Carminda Mac Lorin
La grande question qui brûle les lèvres de celles et ceux qui s’intéressent au Conseil international (CI) du Forum social mondial, semble mettre Sisyphe à l’honneur : sera-t-il possible de concilier les perspectives qui, d’une part, défendent jalousement que le potentiel du FSM réside dans sa capacité de rester un « espace ouvert » à l’hétérogénéité qui le compose, avec celles, d’autre part, qui plaident pour l’urgence de consolider au nom du FSM des actions communes fortes pour contrer les reculs graves que vit notre monde ?
Ce constant débat, qui s’est exacerbé à la rencontre du CI à Montréal à la fin du dernier FSM en 2016, reviendra assurément avec force au cours de sa prochaine réunion qui suivra le FSM 2018. Boaventura de Sousa Santos publiait dans une revue brésilienne en octobre 2017 (durant la dernière rencontre du CI à Salvador) un texte affirmant que la Charte de principes du FSM serait modifiée afin que le Forum devienne un « organe de défense et d’approfondissement de la démocratie » qui puisse prendre des « décisions politiques ». Dans cet élan, le CI serait auto-dissous et reconstitué lors une Assemblée plénière. Or, début février 2018, Chico Whitaker, Oded Grajew, et plusieurs membres ou proches du CI ont publié un document mettant en garde face à l’abandon de « la non-directivité qui caractérise la proposition du FSM » et à « l’adoption des principes de l’action politique hiérarchique verticale »…
Cette dichotomie se creuse, tandis qu’une autre question toute aussi cruciale pour le FSM demeure : le CI et son secrétariat seront-ils en mesure de camper une méthodologie efficace de travail et de prise de décision qui leur permettra de subsister à ses querelles intestines et de refléter l’espoir qui s’exprime au FSM ? Le temps ne saurait tarder à le dire.
Carminda Mac Lorin était active au sein du Collectif FSM2016 (maintenant Collectif pour une transition sociale mondiale), est actuellement présidente de l’organisation Katalizo et membre du Conseil international du FSM.