L’élection présidentielle fixée au 18 octobre prochain se profile à nouveau comme la bataille rituelle entre la formation politique d’Evo Morales et le candidat de centre droit. Mais sans l’ancien président dans le paysage, pour la première fois depuis des années.
Depuis que la présidente par intérim Jeanine Áñez a, le 17 septembre, jeté l’éponge dans la course à la présidentielle du 18 octobre prochain, la Bolivie a renoué avec le duel habituel entre le candidat et ancien président conservateur Carlos Mesa et le parti d’Evo Morales, le MAS (Mouvement pour le socialisme). Celui-ci sera représenté par Luis Arce, le dauphin de l’ancien président Morales, note le site argentin La Nación.
Car pour la première fois depuis 1989 dans une élection générale à l’occasion de laquelle seront aussi renouvelés les mandats parlementaires, Evo Morales lui-même ne sera pas candidat, relève, au Chili, El Desconcierto..
Le 7 septembre dernier, une chambre constitutionnelle a confirmé que l’ancien président (2006-2019) ne pourrait pas être candidat à un poste de sénateur, comme en avait décidé en février le tribunal électoral.
Un sondage favorable au MAS
L’ancien président Evo Morales a démissionné le 10 novembre 2019 suite à ce que certains, comme El Desconcierto, appellent “un coup d’État” et d’autres, comme le journal bolivien Página Siete, une démission sous la pression du peuple. Le journal rappelle qu’en 2016, les Boliviens s’étaient prononcés contre l’éventualité d’un quatrième mandat d’Evo Morales.
Un sondage de la fondation catholique Jubileo place pour le moment le dauphin d’Evo Morales, Luis Arce, en tête des intentions de vote avec 29,2 % des voix, créditant son concurrent Carlos Mesa de 19 % de voix. Le troisième candidat, le leader régional d’extrême droite Fernando Camacho, obtiendrait 10,4 % des voix.
En Bolivie, un candidat emporte l’élection s’il a 50 % des voix ou 40 % s’il se situe à dix points d’avance de son adversaire le plus proche.
Au moment du sondage, Jeanine Áñez, encore en lice, était créditée de 7 % des voix, ce qui l’a motivée à se retirer “face au risque de voir se diviser le vote démocratique et que par conséquent, le MAS finisse par emporter l’élection”, a-t-elle déclaré, citée par Opinión Bolivia.
Sortir du “bourbier”
Luis Arce, qui a été ministre de l’Économie dans plusieurs gouvernements d’Evo Morales, de 2006 à 2017 puis de janvier à novembre 2019, est, selon le portrait qu’en fait un politologue bolivien pour le New York Times en espagnol, “un leader technocrate, pragmatique et cosmopolite.” Il n’est pas du tout un second Evo Morales, souligne le journal, l qui défend la candidature de M.Arce comme la seule capable de sortir la Bolivie “de son bourbier.” Le candidat du MAS “est un économiste formé au Royaume-Uni et il fut le principal architecte de l’ascension économique de la Bolivie sous Evo Morales”, ajoute le New York Times.
Son adversaire de centre droit, Carlos Mesa, a été à deux doigts de remporter l’élection présidentielle de novembre 2019, à dix points de son adversaire Evo Morales lors d’une élection controversée. Président de la Bolivie de 2003 à 2005, cet historien qui a fait une carrière de journaliste avant de s’engager en politique a les préférences du quotidien Página Siete, qui fait l’éloge de sa “rectitude morale”. Selon El País, son “profil de modéré” pourrait tourner à son avantage dans cette bataille qui reste fortement idéologique.
Le troisième rival, Fernando Camacho, a beaucoup fait parler de lui lors des troubles qui ont précédé et suivi l’élection présidentielle de 2019, avec une rhétorique de l’autorité s’appuyant sur l’armée. Sa radicalité et la violence de ses propos à l’égard du MAS et d’Evo Morales, qu’il qualifiait de “tyran” et de “dictateur”, rappelle le site panaméricain Nodal, vont de pair avec un discours “fortement ancré dans la religion”. Avocat et entrepreneur, il est originaire d’une famille aisée de Santa Cruz, à l’est du pays.
Malheureusement, dans cette campagne “sans meetings, sans sortie dans la rue pour les candidats et sans virées dans les campagnes ou dans les villes”, écrit le quotidien bolivien La Razón, les principaux leviers de campagne sont les réseaux sociaux. Et c’est bien dommage, épilogue le journal, car ces échanges ne font qu’aiguiser les “accusations sans démontrer beaucoup de propositions.”