Comment Israël utilise l’IA contre le peuple palestinien

Mémoire morte - IA @ Royonx CC0 1.0 UNIVERSAL

Rana Bouazer

Le conflit israélo-palestinien, enraciné depuis des décennies, cache des réalités encore méconnues. Des données biométriques aux soldats neurodivergents, l’armée sioniste utilise divers moyens pour consolider son pouvoir au détriment de la population palestinienne.

Les données numériques du travail palestinien sous le colonialisme marchand

Dans un monde où l’ultra capitalisme et le colonialisme se croisent, le peuple palestinien se retrouve exploité de manière unique et insidieuse.

Francisco Ramos, panéliste lors d’un atelier sur l’usage de l’intelligence artificielle (IA) à la conférence de New York sur les guerres, explique comment l’armée israélienne a développé des logiciels de reconnaissance faciale et un programme d’intelligence artificielle visant à déterminer les cibles humaines à bombarder dans la bande de Gaza. Pour lui, la situation en Palestine offre des conditions parfaites pour entraîner des intelligences artificielles sans frais.

À l’ère de l’IA, les données biométriques sont essentielles pour former les machines, leur donnant ainsi une valeur marchande. Cette exploitation de la technologie au détriment de la population palestinienne montre à quel point le capitalisme peut instrumentaliser les corps humains.

Le travail des palestinien.nes n’a pas que sa valeur liée à la production de biens et services, Le corps humain palestinien présente un intérêt additionnel sous forme de capital de données informatiques. L‘armée israélienne en contrôlant et colonisant la Palestine contrôle la vie de la population par la surveillance, les points de contrôle et les obstacles physiques comme les murs et les routes réservées. Ce système de surveillance et de contrôle n’est pas quune question de sécurité, mais aussi de domination économique et d’ordre moral.

Comme la surveillance est présentée comme un moyen de civiliser la population arabe, elle est alors perçue comme nécessaire dans l’imaginaire collectif Occidentale . Mais la dimension raciale de cette exploitation du travail palestinien est indissociable de la surveillance exercée par Israel. Cette perception erronée de la surveillance comme bienfait se répand aussi dans une société comme la nôtre.

Le progrès grâce au génocide ?

La population palestinienne se retrouve prise entre le fait d’être des sujets économiques sans droit et d’être des sujets colonisés dont la vie peut être écourtée.

Pour illustrer cette dynamique, , spécialiste de l’exploitation économique des différences raciales, explique que les contextes sociaux permettent de payer les personnes racisées 20 % de moins, malgré que celles-ci produisent la même marchandise que les personnes blanches. De la même manière, il devient possible de ne pas payer, même d’exploiter, la population palestinnienne pour leur travail dans le contexte social de la colonisation.

D’un côté, l’armée israélienne justifie sa politique de traitement des données en utilisant les meilleures technologies et en se présentant comme une force humanitaire. De l’autre, elle masque le fait que toute cette production repose sur le travail Palestiniennes et des Palestiniens, dissimulant ainsi l’exploitation économique et coloniale à l’œuvre. Cette double réalité révèle comment la logique capitaliste et coloniale s’entrelace pour maintenir un système d’oppression dissimulé sous une façade technologique et humanitaire.

Instrumentalisation des personnes autistes dans l’armée israélienne

De manière similaire, l’armée israélienne explore toutes les opportunités d’exploitation, que ce soit à travers l’utilisation de l’intelligence artificielle ou en créant l’Unité 990 en 2015, une initiative controversée intégrant exclusivement des personnes autistes dans ses rangs militaires.

En effet cette démarche, bien que datant de plusieurs années, suscite toujours un vif intérêt. Daniel West explique comment cette stratégie unique d’intégration des personnes autistes permet l’instrumentalisation de la neurodiversité.

L’armée a réussi à attribuer à ces soldats des tâches exigeantes, leur demandant de travailler de longues heuresdevant des écrans. Cependant, la réalité derrière cette initiative soulève des questions éthiques profondes. Les soldats ont été trompés en leur faisant croire qu’ils surveillaient simplement des écrans, alors qu’en fait, ils ciblaient des individus réels, notamment des Palestiniens.

Cette tromperie soulève la question du possible capacitismesystémique, un comportement discriminatoire basée sur des handicaps intellectuels ou physiques. En utilisant les capacités spécifiques des personnes autistes de cette manière, l’armée israélienne ne fait pas seulement preuve d’une exploitation cynique, mais elle renforce également des formes de discrimination basées sur la neurodiversité.


Atelier à la conférence NWBCW: « Labor, the General Intellect, and the Automation of War ». Animation Ahar Sultan; panélistes Francisco Ramos, Daniel West et Hagen Blix, le dimanche 2 juin à New York. Les titres des interventions étaient:

  • Autonomy and Autopsy: Feature Visualization as a Tactic of Cyberwarfare, Ahwar Sultan
  • Israeli Artificial Intelligence through Palestinian Labor, Francisco Ramos
  • Reading Ro’im Rachok: Instrumentalized Neurodiversity in the IDF, Daniel West
  • Artificial Intelligence & Class Struggle, Hagen Blix