L’œuvre What the actual fuck? de l’artiste Amal Al Nakhala - crédit Charline Caro

Charline Caro, collaboratrice 

L’exposition P pour Palestine rassemble les œuvres de huit artistes d’origine palestinienne. Le projet est présenté au centre d’exposition Plein Sud à Longueuil, et cherche à rendre visibles des récits peu présents dans l’espace artistique et médiatique.

Dans un contexte où les « voix palestiniennes sont souvent censurées ou peinent à se faire entendre », les commissaires Ariane De Blois et Muhammad Nour ElKairy ont voulu mettre en lumière le travail d’artistes d’origine palestinienne. Les douze œuvres présentées à Plein Sud ont été choisies pour leur rapport au langage, thématique centrale de l’exposition.

« L’exposition part du principe que le langage est politique », explique Ariane De Blois dans une entrevue pour Plein Sud. Les œuvres exposées utilisent en effet le langage comme moyen de visibilisation des réalités palestiniennes, s’interrogeant sur des questions telles que l’identité, la terre, l’exil, et le génocide.

Le langage prend toutefois des formes différentes selon les œuvres : manuscrit, numérique, audio, vidéo… On retrouve par exemple l’œuvre What the actual fuck? de l’artiste Amal Al Nakhala, un journal de guerre mêlant texte et croquis sur les déplacements forcés qu’elle a subi avec ses proches. Il y a aussi l’œuvre Vibrations de Gaza, dans laquelle Rehab Nazzal filme des enfants sourds racontant les bombardements des forces israéliennes. Dans un autre registre, un extrait du livre Les racistes n’ont jamais vu la mer de Yara El-Ghadban est affiché.

Vue d’ensemble de l’exposition – crédit Charline Caro

Au niveau sonore, on entend dans la salle d’exposition des bruits de drones militaires et d’un clavier numérique en train d’être tapé, provenant de deux œuvres distinctes. Une ambiance qui mêle les sonorités de la guerre et de l’écriture, plongeant le public dans la problématique portée par l’exposition. Quant à la disposition des lieux, la salle d’exposition unique permet d’avoir une vision d’ensemble sur toutes les œuvres, et de s’y déplacer dans le sens souhaité. L’espace a été pensé comme une « agora », un « lieu de rencontres » autour des voix et des imaginaires palestiniens, selon les termes des commissaires d’exposition.

Un contexte particulier

Les locaux de Plein Sud étant situés dans le Cégep Édouard Montpetit, l’exposition accueille beaucoup d’étudiant·es. La directrice générale de Plein Sud, Hélène Poirier, juge cet emplacement dans un milieu scolaire « vraiment intéressant », étant donné la « mission éducative » de l’art contemporain, parfois trop isolé et réservé à une « petite élite ». Les professeur·es font également partie des visiteurs, ainsi que les amateur·ices d’art contemporain. Des groupes de nouveaux arrivants en francisation avaient aussi l’habitude de se rendre à l’exposition, mais les visites ont finalement été annulées en raison d’une « charge émotionnelle trop forte ».

C’est « la première fois qu’une de nos expositions est autant d’actualité », selon Hélène Poirier. Bien que l’art contemporain traite de plus en plus de questions sociopolitiques, P pour Palestine s’inscrit dans un contexte géopolitique et médiatique rare pour une exposition.

L’exposition P pour Palestine se tient jusqu’au 14 décembre au centre d’exposition Plein Sud à Longueuil, et en simultanée au centre d’artistes L’Œil de Poisson, à Québec, jusqu’au 15 décembre

https://plein-sud.org/IMG/pdf/ppourpalestine-feuillet_complet_2024.pdf

https://oeildepoisson.com/evenements/p-pour-palestine/