Le Tren Maya est un mégaprojet ferroviaire de 932 miles qui traverse cinq États mexicains, mettant en péril les écosystèmes et les communautés autochtones. Les promoteurs mettent en avant la création d’emplois et le développement, mais des millions d’arbres seront abattus et des espèces menacées – comme le jaguar – seront touchées.
Les droits des communautés mayas sont bafoués, avec des conséquences irréparables sur leur biodiversité culturelle. Le Tribunal International des Droits de la Nature exige la suspension immédiate du projet, dénonçant un risque d’écocide et d’ethnocide. Voici les conclusions de la Cour 1 à propos de cette situation préoccupante.
Le Tribunal demande la suspension immédiate du mégaprojet Tren Maya face à l’alerte d’écocide et d’ethnocide
Le Tribunal International des Droits de la Nature a tenu sa huitième audience locale dans la péninsule du Yucatan, au Mexique, du 9 au 12 mars 2023, pour le soi-disant « Train Maya », un mégaprojet de transport ferroviaire qui met les écosystèmes et les communautés mayas en grave danger de destruction. Comme plusieurs témoignages l’ont exprimé, il ne s’agit pas seulement d’un Train ni d’un projet proprement proprement maya, puisque plusieurs communautés mayas ne le considèrent pas comme tel. Il s’agit plutôt d’un projet qui se connecte à de nombreux autres : pôles de développement, méga fermes porcines, entre autres, ce qui exacerbe ses impacts sociaux, culturels, environnementaux et de genre, et dont le plan directeur n’a jamais été présenté par les autorités.
Sur la base des dispositions de la Déclaration universelle des droits de la nature, de la Convention 169 de l’OIT, de la Déclaration des Nations unies et de l’OEA sur les droits des peuples autochtones, de la Convention sur la biodiversité, de l’Accord d’Escazú, des ODD de l’Agenda 2030 et de la jurisprudence émise par les systèmes interaméricain et universel des droits de l’homme, ainsi que de la législation des États-Unis du Mexique ; la présente.
Le Tribunal éthique, au nom des droits de la Mère Nature, de l’Humanité et des générations à venir décide :
- Qu’il soit reconnu de manière irréfutable la violation des droits de la nature, ainsi que la violation des droits humains. Les droits humains, individuels et collectifs, et les droits bioculturels du peuple maya, qui a été et continue d’être le protecteur et le gardien de son territoire, des cénotes, de la jungle et des êtres sensibles non humains qui habitent ce territoire, tout cela constituant des crimes d’écocide et d’ethnocide. Le Tribunal tient l’État mexicain pour responsable de la violation de ces droits fondamentaux.
- Nous demandons instamment aux autorités de l’État mexicain de suspendre immédiatement le mégaprojet Tren Maya et toutes ses composantes, ainsi que la démilitarisation des territoires indigènes. Nous lançons un appel urgent à l’État et à l’intervention des organisations internationales, régionales et nationales de défense des droits humains pour mettre fin à la dépossession des terres de l’ejido, ainsi qu’à la persécution, aux menaces, au harcèlement et à l’intimidation des défenseurs de la nature, dont le Tribunal a été le témoin direct, en garantissant le droit à la libre expression et à la défense de l’héritage bioculturel.
- Qu’une réparation complète soit octroyée pour les dommages écologiques et sociaux causés par l’exécution du mégaprojet Tren Maya et de ses installations collatérales.
- Qu’un audit indépendant, transdisciplinaire et interculturel soit initié, avec la participation pleine et effective des populations affectées.
- Nous demandons instamment aux pouvoirs exécutif et législatif de procéder à des réformes constitutionnelles au niveau fédéral, à l’instar de ce qui a déjà été fait dans certains États (Mexico, Colima, Oaxaca et Guerrero), afin de reconnaître les droits de la nature en tant que sujet de droit. Nous recommandons également la révision de la loi qui établit la propriété sociale de la terre, afin qu’elle soit remplacée par une loi qui considère la fonction socioécologique du territoire dans sa relation indissoluble avec les pratiques culturelles durables des peuples et des communautés qui l’habitent ancestralement.
La Cour 2 notifie l’arrêt par écrit en temps utile, avec les formalités nécessaires, et le traduit en langue maya.
- Traduction libre et partielle du communiqué de presse original en espagnol, disponible ici [↩]
- Ce tribunal international sur les droits de la nature était présidé par Maristella Svampa (Argentine) et comprenait également Fray Raúl Vera (Mexique), Yaku Pérez (Équateur), Francesco Martone (Italie/Équateur) et Alberto Saldamando (États-Unis) (Chicano/Zapoteca). Le procureur de la terre était Jorge Fernandez, la plaignante Giovanna Gasparello, ainsi que 22 témoignages de communautés indigènes, de collectifs de citoyens et d’experts. La secrétaire du tribunal était Natalia Greene et les organisations convocatrices étaient l’Alliance mondiale pour les droits de la nature, l’Assemblée des défenseurs du territoire maya, Múuch’ Xíinbal et le Conseil civil mexicain pour une sylviculture durable (CCMSS).[↩]