BRANKO MARCETIC, Jacobin, 20 juillet 2018
La critique de l’OTAN, voire sa remise en question, devrait-elle être taboue ? La réponse de la plupart des médias lors du récent sommet de l’OTAN et à la rencontre de Trump avec Poutine semble avoir été un « oui » retentissant.
Les grands médias, les ténors du Parti Démocrate sont de fervents partisans de l’OTAN. Ils pensent que les critiques de Donald Trump à l’égard de cette institution cachent un complot en faveur de la Russie. Ce « consensus » défend mordicus l’idée que l’OTAN est nécessaire pour les États-Unis et la « paix mondiale ».
En réalité, plusieurs estiment que la raison de l’existence de l’OTAN a disparu après l’effondrement de l’Union soviétique. Cela n’était certes pas le point de vue du gouvernement Clinton qui a vigoureusement favorisé l’expansion de l’OTAN pour renforcer l’influence des Etats-Unis dans toute l’Europe. Avec seize États membres à la fin de la guerre froide (tous nord-américains et européens), l’OTAN a ajouté, entre 1999 et maintenant 2018, quatorze nouveaux États membres, tous originaires d’Europe de l’Est, dont deux (Lettonie et Estonie) frontière. La Macédoine s’est officiellement jointe au sommet de la semaine dernière.
Plus tard, derrière l’objectif douteux de la «guerre contre le terrorisme», on a prétendu que l’OTAN deviendrait une force de maintien de la paix. On a vu ce que cela donné dans les guerres récentes faisant appel à l’OTAN.
En Afghanistan, où l’OTAN a d’abord déployé une force de combat, la présence d’un grand nombre de troupes étrangères, jointe aux morts et aux destructions que les forces militaires ont infligées aux Afghans au cours des années, a entretenu le ressentiment local que nourrissent les insurgés, et continuera de le faire pour longtemps.
En Libye en 2011, l’intervention de l’OTAN s’est terminé avec l’assassinat du dictateur Mouammar Kadhafi. Depuis, le pays s’est transformé en chaos. En raison de la guerre provoquée par la décision du président Obama, la Libye est devenue un tremplin pour les extrémistes autour du Moyen-Orient, créant également la crise des migrants qui a contribué à nourrir la montée de l’extrême droite européenne.
Au mieux, l’OTAN est une relique de la guerre froide dont les tentatives d’élargir sa mission au XXIe siècle ont été des échecs désastreux. Au pire, c’est un véhicule de provocation anti-russe qui à la fois renforce la main des forces réactionnaires en Russie et se rapproche du monde de plus en plus proche d’un conflit armé, potentiellement nucléaire.