crédit photo Amnisty International 2020

Maĩka Desjardins, collaboration CISO

Le Liban compte plus de 200 000 femmes migrantes qui cherchent à subvenir aux besoins de leur famille. Cependant, ce système de travail les soumet à l’exploitation. Le système de la kafala exacerbe la précarité de ces femmes, en particulier depuis les attaques israéliennes.

En effet, ce type de parrainage lie les permis de séjour des travailleuses à leur employeur, qui les maintient dans une situation de dépendance. Elles sont soumises à des abus graves : leurs passeports sont confisqués, elles n’ont pas le droit de quitter le domicile de leur employeur et sont contraintes d’accepter des conditions de travail proches du travail forcé. Ce système favorise les inégalités raciales et de genre, créant un climat de discrimination et d’exploitation.

Le système judiciaire libanais échoue à protéger les travailleuses notamment par la quasi-inexistence de mécanismes de plainte. Les politiques restrictives de visas dissuadent ces femmes de dénoncer leurs employeurs abusifs : quitter leur emploi signifierait automatiquement de perdre leur statut de migrantes et sont réduites à l’illégalité, sans recours possibles.

La situation s’est aggravée depuis les attaques israéliennes au Liban en automne 2024. Plusieurs travailleuses ont été abandonnées par leur employeur, qui a quitté le pays en les laissant sans argent, sans passeport et sans billets d’avion pour retourner chez elles. Prises au piège d’un conflit qu’elles n’ont pas choisi, elles se retrouvent complètement isolées. Leur vie, leurs droits et leur dignité sont ignorés à la fois par leurs employeurs, les autorités libanaises et la communauté internationale.

L’impasse des permis de travail fermés

Le système de la kafala, bien qu’il n’apparaisse dans aucun texte juridique libanais, est devenu une réalité légale au fil des ans qui prive les travailleuses de toute couverture juridique. Ce système fait écho à la situation au Canada, où les travailleuses migrantes ayant un permis de travail fermé se retrouvent dans des conditions similaires : elles sont liées à leur employeur, ce qui renforce des rapports de pouvoir dangereux et inégaux et facilite leur exploitation. Elles sont maintenues dans des conditions de travail précaires où leurs droits sont bafoués, sans avoir la pleine liberté de défendre leurs droits.

Dans une perspective de transition juste, il est clair que les discriminations systémiques telles que celles portées par la kafala amplifient les conséquences des crises pour les groupes les plus marginalisés. Pour établir une véritable transition écologique et économique juste, le Liban devra considérer les dynamiques d’inégalités afin que les stratégies permettent d’y remédier et évitent de les intensifier.

Toutes travailleuses, qu’elles soient au Canada, au Liban ou ailleurs, doivent bénéficier de conditions de travail adéquates et de la protection de leurs droits! Elles doivent avoir accès à des horaires raisonnables et une rémunération équitable. Elles doivent avoir un environnement de travail sain, sécuritaire et sans aucune forme de violence et de discrimination. Elles doivent avoir la possibilité de s’organiser collectivement et de faire valoir leurs droits.

Il est impératif que les gouvernements prennent leurs responsabilités et réforment les lois sur le travail migrant afin d’offrir des protections réelles et accessibles à toutes ces personnes vulnérables, d’autant plus que les diverses crises à venir (climatiques, conflits, etc.) précariseront encore davantage leurs conditions de vie, menaçant d’intensifier les vagues migratoires dans un avenir proche.


Pour prendre connaissance de l’histoire de Maria, une travailleuse domestique au Liban originaire du Burkina Faso – cliquez ici.