Canada : une étape victorieuse, le combat continue

Teck Coalition, 25 février 2020 (traduit par À l’enconrte)

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Le 24 février 2020, Radio Canada, indiquait: «L’entreprise vancouvéroise Teck Resources annonce qu’elle laisse tomber son mégaprojet d’exploitation des sables bitumineux Frontier, dans le nord de l’Alberta.

Dans une lettre envoyée dimanche au ministre fédéral de l’Environnement, Jonathan Wilkinson, l’entreprise annonce «après mûre réflexion» qu’elle a pris la décision de retirer son projet du processus d’autorisation fédéral.

Le mégaprojet de 20 milliards de dollars devait permettre d’extraire 260 000 barils de pétrole par jour, pendant 41 ans, et devait entrer en service en 2026. Le projet devait générer des retombées économiques de 70 milliards de dollars pour les trois ordres de gouvernement, en plus de créer 7000 emplois pendant la construction et 2500 par la suite lors du fonctionnement du projet.

En renonçant à ce projet, Teck Resources estime qu’elle va absorber une perte de 1,13 milliard de dollars avec le projet Frontier.»

Dans sa longue missive, le président de Teck Resources, Don Lindsay, évoque le contexte social qui prévaut au Canada.

«Nous ne nous contentons pas de fuir la controverse. La nature de notre activité dicte qu’une minorité bruyante s’opposera presque inévitablement à des développements spécifiques. Nous sommes prêts à faire face à ce genre d’opposition. Frontier, cependant, est apparue dans un débat plus large à propos des changements climatiques et du rôle que le Canada doit jouer pour y faire face. Nous espérons que le fait de se retirer du processus permettra aux Canadiens de passer à une discussion plus large et plus positive sur la voie à suivre. En fin de compte, cela devrait avoir lieu sans qu’une échéance réglementaire ne soit imminente.»

Rappelons que le premier ministre du Canada Justin Trudeau et son cabinet devaient décider du sort du mégaprojet d’ici au 28 février 2020.

Mais ce recul de Teck Resources est loin de clore le chapitre de cette mobilisation d’importance. En effet, le premier ministre de l’Alberta, Jason Kenney a affirmé:

«C’est ce qui arrive quand un gouvernement manque de courage pour défendre les intérêts des Canadiens face à une minorité de militants. Le moment de l’annonce de cette décision n’est pas une coïncidence. C’était un projet viable économiquement, comme l’entreprise l’a confirmé cette semaine et pour lequel elle plaidait, donc quelque chose a clairement changé très récemment.»

Pour préciser la nature de ce changement, Jason Kenney a invoqué: «l’inaction du fédéral à l’égard des blocages ferroviaires dans la foulée de la mobilisation contre le projet de gazoduc Coastal GasLink»

[pipeline devant transporter, sur une distance de 670 kilomètres du LNG – gaz
dit naturel liquéfié – de la Colombie-Britannique jusqu’à Kitimat, sur la côte
nord de la Colombie-Britanique pour être exporté vers l’Asie, d’où la présence
dans le conglomérat d’entreprises de ce projet exigeant des capitaux imposants
de firmes comme Korea Gas Corporation, de la japonaise Mitsubishi et de Petro
China]

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Sa conclusion est nette et instructive. De telles mobilisations créent: «de l’incertitude pour les investisseurs qui souhaitent investir au pays». De quoi les valider du point de vue d’une lutte raisonnée contre la destruction climatique organisée par les effets de la «logique économique» des décisions d’investissements des maîtres de l’industrie des combustibles fossiles.

Toutefois, le recul momentané de Teck Ressources ne marque qu’une victoire d’étape. En effet, Justin Trudeau [premier ministre en fonction depuis le 4 novembre 2015], suite à un entretien avec Jason Kenney, le dimanche 23 février, produisait la déclaration suivante: «Le secteur des ressources naturelles du Canada revêt une grande importance pour notre économie.» Et ils ont réaffirmé leur «détermination à exploiter nos ressources naturelles de manière durable et à créer des emplois». En outre, Teck Resources a multiplié les opérations de séduction financière en direction de la Première Nation Chipewyanne d’Athabasca.

La bataille est loin donc d’être terminée. Elle est de prime importance dans un pays qui est l’hôte des plus importantes sociétés minières du monde et un champ d’investissements fort important pour les «souverains» de l’investissement rentable dans les énergies fossiles.