttes nationales (France, Espagne, Grèce) autour de ces enjeux majeurs [8]. La postface « Que faire en Europe ? Propositions de gauche » est issue d’un colloque organisé en 2017 par le réseau EReNSEP de France.

Coordonnant l’ouvrage, les trois co-auteur.es qui l’introduisent soulignent sa ligne générale ouverte à diverses hypothèses de scénarios : “La rupture avec l’Union européenne (et en premier lieu avec ce qui en constitue le cœur, l’Union économique et monétaire) est […] un moment inévitable d’une politique de gauche visant la satisfaction des droits fondamentaux des individus, mais elle doit être étroitement associée à la construction d’une fédération solidaire entre les États européens, au service des intérêts populaires”. Cette deuxième partie de phrase (sur le projet européen) n’est pas reproduite sur la quatrième de couverture, qui retient ce qui fait le plus consensus (la rupture avec l’UE) dans la diversité des situations et sensibilités exprimées dans l’ouvrage. En tout état de cause, l’introduction du recueil n’élude pas la difficulté de concrétisation du projet européen alternatif prôné : “il serait illusoire, bien entendu, de penser qu’une telle fédération populaire et solidaire pourra être mise en place du jour au lendemain” (p. 26). Les trois auteur.es invitent alors à réfléchir aux scénarios (des « étapes » ?) pouvant y mener et présentent le « parcours de l’ouvrage ».

Plutôt que de le suivre pas à pas dans la richesse de chacune de ses contributions et des trois parties évoquées plus haut – ce qui dépasserait les limites de cette recension – j’essaierai de rendre compte de façon thématique de ses apports, donc des questionnements qu’ils peuvent stimuler, sur les plans analytiques et stratégiques, tels qu’ils sont articulés différemment selon les argumentaires proposés.

1. Développement inégal, rapports centre(s)/périphéries et rapports sociaux de l’UE

Le texte de Joachim Becker (introduisant la deuxième partie centrée sur les inégalités structurelles de l’UEM, p. 93) critique les illusions d’une partie de la gauche sur la possibilité de « transformer fondamentalement l’Union européenne depuis l’intérieur ». Il associe cette approche à ce qu’il caractérise comme un « keynésianisme de gauche européisé ». Et il estime que les défenseurs d’une telle approche se fondent sur une « stratégie de “création de l’unité des classes subalternes en Europe à travers des luttes communes” », dit-il en citant un article d’une revue marxiste allemande (note 1, p.93). Selon Becker, « les représentants d’une telle position surestiment les possibilités d’une mobilisation commune dans la mesure où ils sous-estiment l’ampleur du développement inégal au sein de l’Union européenne. » Leur erreur serait renforcée par le fait que ces courants « abordent de façon insuffisante la signification centrale du régime monétaire » de l’Union « pour la cristallisation des rapports sociaux et d’un modèle de développement inégal ». Autrement dit, souligne Becker, les « régimes d’accumulation dans l’Union européenne ces vingt à trente dernières années ne peuvent pas être uniquement caractérisés comme étant dirigés par la finance ».

Les effets inégalitaires spécifiques d’une monnaie unique imposée à un ensemble d’États aux niveaux de développement et aux structures hétérogènes, relié par la concurrence de marché, sont évidemment rappelés dans plusieurs textes – et sont largement reconnus. Mais ils se combinent également à des relations « centres – périphéries » spécifiques. Celles-ci sont souvent évoquées en omettant d’intégrer à l’analyse les différences entre périphéries (internes à l’UE) de l’Est et du Sud – ce qui est évidemment extrêmement important. Au contraire – et c’est un atout de ce livre –, les trois articles de cette partie les évoquent. On est encore loin d’une vision qui intègre pleinement et de façon cohérente entre les divers articles, les contextes, phases et discontinuités de la construction européenne de la CEE à l’UE, avant et après le basculement international (et continental) de 1989 [9]. Néanmoins, loin des approches simplificatrices d’une union simplement dominée par le capital financier, l’ouvrage s’efforce de stimuler une analyse historique concrète. Ce qui impose celle de l’unification allemande et de ses effets sur le projet d’UE. Cet élément est très présent, à juste titre, dans le texte de Becker ou de Lapavitsas dans cette partie, ce qui contribue à des débats nécessaires.

