Nous publions un article du dr Moustafa Barghouti, secrétaire général de l’Initiative nationale palestinienne, concernant les allégations du porte-parole militaire israélien qui a affirmé que le massacre à l’Hôpital Baptiste Anglican de Gaza était le résultat d’une erreur de tir d’une roquette du Jihad islamique. Le point de vue qu’il présente soulève des informations troublantes sur la crédibilité de la position israélienne. Nous partageons avec M. Barghouti, la proposition que se tienne une enquête internationale indépendante de l’État israélien, afin de faire la lumière sur toutes les allégations qui circulent concernant ces événements, notamment celles d’Al Jazeera et aussi celles de Bellingcat.
Commentant le missile qui a tué plus de 500 personnes et blessé des centaines de civils à l’Hôpital Baptiste Anglican, dont la plupart étaient des femmes et des enfants, le Dr Barghouti dénonce les affirmations du porte-parole israélien comme étant des mensonges sans fondement.
Tout d’abord, le Dr Barghouti rappelle au monde que l’armée israélienne a menti à de nombreuses reprises au sujet de ses crimes, changeant plusieurs fois sa version officielle, afin d’éviter d’être tenue pour responsable. Un exemple est le changement constant de la version de l’armée israélienne concernant l’assassinat de la journaliste palestinienne américaine Shireen Abu Akleh.
Cette fois-ci, l’armée israélienne a tenté de justifier son crime en affirmant d’abord qu’elle avait frappé l’hôpital parce que des militants du Hamas s’y cachaient. L’armée a ensuite changé d’avis et déclaré que le bombardement de l’hôpital était dû à une erreur de tir d’une roquette du Hamas. Puis elle a de nouveau changé d’avis en affirmant qu’il s’agissait d’une roquette du Jihad islamique. Le type de missile qui a frappé l’hôpital est typique des ogives israéliennes, que ni le Jihad islamique ni aucune faction palestinienne ne possède. Aucune roquette palestinienne n’a jamais causé ce genre de dégât, et encore moins tué 500 personnes en moins d’une minute.
Deuxièmement, M. Barghouti a affirmé qu’Israël, en tant que criminel et auteur de l’attentat, ne peut pas enquêter sur les crimes qu’il a commis. Il est inacceptable que l’armée israélienne enquête sur quelque chose dont elle est accusée.
Troisièmement, le Dr Barghouti a affirmé que dans le cas de Shireen Abu Akleh, l’armée a mis des semaines à enquêter sur le meurtre d’une seule personne. Dans le cas de l’hôpital baptiste anglican, il n’a fallu que cinq heures à l’armée pour annoncer qu’elle avait mené une «enquête» sur le meurtre de 500 personnes. En tout état de cause, elle n’avait pas accès au site et n’aurait pas pu mener une enquête satisfaisante. S’ils veulent une enquête, ils devraient autoriser la venue d’une commission d’enquête internationale dépendante, ce qu’ils n’autorisent généralement jamais.
Quatrièmement, le Dr Barghouti a déclaré qu’avant l’attaque, Israël avait déjà ordonné l’hôpital d’évacuation, avertissant de nombreux autres hôpitaux palestiniens à Gaza, du même coup. Le personnel a refusé de partir parce qu’il était impossible de transférer des patients critiques sans qu’ils meurent, et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré que leur transfert serait une «condamnation à mort».
Le Dr Barghouti a également souligné que la communauté médicale palestinienne avait déjà perdu 18 de ses secouristes, tués par des frappes aériennes israéliennes, 23 ambulances médicales ont également été touchées par des frappes aériennes et pas moins de 57 établissements de santé ont été entièrement ou partiellement détruits par des frappes aériennes israéliennes, selon l’OMS, ce qui montre qu’Israël n’a aucune retenue dans ses attaques contre les établissements médicaux et hospitaliers.
M. Barghouti a affirmé qu’Israël est désormais coupable de trois crimes de guerre commis contre le peuple palestinien :
- Le premier est l’acte de génocide, au cours duquel 3 200 personnes ont été tuées à ce jour, principalement des civils, des femmes et pas moins de 1 200 enfants innocents.
- Le deuxième crime est l’acte de nettoyage ethnique de la population de Gaza. Déjà, 1,1 million d’habitants du nord et du centre de la bande de Gaza ont fait l’objet d’un nettoyage ethnique et ont été regroupés dans le sud, alors que Gaza est déjà la zone la plus densément peuplée du monde. Il est clair que le nettoyage ethnique fait partie du plan d’Israël, comme en témoigne la déclaration du porte-parole Richard Hecht selon laquelle tous les habitants de Gaza devraient quitter leur maison et se rendre en Égypte.
- Le troisième crime dont Israël est coupable est le crime de punition collective, qui se traduit par des bombardements aveugles et l’interruption de l’approvisionnement en nourriture, en eau, en électricité et en médicaments des 2,3 millions d’habitants de Gaza.
M. Barghouti a également appelé à un cessez-le-feu immédiat et a exhorté la communauté internationale, notamment les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France, à soutenir une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies visant à le faire respecter, après quoi un échange de prisonniers pourra avoir lieu.
Rappelons que M. Barghouti était au Québec au printemps dernier, dans le cadre de la conférence La Grande transition. Nous pouvons relayer les demandes de communication avec lui en écrivant à redaction@alter.quebec