Samir Flores, leader indigène náhuatl, a été assassiné de deux balles dans la tête le 20 février dernier dans son village natal de l’État de Morelos, au Mexique. Il était l’un des fers de lance de l’opposition à un grand projet, qui prévoit la construction d’un gazoduc et de deux centrales thermoélectriques au Sud-Est de la capitale mexicaine [1]. Le meurtre a eu lieu quelques jours à peine avant la tenue d’un référendum local très contesté autour de ce grand projet industriel (Proyecto Integral Morelos, PIM).
Selon ses promoteurs, ce projet permettra d’alimenter les populations locales en gaz et en électricité meilleur marché. Il apparaît surtout comme étant taillé pour les intérêts des multinationales européennes installées dans la région. Le gazoduc et les centrales électriques seront construits et gérés par des entreprises espagnoles (Abengoa, Elecnor et Enagas), et serrviront principalement aux unités de production de firmes comme Unilever, Continental, Nissan (dont Renault reste le premier actionnaire) et la française Saint-Gobain.
Les communautés locales craignent les conséquences en termes de pollution et de surexploitation des ressources en eau. Elles dénoncent l’expropriation de leurs terres traditionnelles et la violation des droits des peuples indigènes. Enfin, le tracé du gazoduc passera juste à côté d’un volcan…
Référendum sous tension
Les autorités mexicaines ont fait valoir que le lien entre l’assassinat de Samir Flores et l’opposition au Proyecto Integral Morelos n’était pas établi. Le procureur de l’État a même mis en avant la possible implication de gangs criminels, s’attirant une vague de réprobations. Le Front populaire en défense de la terre et de l’eau (FPDTA), coalition des opposants, a dénoncé un « crime politique ».
Le gouvernement a refusé d’annuler la tenue du référendum sur le PIM qui s’est déroulé les 23 et 24 février. Sur fond d’incidents, de présence policière massive et d’accusations de manipulation des résultats, celui-ci a donné la victoire au Oui. Mais la contestation continue. Manifestations et blocages d’autoroutes ont été organisés le 3 mars pour demander justice pour la mort de Samir Flores et protester contre la centrale thermoélectrique.
Il y a quelques mois, un référendum similaire sur un autre grand projet, celui du nouvel aéroport de Mexico, s’était soldé par une victoire du « Non », forçant l’abandon du chantier où les travaux avaient déjà été engagés.
Au Brésil, deux défenseurs de l’environnement récemment assassinés
Le Mexique est l’un des cinq pays les plus meurtriers pour les défenseurs de l’environnement et des droits des communautés, selon le décompte effectué chaque année par l’ONG Global Witness : quinze défenseurs de l’environnement y ont été assassinés en 2017. Ce macabre record est détenu par le Brésil, avec 57 défenseurs de l’environnement assassinés en 2017, la plupart engagés pour la protection de l’Amazonie. Fin février encore, un leader indigène d’Amazonie a été tué par balle chez lui devant sa famille dans la ville brésilienne de Manaus [2].
Le 29 janvier, c’est une femme de 59 ans, Rosane Santiago Silveira, qui est retrouvée assassinée, son corps présentant des signes de tortures, dans sa maison dans l’État brésilien de Bahia. Elle était engagée pour la protection de l’environnement de sa région et contre l’expansion des plantations d’eucalyptus [3]. 207 meurtres de défenseurs de la terre et de l’environnement ont été enregistrés dans le monde en 2017, un chiffre record.