Quelle analyse émerge donc de cette construction très inégalitaire ? D’une part, Costas Lapavitsas et Joachim Becker évoquent à juste titre les attaques frontales subies par les travailleurs allemands – et qui se sont traduites par des baisses des protections sociales et des salaires allemands supérieures à celles subies ailleurs dans l’UE. Ils analysent bien en quoi cela relevait d’une stratégie de production et d’exportation exploitant aussi les rapports de dépendance des nouveaux voisins de l’Est et l’euro. Mais, d’une part, comme on l’a vu plus haut en citant Becker, cela n’est pas utilisé comme un argument pour une stratégie basée sur la création d’alliances des classes subalternes au sein de l’UE. Il n’est pas non plus souligné que ces choix spécifiques de politique allemande (et les excédents commerciaux allemands face aux déficits des autres pays), sources d’instabilité majeure dans l’UE, bousculent nécessairement l’Allemagne elle-même. De plus, pour Costas Lapavitsas (p.117-118), l’Union économique et monétaire fonctionne en pratique comme un « mécanisme de domination économique au service du capitalisme industriel allemand basé sur la compression des salaires des travailleurs allemands » (…) « qui a elle-même permis l’hégémonie économique » de l’Allemagne « sur le reste de l’Europe ». Et il précise qu’à ses yeux, un basculement s’est opéré après la crise (p. 119) : « l’Allemagne est parvenue à prendre complètement le contrôle de la crise et de ses réponses en Europe, en subordonnant les forces du centre de l’Union européenne à sa volonté et en consolidant sa position de domination sur la périphérie ».

Or, d’une part, dans la crise grecque (comme le rappelle Becker p. 112), le ministre des finances allemand Wolfgang Schaüble était favorable à une sortie de la Grèce de la zone euro – Hollande présentant d’ailleurs à l’époque le renoncement à ce scénario comme un succès, en accord avec l’orientation de Varoufakis (et aux aspirations populaires en Grèce hostiles à une sortie de l’euro). D’autre part, sous l’angle monétaire, la politique absolument « non conventionnelle » de la BCE a été en conflit ouvert avec les responsables de la Bundesbank : les décisions de la BCE « se sont constamment heurtées aux positions de la Bundesbank. Dès septembre 2011, Jürgen Stark, membre allemand du directoire de la BCE et son économiste en chef, préfère démissionner plutôt que d’assumer ces décisions. De même, Jens Weidmann, gouverneur de la Bundesbank, s’est constamment opposé à des choix contraires à l’orthodoxie monétaire qu’il défend » [10].

Finalement, qu’est ce que le « centre » de cette Union ? Est-il donc concentré en Allemagne, qui serait parvenue à subordonner à ses choix les autres puissances du centre historique des pays fondateurs de la CEE ? L’Italie est-elle au centre ou dans les PIGS [11] ? Et où situer la France ? Au plan politique, à la lumière des processus de décision et d’alliance dans les moments clés, la notion d’axe franco-allemand est la plus pertinente, non sans conflits et contradictions concrètes et sans capacité à imposer une stabilité des relations de l’UE. Mais, au plan socio-économique, dans bien des graphiques, la France occupe une position médiane entre périphérie du Sud et Allemagne/Pays-Bas/Belgique. Globalement la conceptualisation « centre-périphérie » comporte bien des flous et insuffisances, même si elle recouvre une partie tout à fait réelle de pouvoirs croissants d’organes non élus de l’UE et de l’eurogroupe informel. Mais l’offensive capitaliste des années 1980, radicalisée après 1989, et son scénario spécifique en Europe, doit être analysé dans sa nouveauté historique ; il s’est d’abord agi dans les pays capitalistes dominants, aux États-Unis et dans la CEE devenue UE, de chercher à détruire les gains sociaux de leurs propres classes subalternes, issus de la phase antérieure et de ses conflits entre systèmes : ce qui a commencé, avec la destruction du New Deal aux États-Unis et le « TINA » (There is no alternative) antisocial et antidémocratique de Margaret Thatcher, s’est radicalisé et étendu à l’Allemagne après l’unification et à la faveur de la détérioration majeure des rapports de force entre classes, associée à la restauration capitaliste à l’Est (et en Chine). Comme le rappelle Éric Toussaint dans son texte, la dureté des attaques contre la population grecque par l’eurogroupe exprimait la peur d’une contagion (donc la fragilité et la non-légitimité des politiques dominantes) et la volonté de les consolider et de les étendre, comme on le voit en France. Or, les notions de « centre/périphérie » n’expriment pas bien cette réalité-là.

