Amélie Kermel, correspondante en stage
Pour Michel Seymour, « le nationalisme est une doctrine faisant la promotion du droit des peuples à affirmer leur autorité sur un territoire ». Le 2 décembre dernier, Michel Seymour, philosophe canadien et professeur retraité en philosophie de l’Université de Montréal, a tenu une conférence intitulée « Pourquoi la gauche devrait s’intéresser au nationalisme ? » à l’UPOP de Montréal.
Partant de l’idée traditionnelle de la nation qui veut que la frontière du peuple coïncide avec la frontière de l’État, il met au défi la gauche de s’intéresser au nationalisme à partir des différents mouvements nationaux actuels comme ceux autochtones et africains. Il mentionne de plus comment l’impérialisme américain influence les mouvements nationaux sud-américains, russe, chinois et iranien.
Malgré l’idée reçue qu’une nation ne peut pas exister sans Etat, certaines régions comme le Québec, l’Écosse et la Catalogne ont le droit à une autonomie gouvernementale. Il s’agit d’un nationalisme affirmant un droit à l’autodétermination à l’intérieur de l’État dans lequel ils se trouvent. Dans le cas du Québec et du Canada, l’affirmation doit respecter les minorités autochtones. L’approche sur ce plan relève plus de l’interculturalisme que du multiculturalisme. C’est-à-dire, pour M. Seymour, une reconnaissance réciproque.
Les nationalismes autochtones et africains
Le nationalisme autochtone soulève plusieurs enjeux. Non seulement les autochtones revendiquent une autorité sur un territoire qu’ils n’ont pas cédé, mais ces territoires font partie de leur identité. L’identité autochtone est caractérisée par leur appartenance à un territoire.
Les enjeux climatiques nous obligent à voir ce lien identitaire entre les autochtones et leurs territoires. Leur identité se transforme avec le territoire.
Le nationalisme des CFA : réappropriation
Les Colonies françaises d’Afrique (CFA) sont maintenant les Communautés francophones d’Afrique. C’est en changeant le sens de leur nom qu’ils se réapproprient leur histoire et identité. Leurs politiques économiques avaient tendance à être décidées au détriment des pays africains. Or, un enjeu soulevé par Ndongo Samba Sila que Michel Seymour appuie est d’avoir le dernier mot sur l’utilisation de ses propres ressources si on veut être souverain.
Impérialisme américain : une hégémonie maintenue par la force
Les États-Unis alimentent les narratifs russophobe, sinophobe et islamophobe afin de contrer l’avènement d’un monde multipolaire. «L’Amérique aux Américains» ou la doctrine Monroe datant du 19e siècle justifiant la présence et l’intervention des États-Unis dans les affaires des pays sud-américains. Les États-Unis sont impliqués dans leur politique. Ils peuvent imposer des changements de régime, appuyer des coups d’État ou encore appuyer financièrement les groupes d’opposition.
Les mouvements nationaux de l’Amérique latine sont donc limités à ce que les États-Unis permettent.
Pourquoi la gauche devrait s’intéresser au nationalisme?
La gauche a besoin de s’apercevoir des différentes formes de nationalisme présentes sur le territoire de son engagement. Les minorités représentent un prolongement d’une nation voisine, ce qui entraîne des intérêts divergents dans la population. Michel Seymour nous dit donc qu’on ne peut pas demeurer «aveugle». Afin de mieux répondre aux enjeux auxquelles elle fait face, la gauche se doit de reconnaître les nations sans États existantes.
Conférence «Pourquoi la gauche devrait s’intéresser au nationalisme?» de Michel Seymour. Il s’agit de sa troisième conférence sur le sujet Nation et nationalisme au XXIe siècle organisée par l’édition 2024 de UPOP Montréal. Il fait la promotion de son nouveau livre intitulé «Nations et autodétermination au XXIe siècle».