La table avec les membres des organismes lors de la rencontre du 20 mars.

Mikaël Demers

Le président tunisien, Kaïs Saïed, a tenu des propos racistes et xénophobes à l’endroit des exilé·es subsahariens le 21 février 2023, ce qui a signé le début d’une campagne d’actes de violence envers les Africain·es noir·es dans l’année qui a suivi.

C’est ce triste anniversaire qui a été dénoncé lors de la rencontre «Tunisie : Un an de racisme d’État et de chasse aux migrant·e·s» présentée par Le Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT) et quatre autres organismes, qui s’est déroulée le 20 mars dernier à Paris.

Chaque représentant·e de ces organisations a demandé l’arrêt immédiat des actes de violence fait aux exilé·es noir·es en Tunisie.

Du pur racisme anti-noir

Les propos discriminatoires du président Kaïs Saïed ont été tenus lors d’une réunion du Conseil de sécurité nationale au palais de Carthage, il y a plus d’un an. Il a insinué qu’il y avait « des hordes d’immigrés clandestins provenant d’Afrique subsaharienne » et supposa qu’il s’agissait d’un plan criminel visant à faire de la Tunisie « un État africain ».

Ces allégations envers les communautés noires migrantes constituent des façons de trouver un bouc émissaire quant aux difficultés économique et politique que le pays traverse.

« Ce qui se passe en Tunisie, c’est du pur racisme. Ce n’est pas de la xénophobie. », s’est exclamée une participante de la rencontre qui a eu lieu à Paris. Elle ajoute qu’il y a toujours eu des immigré·es en Tunisie, mais que les actions de la dernière année ne visent que les personnes noires.

Dans les semaines qui ont suivi les propos du président tunisien, une vague d’agression physique de la part du peuple tunisien envers les migrant·es noir·es à commencer. Avocats sans Frontières (ASF), une organisation non gouvernementale qui fournit une aide juridique aux personnes demandeuses d’asile et migrantes a rapporté que plus de 840 exilé·es noir·es ont été arrêtés entre la réunion du Conseil de sécurité nationale et le début du mois de février 2023.

Plusieurs victimes ont avoué à Amnesty International qu’elles ont été agressées physiquement par des foules et, dans certains cas, la police était témoin de la situation, mais ne sont pas intervenues.

Un rapport de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) publié le 18 décembre dernier, dévoile que des centaines de subsaharien·nes sont déportés chaque jour dans le désert aux frontières de la Libye et l’Algérie, ce qui a conduit à des dizaines de morts de faim et de soif. Ces déplacements forcés sont illégaux et constituent une violation au droit de l’homme.

Une alliance avec l’Union européenne

À l’été 2023, un mémorandum d’entente sur un partenariat stratégique et global a été conclu entre la République tunisienne et l’Union européenne (UE). Cette alliance a permis au territoire tunisien de devenir le point d’entrée important pour la gérance des migrant·es.
Ce pacte crée une gestion à l’extérieur du continent européen, alors que l’Italie était le principal point d’entrée de milliers d’exilé·es traversant la mer Méditerranée chaque mois. Bien que le montant ne soit pas défini et est évolutif, cela rapportera des millions de dollars à la République tunisienne, ce qui arrive à point nommé puisqu’elle connait des difficultés à subvenir à leur besoin.

« Ça va être un arrangement entre amis racistes », s’est exclamée Brigitte Espuche, membre représentante de Migreurop. Elle ajoute que l’UE n’a pas reculé dans sa coopération avec la Tunisie malgré l’autoritarisme et le racisme présent dans le pays.
Le communiqué de presse annonçant ce partenariat souligne « l’importance de renforcer la coopération pour lutter et diminuer les flux migratoires irréguliers et sauver des vies humaines ». Pourtant, il y a eu un très grand nombre de victimes par ces déportations qui ont eu lieu dans un climat d’irrespect d’accès à la justice et l’Union européenne ne sait toujours pas retirer de cette entente.

Pression contre pression

La situation est compliquée pour les exilé·es subsaharien·nes, mais elle l’est tout autant pour les personnes tunisiennes qui souhaitent dénoncer ces injustices et actes de violence. Les militants du pays subissent des pressions de la part des autorités et plusieurs ont été arrêtés dans le cadre de la loi antiterroriste.

Les représentant·es des organismes présents à la rencontre du 20 mars ont insisté sur l’importance de faire pression sur l’Union européenne pour qu’il se retire de l’alliance avec la Tunisie. Les membres ont proposé la possibilité de participer à des manifestations pour exercer cette pression.


Pour en savoir plus: Communiqué en trois langues, dénonçant l’arrestation l’arrestation de l’ex-président de l’Association des étudiants et stagiaires africains, Christian Kwongang, par les autorités tunésiennes et incarcéré dans un centre de détention situé à El Ouardia, qui est, selon des organisations internationales et tunisiennes de droits humains, «une zone de non droit où les personnes sont arbitrairement privées de leurs libertés.

Les autorités tunisiennes s’efforcent à légaliser le racisme avec la bénédiction européenne Tunisian authorities strive to legalize racism with European blessing السلطات التونسية تسعى الى تقنين العنصرية بمباركة أوروبية الحرية لكريستيان كونغانغ (1)