Autrement dit, il existe une « périphérie » sociale et politique dans les pays du « centre » historique, et des forces adhérant aux buts sociaux des classes dominantes du « centre » dans les différentes périphéries de l’Union : ce sont des réalités de classe concrètes. Elles sont intrinsèquement combinées à des « questions nationales » au sens large, que toute orientation internationaliste et pour un autre projet européen doit prendre à bras le corps, en les combinant aux enjeux sociaux. Ne faut-il pas chercher là le « maillon faible » stratégique de cette Union ? Ne doit-il pas être construit dans l’’alliance entre des forces sociales et politiques altermondialistes de quelques pays membres – mais situés à la fois au « centre » et dans les deux périphéries de cette union (imaginons : France, État espagnol, Portugal, Allemagne et Slovénie) ? Ne faut-il pas prolonger les « dix propositions » exprimées par Éric Toussaint, et les exemples fournis dans la troisième partie de l’ouvrage par des projets de liens entre des villes rebelles du maximum de pays – ouvertes aux migrants et mettant en pratique des politiques alternatives ? Ou par des campagnes pour un fonds public d’investissement européen afin de créer des emplois répondant aux exigences de la transition écologiques, sur la base de droits sociaux et de contrôles démocratiques ? Ou encore un « audit » européen public sur la fragilité menaçante du système bancaire européen et sur les crédits toxiques qui infestent à la fois les collectivités publiques et les ménages ? Enfin, pourquoi être si peu convaincu qu’une percée progressiste dans un pays comme la France, désobéissant aux politiques dominantes au nom d’objectifs sociaux, écologiques et démocratiques parlant à tous les peuples (et non pas au nom d’une volonté de « souveraineté nationale » arrogante) aurait un pouvoir de délégitimation et de paralysie de cette Union au profit d’un processus constituant démocratique  [12] ?

2. Quel internationalisme des 99 % ?

On sait, contrairement aux visions réductrices du marxisme, que les prolétaires ne sont pas seulement des hommes, blancs, athées, hétérosexuels et sans « conscience nationale », et Benjamin Bürnbaumer a évidemment raison de rappeler dans sa contribution que celle-ci n’implique pas forcément un « nationalisme » au sens chauvin. Le capitalisme du XXIe siècle confirme aussi que les classes subalternes peuvent être avec ou sans emploi salarié, petits producteurs de biens ou services des villes, parfois dotés d’un statut de « travailleurs indépendants », ou petits paysans (aujourd’hui organisés dans Via Campesina à l’échelle internationale). Quel internationalisme correspond à ces populations subalternes et ces 99 % contre l’internationalisme du capital et des 1 % ?

Becker rappelle qu’une partie de la gauche européenne légitime une stratégie de lutte au sein de l’UE comme « internationaliste ». Comme d’autres dans ce livre et au-delà, il dénonce l’UE comme concrétisation d’un internationalisme du capital et comme une structure dotée d’une « sélectivité stratégique » (p. 116), c’est-dire conçue pour défendre des intérêts de classe. Mais toutes les institutions du capitalisme incorporent une telle « sélectivité », et tendent à l’accentuer dans le contexte des politiques « ordolibérales ». L’État-nation français – et ses représentations – n’est pas plus ouvert aux classes subalternes et aux luttes progressistes qu’il criminalise de plus en plus. Pourquoi donc des luttes sociales et politiques ne pourraient-elles pas être menées dans/contre et hors de l’UE [13] ? Des mobilisations importantes ont su bloquer l’ancien TAFTA et se déploient aujourd’hui au plan européen contre les multinationales et leurs attaques des droits des peuples et de l’environnement. L’idée qu’on peut résister aux diktats et désobéir ne fait que s’élargir. Pourquoi un internationalisme prolétarien (au sens large) ne pourrait-il être défendu qu’en sortant préalablement de l’UEM – ou de l’UE quand la majeure partie des investissements et des échanges se réalisent entre pays de l’UE et quand les populations de cette « Union » sont soumises aux mêmes institutions et traités ? S’il n’existe pas de « bourgeoisie européenne » unifiée – ni de capacité du capital à stabiliser la construction capitaliste européenne – il n’en demeure pas moins une « construction » institutionnelle ordolibérale bourgeoise, que même le Brexit est loin d’avoir détruit, mais dont il faut bloquer et délégitimer le pouvoir de nuisance – contrastant avec la perception populaire (notamment dans la jeunesse) que c’est à cette échelle qu’une autre logique économique, sociale, écologique serait crédible et solidaire avec les peuples du reste du monde.

