Nina Morin, correspondante
Deux ans après la signature du Traité international de non-prolifération des énergies fossiles par la ville de Montréal, deux activistes climatiques québécois ont été emprisonnés le 23 octobre, après avoir escaladé le pont Jacques-Cartier à Montréal la veille. Olivier Huard et Jacob Pirro ont été arrêtés et incarcérés, une première au Québec. Ils demandent notamment au gouvernement fédéral d’adhérer au traité et d’accélérer ses efforts pour la transition écologique. Nous publions la vidéo que Santiago Bertolino a réalisée avec les porte-paroles des collectifs à l’initiative de l’action.
Olivier Huard et Jacob Pirro, des collectifs Antigone et Last Generation Canada ont pris leur courage à deux mains mardi matin, le 22 octobre vers 5 h du matin pour escalader le pont Jacques-Cartier afin de dénoncer l’inaction des gouvernements québécois et canadien face aux changements climatiques. Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, Olivier Huard rappelle que l’on observe déjà de nombreuses conséquences du dérèglement climatique, telles que les incendies, les tornades, les inondations et l’alerte sur l’urgence que représente chaque jour un peu plus la crise climatique. Arrivés au sommet du pont, ils ont brandi une banderole où l’on pouvait lire «Le pétrole nous tue».
Alors qu’en 2019 deux autres activistes avaient fait la même démarche de protestation pour demander aux autorités davantage d’actions concrètes, cinq ans plus tard, rien n’a changé. Olivier Huard dénonce cette situation et explique leur démarche de répéter l’action pour accentuer la pression sur les gouvernements pour protéger la population tandis que la situation écologique s’est largement empirée.
Les demandes des activistes
Concrètement, les deux militants demandent aux autorités de se désengager des énergies fossiles, notamment en adhérant au Traité de non-prolifération des énergies fossiles. Ils demandent la fermeture du pipeline 9B, qui permet l’acheminement de Montréal vers l’Ontario, de pétrole importé du Moyen-Orient, de l’Afrique et de la mer du Nord. Ils militent aussi pour la création d’une «Agence nationale de gestion des urgences» pour de répondre aux catastrophes causées par les changements climatiques telles que les incendies ou les inondations. Enfin, ils plaident pour un soutien financier à d’autres pays, afin de contribuer à une transition écologique rapide, équitable et juste, et ce au plan mondial.
Le Traité de non-prolifération des énergies fossiles
En avril 2021, plus de 100 lauréats du prix Nobel, le Dalaï-Lama et d’autres universitaires avaient signé une lettre demandant aux États de «prendre des mesures concrètes pour s’éloigner progressivement des combustibles fossiles afin d’éviter un changement climatique catastrophique».
L’idée d’un «traité» limitant la progression de l’utilisation des énergies fossiles avait été évoquée pour la première fois en 2016 par 14 nations du Pacifique, pour la plupart déjà particulièrement touchée par les conséquences du changement climatique tel que la montée des eaux. Puis, l’initiative a été soutenue par plusieurs centaines de spécialistes, dont Peter Newell et Andrew Simms, qui rappellent la menace du changement climatique, avait été mentionnée comme la deuxième plus grande menace pour l’humanité, après la guerre nucléaire, lors de la Conférence de Toronto sur le changement de l’atmosphère en 1988.
Depuis, les nations de Vanuatu et de Tuvalu ont été les premières à soutenir le traité pour la non-prolifération des énergies fossiles en 2022, suivies par les Palaos, la Colombie et Samoa en 2023. Aujourd’hui plus de 100 villes et gouvernements infranationaux ont supporté le traité, dont la ville de Montréal, le Parlement européen et l’Organisation mondiale de la santé.
Le besoin de poursuivre la mobilisation
Malgré cette initiative et comme il n’a pas de force contraignante, il n’a pas été signé par assez de gouvernements pour avoir un réel impact. Nous observons aujourd’hui encore de nombreux nouveaux projets impliquant à profit les énergies fossiles, telles que la mise en service de nouveaux sites d’extraction de gaz en Iran, ou la construction de nouveaux de pipelines, en Alaska, en Afrique de l’Est et au Canada.
C’est pourquoi il est nécessaire de continuer à demander et alerter sur le besoin urgent de mesures concrètes de la part des gouvernements, comme l’ont fait les militants d’Antigone et de Last Generation. À la place d’être écoutés, les autorités ont recours à la répression contre ces militants écologistes qui ne souhaitant que protéger la population.
Les autorités ont refusé leurs demandes de sortie en liberté sous caution. Si Jacob Pirro a été libéré le 29 octobre, après près d’une semaine de détention dans des conditions plus que déplorables, Olivier Huard attend toujours son audience, qui aura lieu le 31 octobre à 9 h, et depuis a engagé une grève de la faim.
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