En RDC, le visage sombre d’une transition écologique technocentrée

CARNET DE VOYAGE

Sacs de cuivre sur la site Maniema Mining Corporation en République démocratique du Congo en 2013 @ Pascalmmp, CC BY-SA 4.0 via WikiCommons

Yousra Charifa Dandjouma

En République Démocratique du Congo (RDC), les femmes et les enfants sont les premières victimes de l’extractivisme pour satisfaire notre soif de minerais précieux utilisés dans nos appareils électroniques, nos téléphones, nos voitures et tout ce qui est lié à la transition technocentrée.

L’un des pays les plus riches en ressources naturelles, la RDC abrite des gisements importants de minéraux qui, chaque année, produisent 60 % du cobalt dans le monde et plus d’un million de tonnes de cuivre. Pourtant, cette richesse n’est pas synonyme de prospérité pour les Congolais∙es, en particulier pour les femmes du secteur minier artisanal.

En septembre 2023, un rapport d’Amnesty International constatait « de graves atteintes aux droits humains pendant la période coloniale et postcoloniale et des droits qui continuent d’être sacrifiés alors que les richesses de la RDC lui sont confisquées », et soulignait que « la justice climatique exige une transition juste ».

Des conditions d’exploitation

Selon une enquête de Radio-Canada, la main-d’œuvre dans les mines artisanales de la RDC est formée de 40 à 50 % de femmes et de quelque 40 000 enfants qui travaillent dans des conditions extrêmement difficiles. Ces travailleuses et travailleurs sont souvent exposé·es à des contaminants et ne jouissent pas de protections adéquates ni de soins médicaux de base. Chaque année, l’effondrement de galeries souterraines fait plusieurs victimes.

Par ailleurs, les travailleuses dans le secteur minier sont souvent payées, quand elles le sont, bien en dessous du salaire minimum légal. Dans de nombreux cas, elles sont rémunérées en fonction de la quantité de minerai qu’elles parviennent à extraire ou à trier, une tâche rendue encore plus ardue par la concurrence féroce et la pression des intermédiaires. En 2014, des chercheuses du Harvard Humanitarian Initiative révélaient que parmi les femmes qui travaillaient dans le secteur minier, 14 % déclaraient avoir été contrainte de « donner des faveurs sexuelles », tandis que « 30 % des femmes affirmaient avoir été victimes de harcèlement ».

Des réformes encore insuffisantes

Malgré ce contexte difficile, un certain nombre d’initiatives portées par des associations congolaises et internationales visent à améliorer la situation des travailleuses dans l’industrie minière en multipliant les campagnes d’éducation et les formations sur les droits du travail, l’autonomisation économique et la santé reproductive. Sous la pression internationale, le gouvernement congolais a également introduit des mesures pour réguler le secteur minier artisanal.

Depuis 2018, la loi minière en RDC vise à lutter contre la pauvreté, à formaliser les activités du secteur et à garantir une répartition plus équitable des revenus, notamment par la création de coopératives. 

Malgré ces efforts, il reste encore beaucoup à faire pour garantir des conditions de travail sûres, équitables et respectueuses des droits. Une collaboration entre la communauté internationale, les gouvernements et les entreprises est essentielle pour mettre fin à l’exploitation et aux abus afin que les richesses naturelles de la RDC bénéficient enfin à l’ensemble des habitant·es, y compris les femmes qui travaillent dur pour les extraire.

Yousra Charifa Dandjouma a été stagiaire dans le cadre du Programme de stages internationaux pour les jeunes (PSIJ).