Quelle stratégie faut-il donc opposer à l’internationalisme du capital et à ses rapports d’oppression et de domination ? Je voudrais insister en conclusion sur les réponses qu’apporte dans cet ouvrage Josep-Maria Antentas sur ce plan. Il s’interroge sur « l’internationalisme des 99 % » (p. 51) dans le contexte du passé et présent de la mondialisation capitaliste. Ce qui impose l’exigence première de « dépasser tout eurocentrisme » et « d’assumer la définitive déprovincialisation de l’Europe dans le contexte mondial » (p. 54). Il souligne combien la « mondialisation provoque une nouvelle hiérarchisation des États » et une « contradiction flagrante entre démocratie et capitalisme ». D’où la centralité de la « pulsion de “démocratie réelle maintenant” » qu’il faut tirer jusqu’au bout » (p. 56). Cependant, ajoute-t-il, « la stratégie de rupture avec l’Union européenne du capital ne peut rester bloquée dans une rhétorique de récupération de la souveraineté nationale ». Elle doit plutôt « s’inscrire dans un programme de transition vers un autre modèle et une perspective d’internationalisation de la lutte des classes ». Il est nécessaire, ce faisant, « de faire des déplacements internes dans le concept de souveraineté » (souligné dans le texte). Celui-ci « ne peut être défini en termes exclusivement nationaux, sans lier la souveraineté nationale à la souveraineté populaire » (englobant « toutes les dimensions de la vie sociale et étant étroitement lié à la lutte contre toutes les formes d’oppression et d’exploitation ». Il souligne au passage combien « le mouvement paysan et son concept de souveraineté alimentaire » sont « des exemples d’expansion stratégique du concept de souveraineté ». De plus, dit-il, il faut « articuler la souveraineté politique formelle avec la souveraineté réelle par rapport au capital financier » (p. 57) – à quelle échelle ?

Josep Marie Antentas, s’oppose à toute marche par étapes, ainsi qu’à toute hiérarchie figée ente le local, le national-étatique, le continental, le global dans la lutte et la pensée stratégique anticapitalistes, empruntant à Daniel Bensaïd la formule et la dialectique d’une « échelle mobile des espaces ». Explicitant les tensions traversant la gauche face aux enjeux européens, il souligne : « le problème de fond » au plan stratégique, est que d’une part, « les courants de la gauche qui ont le plus insisté sur la rupture avec l’Union européenne et l’euro sont ceux qui ont tendance à favoriser le champ de la lutte nationale-étatique » ; et, d’autre part, « les courants qui ont le plus souligné la nécessité d’une action internationale coordonnée ont tendance à formuler une critique vague de la logique de l’UE ». Dès lors, « l’Alter-européisme risque de fusionner avec des positions de réforme de l’UE et les propositions pour la rupture de l’UE avec des positions de retrait national ». Face à ce « double risque », il est essentiel d’élaborer « une stratégie de rupture internationaliste avec l’Union européenne défendant la nécessité de projets de coopération entre États et, en ce qui concerne les mouvements, d’essayer de construire un espace européen de luttes, un peuple européen de luttes fermement opposé à l’Union européenne et à ses politiques. Tout projet de destruction de l’UE ne devrait pas être un retrait stratégique du champ de bataille de l’État national, mais devrait renforcer l’action internationale. Détruire l’Union européenne du capital requiert une internationalisation plus grande et meilleure des luttes ».

