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Journée de réflexion sur la solidarité ouvrière à l’occasion des 50 ans du CISO
Mégane Arseneau, correspondante en stage
Dans un contexte mondial marqué par le repli sur soi, il est légitime de s’interroger sur la place et l’avenir de la solidarité ouvrière internationale. Comment préserver, mais surtout renforcer ces liens à une époque où les dynamiques de fragmentation se multiplient ? C’est dans cette perspective qu’a été organisée une journée de réflexion par le CISO — retour sur un événement riche en idées et en échanges.
Depuis près d’un demi-siècle, le Centre international de solidarité ouvrière (CISO) œuvre à sensibiliser et à éduquer les travailleuses et travailleurs sur les réalités internationales qui façonnent leurs luttes.

Cette journée a rassemblé une centaine de personnes issues de divers milieux. Parmi celles-ci figuraient notamment Louise Harel, une figure politique marquante du Québec, et Haroun Bouazzi, député à l’Assemblée nationale. Plusieurs invité.es et panélistes étaient également présents, dont Geneviève Dorais, professeure au Département d’histoire de l’UQAM ; Benedicto Martínez Orozco, représentant du Frente Auténtico del Trabajo (FAT) au Mexique ; Chris Dols du Federal Unionists Network (FUN) aux États-Unis ; ainsi que Yvel Admettre, secrétaire général de la Confédération des travailleuses et travailleurs des secteurs publics et privés (CTSP) en Haïti.
Un laboratoire de solidarités ouvrières
Fort de ses cinq décennies d’expérience, le CISO est devenu un véritable « laboratoire » de solidarités ouvrières. Ses pratiques et ses démarches permettent aujourd’hui de mieux comprendre les mécanismes favorisant l’émergence et la consolidation de solidarités internationales.
Selon Geneviève Dorais, les pratiques du CISO éclairent une vision fondée sur des responsabilités partagées et sur l’interdépendance entre solidarité internationale et avancement des droits. De son analyse émergent trois axes fondamentaux pour soutenir une solidarité ouvrière internationale durable :
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- L’éducation à la citoyenneté mondiale;
- La création de coopérations par le dialogue
- Le développement durable d’actions concrètes par et pour les travailleurs/travailleuses.
Axe 1 – Éduquer pour comprendre, la base d’une solidarité
L’éducation constitue la première étape incontournable. Pour qu’une personne s’intéresse à l’internationalisme ou s’y investisse, elle doit d’abord comprendre les raisons qui rendent cet engagement nécessaire.
Faire connaître les enjeux internationaux liés à chaque secteur d’activité permet aux travailleuses et travailleurs de saisir les liens qui les unissent à leurs homologues ailleurs dans le monde. Dans un contexte de mondialisation des entreprises, cette compréhension globale devient essentielle : elle permet d’échanger des connaissances, de reconnaître des problèmes communs et de comprendre pourquoi la création de liens internationaux renforce les luttes, mais aussi permettent le maintien ou l’avancement des conditions et des droits, ici comme ailleurs.
Axe 2 – Le dialogue l’ingrédient créateur de coopération
Comment créer ces liens et faire naître cette solidarité ? Par le dialogue. La coopération ne peut exister sans échanges, sans écoute, sans compréhension mutuelle.
Les occasions sont multiples : conférences, ateliers, observatoires, webinaires, assemblées générales, rencontres militantes, etc. Ces espaces ne sont pas que syndicaux ou communautaires : ce sont de véritables lieux d’éveil politique où l’on vit des émotions fortes. Ils sont essentiels pour tisser des liens, susciter l’ouverture et éveiller la conscience sociale.
En nourrissant ce dialogue, on fait naître l’engouement pour la solidarité internationale. Chaque échange devient une pierre ajoutée à la construction d’une coopération durable.
Axe 3 – Développer du concrets, le présage d’un engagement durable
Vient ensuite le troisième axe : la mise en œuvre d’actions concrètes par et pour les personnes qui font vivre cette solidarité. Ces initiatives permettent non seulement de cultiver l’ouverture, mais aussi de renforcer le rapport de force des travailleuses et travailleurs à l’échelle internationale.
Ce succès repose sur deux éléments :
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- La multiplication du sens de la solidarité par l’éducation et la politisation, un milieu de travail à la fois ;
- La possibilité d’effectuer des stages internationaux, où l’expérience vécue — l’émotion — devient un puissant moteur d’engagement.
La convergence des luttes : l’illustration de cette journée
Au cours de la journée, les panélistes ont présenté des luttes internationales au seindesquelles des solidarités se sont créées, transformées ou renforcées. Ces témoignages ont illustré concrètement la portée de la solidarité ouvrière : ses défis, ses victoires, ses apprentissages, et surtout les avenues de possibles qu’elle ouvre dans les milieux de travail et dans les communautés.

Les incontournables
Peu importe le panel, l’atelier ou la discussion, un constat s’est imposé : l’éducation demeure le premier axe permettant la création d’une solidarité durable. Mais ce n’est pas le seul enseignement de la journée. Les échanges ont permis d’approfondir la réflexion et d’alimenter un engagement renouvelé envers le développement de la solidarité locale et internationale.
Réfléchir ensemble, confronter les idées, laisser émerger de nouvelles observations : c’est toute la richesse de ces espaces de dialogue. Les émotions y jouent un rôle central. On ne peut s’engager si l’on ne comprend pas pourquoi — et l’émotion, l’indignation, la compassion ou l’espoir sont souvent les moteurs de cet engagement.

La solidarité trop souvent définie selon une vision judéo-chrétienne — celle d’une aide unilatérale — doit être repensée comme une solidarité de classe, fondée non pas sur la vulnérabilité, mais sur la recherche du bien-être collectif. La convergence des luttes renforce les mouvements sociaux, syndicaux, environnementaux, politiques et humains, car nos enjeux et nos intérêts sont profondément liés.
La solidarité comme vecteur de changement
Dans un contexte de polarisation croissante, l’isolement favorise la division, au bénéfice des classes dominantes. L’appel à la solidarité, au contraire, nous invite à nous concentrer sur ce qui nous unit. De faire collectivement un choix lucide vers un monde plus juste et plus consciencieux des autres. Et il s’agit là d’un véritable vecteur de changement.
Se doter d’une culture internationale forte, c’est se donner les moyens d’atteindre des objectifs communs, de travailler en coopération et d’innover dans une perspective de bien commun.
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