Quand un peuple perd son histoire, il se perd lui-même dans les méandres de l’oubli. Dans l’enceinte de notre société contemporaine, un phénomène insidieux, tel un lichen s’insinuant dans les interstices de notre tissu social, mérite une observation attentive et critique. Il s’agit de l’effritement progressif, voire la déliquescence, des pratiques ancestrales du partage et surtout de la solidarité chez les haytiens.
Jadis érigée en vertu cardinale, cette noblesse d’âme semble désormais ébranlée, ou encore absente, chez une très grande partie de notre communauté. Il est impératif de se pencher avec une acuité déontologique sur les causes de cette dégénérescence morale, aussi insidieuse que pernicieuse. Les grandes nations resteront toujours celles-là qui ont su garder leur trait culturel. Dès la fondation de la première société des Américains des USA, ils étaient déjà profondément imprégnés de la philosophie de l’individualisme libéral.
L’individualisme prêté chez l’occident exacerbé, tel un venin sournois, s’est infiltré dans les fibres mêmes de notre tissu social, sapant ainsi les fondements de la solidarité qui jadis unissait nos concitoyen.nes dans un élan de générosité et de compassion. Comment penser révolution avec un tel déficit en repère identitaire? Quelle révolution? Pour quel peuple? Pour quelle nation? «Sans mémoire, un peuple devient une feuille emportée par le vent de l’histoire, sans destination ni ancrage.»
L’aliénation à l’ère numérique, avec son cortège de virtualité et de dématérialisation, a certes ouvert de nouvelles voies à la communication, mais elle a également distendu les haytiens, reléguant parfois la solidarité au rang d’une notion désuète, voire superflue. Dans cette ère où l’éphémère prévaut sur le durable, où l’ego surplombe le collectif, l’obsolescence de la solidarité semble être une réalité à laquelle chaque haytien doit faire face avec un regard critique et résolu. Il est impératif, dès lors, de raviver les braises de l’altruisme, de ranimer la flamme de la fraternité dans le cœur de chaque haytien. Car la solidarité, loin d’être une simple vertu morale, est le socle sur lequel repose l’édifice même de notre vivre-ensemble. Elle transcende les clivages sociaux, et les frontières géographiques tissant un réseau invisible, mais solide, qui soutient et réconforte ceux et celles qui sont dans le besoin.
Ainsi, exhortons-nous, avec une ferveur rédemptrice, à retrouver cette essence fondamentale de l’humanité, à réapprendre le langage universel de la compassion et de la solidarité. Car «Une société sans racines est une société sans repères, condamnée à errer dans les ténèbres de l’incertitude.» C’est dans ce noble engagement envers autrui que réside la quintessence de notre humanité, et c’est par là même que nous écrirons les plus belles pages de notre histoire collective en tant que peuple haytien.