Espérons que la gauche de transformation sociale (politique, syndicale, associative) s’attellera à la construction d’un tel « espace » socio-politique où des tactiques adaptées à des situations hétérogènes et à la désynchronisation des luttes seraient désenclavées, « pensées » et articulées en permanence à un projet commun, et où un « site des sites » comme celui de l’altersummit ou un Observatoire des luttes (comme le projette Attac) rendrait visibles toutes les campagnes autonomes. C’est un apport de ce livre – et du réseau dont il émane – que de stimuler de telles réflexions.

Notes

[1] Attac-Fondation Copernic, Cette Europe malade du néo-libéralisme. L’urgence de désobéir. Les Liens qui Libèrent, 2019, coordonné par Pierre Khalfa, Dominique Plihon, Jacques Rigaudiat et Aurélie Trouvé.

[2] Aurélien Bernier, Morvan Burel, Clément Caudron, Christophe Ventura, Frédéric Viale, La Gauche à l’épreuve de l’Union européenne, Éditions du croquant, 2019.

[3] Pierre Khalfa et Aurélie Trouvé pour le premier, Morvan Burel et Christophe Ventura pour le second ont présenté ces ouvrages après une introduction du journaliste spécialiste des gauches européennes Fabien Escalona, le 13 mai à 19h au CICP, 21ter rue Voltaire, Paris 11e.

[4] Coordonné par Benjamin Bürbaumer, Alexis Cukier et Marlène Sosato, membres du réseau EReNSEP (European Research Network on Social and Economic Policy), La Dispute, 2019.

[5] Il émane d’un processus de discussion « Recommons Europe » impulsé par l’EReNSEP, le CADTM et le syndicat basque ELA, dans lequel je me suis inscrite et auquel ont contribué plusieurs des auteur.es du premier recueil recensé ici (« Europe alternatives »). On peut le lire, ainsi que la liste de ses signataires de plusieurs pays européens.

[6] Avec des contributions d’Éric Toussaint (porte-parole international du CADTM et coordinateur scientifique de l’audit sur la dette grecque), Josep-Maria Antentas (militant et chercheur de la gauche radicale à Bercelone) et Benjamin Bürbaumer (un des co-éditeurs EReNSEP de l’ouvrage).

[7] Elles sont analysées par les chercheur.es Joachim Becker (Autriche), Costas Lapavitsas (R-U), Ana Podvršić (Slovénie).

[8] Avec sur « la dette publique en France » l’expérience et les propositions de Patrick Saurin (syndicaliste à Sud Solidaires et membre du CADTM) ; sur l ’emploi, l’euro et la crise en Espagne, l’analyse des chercheurs Pablo Cotarelo et Sergi Cutillas, et un extrait du texte de 2015 de Heiner Flassbeck (Hambourg) et Costas Lapavitsas pour « un programme de sauvetage social et national pour la Grèce ».

[9] Les différentes phases et contextes des rapports des pays du sud à la CEE (dans le contexte d’un monde « bipolaire » avant 1989), puis à l’UE, et le basculement de la restauration capitaliste à l’est ne sont pas clairement précisés dans les deux premiers textes de cette partie – avec leur différents choix budgétaires. Le texte d’Ana Podvršić apporte au contraire de façon plus claire une présentation critique des indicateurs généralement utilisés sur la « croissance » et la « productivité » derrière la « désindustrialisation » et la nouvelle « périphérisation » associées à la restauration capitaliste en Europe centrale et orientale.

[10] « Cf. Attac-Fondation Copernic, Cette Europe malade du néo-libéralisme, p. 81. »

[11] Acronyme peu flatteur englobant les pays les plus fragiles face à la crise : Portugal, Italie, Irlande, Grèce et Espagne (Spain).

[12] Il est très intéressant que l’ouvrage La Gauche à l’épreuve de l’Union européenne, cité en note 2, envisage dans sa dernière partie de façon très crédible un tel scénario – alors qu’il déploie une critique radicale de l’UE et de ses carcans juridiques.

[13] Cf. notamment « Pas de sortie de gauche » de l’UE sans une autre ’Europe debout’- dans/contre/hors de l’UE ».

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