Adieu camarade Alain Philoctète

Le vendredi 31 mai 2020 à l’aube, le REHMONCO a perdu l’un de ces membres fondateurs, Alain Philoctète. En dépit de sa maladie, il participait activement aux principales activités du groupe. Alain était de ces infatigables militants qui n’entendent pas lâcher prise. Il était toujours au front dans les échanges sur la conjoncture et dans les débats touchant les stratégies de mobilisation.

En contribuant à la création du REHMONCO au cours de la décennie de 2010, Alain poursuivait le processus de construction de la lutte pour l’émancipation du peuple haïtien. Il voulait transformer sa situation d’exil en une nouvelle opportunité de lutte. Pour lui, cet engagement s’opère à un double niveau. D’un coté, il renforçait la mobilisation des classes populaires contre la domination au quotidien, de l’autre, il s’attachait à interpréter et à comprendre les méandres de cette domination. Ce souci l’amenait à revisiter l’histoire de construction du système social de domination capitaliste en général à travers ses différentes variantes.

Par ailleurs, Alain s’ouvrait aux initiatives de luttes des autres peuples. Il s’engageait dans la gauche révolutionnaire en Amérique du Nord. Il contribuait au Québec dans les travaux du Nouveau Cahier du Socialisme (NCS). Il développait des relations avec des camarades en Amérique latine, etc. Pour lui, c’est le même combat dans la mesure où les exploités du Sud et du Nord sont tous opprimés par le système social capitaliste. La solidarité des peuples en lutte constituait un élément fondamental pour vaincre l’ennemi. Sans minimiser les luttes sectorielles, il pensait , comme Marx ,que c’est au prix d’une lutte globale que les peuples opprimés peuvent se défaire des chaines de l’exploitation du capital.

Courageux, mais non pas naïf, Alain ne s’attendait pas à un dénouement facile des problème sociaux. Au contraire, il mesurait la complexité des enjeux de la lutte. Il a su évaluer les coups manqués du long combat de libération du peuple haïtien. Mais il ne cédait pas à l’usure du cumul des échecs, il croyait plutôt à la résilience du mouvement populaire consistant à poursuivre l’idéal de la révolution de 1804. C’est en ce sens qu’il interprétait le tournant des luttes post-86 et le retour du néofascisme en Haïti depuis une dizaine d’années. Il comprenait également que cette envolée fascisante est à l’ère du temps. L’arrogance de la suprématie blanche a le vent en poupe aussi bien en Occident que dans plusieurs pays du Sud. Au lieu de se plaindre, il prenait ces mouvements réactionnaires comme une opportunité pour mieux organiser la nouvelle offensive.

Alors qu’Alain participait à la recherche de nouvelles avenues pour renforcer la lutte, la maladie a eu le dessus sur lui. Il est parti pendant qu’il était au front. Dans ce contexte de tristesse et d’affliction, le REHMONCO présente ses sympathies à ses enfants, ses ami.e.s et à sa conjointe Chantal.

Comme camarade de lutte, nous savons tous que la meilleure façon de lui rendre hommage n’est pas avec des larmes et des oraisons funèbres. Au contraire, l’hommage doit s’incarner dans la lutte, poursuivre le chemin qu’il n’a pas eu le temps de terminer. C’est-à-dire qu’il importe de continuer à accompagner le dur combat du peuple haïtien jusqu’à la victoire finale.

Pour nous qui avons pris partie pour le combat des peuples opprimés, Alain restera toujours une source d’inspiration.