Introduction réalisée par la coordination à partir des informations de France-Amérique latine
Au Honduras, les électeurs et électrices se sont rendu.e.s aux urnes dimanche 28 novembre pour élire un nouveau chef de l’État pour succéder à Juan Orlando Hernández du Parti National, qui ne se représentait pas et qui est mis en cause dans des affaires de crime organisé et de trafic de drogue. La candidate de gauche Xiomara Castro a revendiqué dès dimanche soir la victoire face à Nasry Asfura, dauphin du président sortant. La droite au pouvoir, devancée d’une vingtaine de points par la candidate de la gauche, a reconnu, mardi 30 novembre, sa défaite à l’élection présidentielle, alors que les résultats partiels portent sur plus de la moitié des suffrages. Outre leur président, les électeurs devaient élire députés et maires.
C’est tout un revirement depuis le coup d’État qui avait amené la droite au pouvoir en 2009 et forcé l’exil du président élu Manuel Zelaya (qui est par ailleurs le conjoint de Castro). On se croise les doigts pour le deuxième tour. La droite, bien installée dans l’appareil d’État et l’armée, par ailleurs liée aux réseaux de narco trafiquants qui font la chasse aux militants, aux écologistes et aux migrants, ne se laissera pas facilement chassée.
Entrevue réalisée par Alexander Rubinstein et publiée sur le site de AltWorld
La victoire de Xiomara Castro Zelaya aux élections présidentielles du Honduras est remarquable. Avec une marge claire et large, elle devrait devenir la première femme présidente du pays et la première de l’après-coup d’État qui n’appartient pas au Parti national, au pouvoir depuis le coup d’État de 2009 soutenu par les États-Unis.
En supposant que le Parti national ne tente pas de voler l’élection, comme il l’a fait en 2017, les résultats des élections représentent une raison d’espérer dans le deuxième pays le plus pauvre de l’hémisphère, après Haïti. La nouvelle présidente, Xiomara Zelaya, est l’épouse de Manuel Zelaya, évincé lors du coup d’État de 2009.
Depuis 2009, le pays est en chute libre, les principaux services publics ont été privatisés et les droits de l’homme sont devenus pratiquement inexistants. J’ai déjà longuement écrit sur cette descente vers ce que j’appelle la narcocratie, ou un gouvernement de barons de la drogue.
Le président sortant, Juan Orlando Hernandez, a des liens profonds avec les cartels et était un co-conspirateur non accusé dans le procès de son frère, Tony Hernandez, aux États-Unis. Il a même utilisé 1,5 million de dollars provenant de l’argent de la drogue comme fonds de campagne en 2013. Les documents judiciaires américains accusent Tony Hernandez et l’ancien président, également du Parti national, Pepe Lobo, d’avoir « exploité le trafic de drogue pour maintenir et renforcer leur pouvoir politique.»
Alors que la Maison-Blanche de Joe Biden a déclaré que sa stratégie pour atténuer la crise des migrants consistait à s’attaquer aux « causes profondes » des problèmes, le coup d’État au Honduras, soutenu par Obama et Biden, a été la principale cause des demandes d’asile d’Amérique centrale aux États-Unis. Si la Maison Blanche veut être fidèle à ses paroles, elle doit accepter la légitimité de la victoire électorale de Xiomara Zelaya.
« Au moment exact où nous commencions un processus… de réforme et de transformation de notre peuple et de notre pays, en donnant aux citoyens une réelle opportunité de participer, de sentir qu’ils font partie du processus et qu’ils ne sont pas seulement un outil – c’est là que les États-Unis ont pris peur » », m’a-t-elle dit.
« Aujourd’hui, le peuple hondurien est plus fort. Aujourd’hui, nous comprenons – avec de nombreux secteurs qui étaient indifférents au coup d’État mais qui sont maintenant avec nous dans cette lutte – que le 28 juin, lorsqu’ils ont perpétré le coup d’État, enlevant leur président du pays, ainsi que tout ce que nous avons perdu, le peuple comprend que le coup d’État n’a pas été fait pour que tout reste pareil. Ils l’ont fait pour nuire à la grande majorité du peuple. »