Tyshka Rostov, Révolution permanente, 3 octobre 2020
A Mexico, ce 28 septembre, des centaines de femmes étaient mobilisées dans la rue pour réclamer leur droit à disposer de leur corps, lors de la journée internationale du droit à l’avortement. La réponse du gouvernement de Claudia Sheinbaum face à ces manifestations a été un déploiement de 1750 policiers, et une répression violente.
En début d’après-midi, la police a nassé un petit groupe de femmes et l’a maintenu piégé pendant cinq heures, en les gazant sans relâche et en les battant avec leurs boucliers. Plusieurs femmes ont été battues, blessées, certaines ont subi des fractures osseuses tandis que d’autres n’arrivaient plus à respirer. Au total, au moins 13 femmes ont été blessées à Mexico, dont Flora Aco, une employée de l’État réintégrée, militante à Pan y Rosas et dirigeante du Mouvement des Travailleurs Socialistes.
Harcelées par la police ainsi que par des militants « pro-vie » violents, les manifestantes ne se sont pas laissées abattre, et ont continué à manifester leur colère, pour revendiquer le droit à l’avortement totalement légal, sûr, et accessible pour toutes. Après cette journée de répression elles ont aussi fermement dénoncé les violences policières exercées par le gouvernement et ont exigé le retrait immédiat de la police.
Flora Aco a déclaré : « La journée d’aujourd’hui a démontré que le gouvernement d’AMLO est un ennemi des droits des femmes, tout comme les gouvernements précédents du PRI et du PAN. Avec dix femmes assassinées par jour et des travailleurs de la santé en tête du classement infâme des personnes touchées par la pandémie, la chef du gouvernement, Claudia Sheinbaum, et le président López Obrador nous ont réprimés pour défendre les conservateurs de l’Église. Afin de conquérir le droit à l’avortement, de mettre fin à la violence contre les femmes et à la précarité du travail, il est urgent de mettre sur pied un large mouvement de femmes indépendant du gouvernement et de tous les partis du Congrès, qui s’allie à la classe ouvrière et aux secteurs populaires ».
Ce 28 septembre à Mexico et dans le reste du pays a marqué l’actualité et fait l’objet d’un débat intense sur les réseaux sociaux. Les révoltes continuent d’avoir lieu depuis plusieurs jours, et des scènes d’affrontements avec la police ont lieu à Mexico.
Le gouvernement du Mexique, étroitement lié avec la droite et les Églises catholique et évangélique, fait appel aux préjugés et aux idéologies patriarcales et religieuses pour continuer à soumettre matériellement et idéologiquement des millions de femmes.
Les médias officiels, qui relayent l’idéologie conservatrice et autoritaire du gouvernement mexicain, participent à la campagne médiatique de criminalisation des protestations sociales, dans ce cas contre le mouvement féministe et la lutte historique pour la légalisation de l’avortement.
Cette journée de mobilisation et de répression est loin d’être un cas isolé au Mexique. Toujours en septembre, un groupe de femmes s’est mobilisé contre les violences sexistes, à Chihuahua, et les manifestantes ont été attaquées par plusieurs agents de police qui ont frappé et arrêté illégalement 40 femmes. À cela s’ajoute la répression exercée à Guanajuato par les manifestantes qui sont descendues dans la rue au mois d’août, dénonçant les abus sexuels commis par des policiers d’État sur une mineure. La répression a fait des blessés, 23 détenues et 4 journalistes violentées.
Dans ce contexte de crise sanitaire et économique qui est déjà en train d’aggraver une misère sociale déjà existante, la seule réponse des gouvernements face aux foyers de colère qui explosent est la répression, et une politique autoritaire. La police est raciste, sexiste, et cela partout dans la monde, où les violences policières n’ont cesse de s’accentuer avec la crise économique. De plus en plus alors, la police est remise en question en tant qu’institution. Elle n’est pas là pour nous protéger, mais pour appliquer des politiques violentes, racistes, sexistes, homophobes.
Et quand les femmes remettent en question cet ordre, elles deviennent un véritable danger pour la bourgeoisie. Dans ce système où les femmes subissent de plein fouet la précarité et cette crise économique, elles n’ont rien à perdre à s’organiser et à se révolter.