Aurélie Leroy, Alternatives Sud, 20 septembre 2021
Avec l’aimable autorisation des Editions Syllepse
Dans un climat général délétère pour les droits des femmes – crise sanitaire et économique, offensives réactionnaires et anti-genre –, un renouveau féministe s’est affirmé ces dernières années, au départ de l’Amérique latine. Complexifier et politiser les violences de genre, faire émerger les facteurs structurels entremêlés et s’attaquer à l’impunité sont des enjeux centraux des mobilisations à l’œuvre.
« Le patriarcat est un juge qui nous juge à la naissance
Et notre punition, c’est cette violence que tu ne vois pas
Le patriarcat est un juge qui nous juge à la naissance
Et notre punition, c’est cette violence que tu vois
Ce sont les féminicides, l’impunité des assassins
C’est la disparition, c’est le viol
Et le coupable ce n’est pas moi, ni mes fringues, ni l’endroit
Le violeur, c’était toi
Le violeur, c’est toi
Ce sont les policiers, les juges, l’État, le président
L’État oppresseur est un macho violeur »
Las Tesis, « Un violeur sur ton chemin »
Ces paroles du collectif chilien Las Tesis ont rythmé la performance « Un violeur sur ton chemin ». Entonné à Santiago le 25 novembre 2019 à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination des violences faites aux femmes, ce slam féministe est devenu viral au point de connaître un retentissement international. Un hymne puissant, réclamant la justice contre les violences sexistes et les féminicides, qui reprend les principaux enseignements de l’anthropologue Rita Laura Segato – sur lesquels nous reviendrons dans cet ouvrage – et qui témoigne d’un nouveau seuil franchi dans la compréhension de la violence, de l’impunité et de leurs modes opératoires. En égrenant des mots et des expériences vécues, des activistes du monde entier ont ainsi dispersé l’écran de fumée et débusqué les « apparats illusoires » (Segato, 2021) qui réduisent les violences de genre à des actes individuels et accidentels, empêchant d’en distinguer les ressorts véritables, les redondances et les schémas communs.
La violence contre les femmes est une question cruciale qui a mobilisé les mouvements féministes depuis leur origine. Toutefois, en dépit des combats menés et des lois promulguées, il n’est pas un pays au monde où les femmes sont à l’abri des violences masculines, à tout âge, dans tous les espaces et sous de multiples formes. L’Organisation mondiale de la santé estime qu’une femme sur trois est victime de violence physique ou sexuelle au cours de sa vie (OMS, 2021). Et ce phénomène n’a cessé d’augmenter ces dernières décennies, en nombre et en intensité, au point d’être qualifié d’« épidémie » (ONU femmes, 2019) – notion parfois critiquée pour sa dimension pathologisante et apolitique – ou de « guerre contre les femmes » (Segato, 2016, Federici, 2021, Gago, 2018), pour signifier les répercussions socio-économiques, politiques et écologiques dévastatrices du modèle d’accumulation capitaliste sur le corps des femmes et sur les rapports de genre.
Le succès de Las Tesis n’est pas un événement isolé, il s’inscrit dans la déferlante militante de la « quatrième vague féministe » qui s’est développée depuis une dizaine d’années au départ de l’Amérique latine et qui a donné une forte visibilité au problème des violences de genre, que celles-ci soient familiales, extra-domestiques ou institutionnelles.
L’explosion mobilisatrice autour de cet enjeu clé s’explique de plusieurs manières. D’une part, en raison du sentiment grandissant chez de nombreuses femmes que les conditions sociales qui leur sont imposées sont intolérables, de l’urgence qui les habite de revendiquer et d’exercer leurs droits élémentaires au regard des rôles centraux qu’elles assument. Esquivant les fausses solutions d’autorités proposant à répétition des pistes répressives et sécuritaires contre-productives, les femmes ont politisé le problème et développé leurs propres stratégies pour éradiquer la violence, pour saper les structures de domination et renforcer leur autonomie et leurs droits, démontrant par là leur volonté et leur pouvoir d’agir.
D’autre part, la spécificité de cet épisode réside aussi dans le fait que la dénonciation des violences de genre a fait appel à un héritage de réflexions et de connaissances qui a permis de mieux cerner et d’appréhender le caractère structurel et transversal de ce phénomène, et dès lors de nommer et rendre visible des abus et des pratiques qui autrefois étaient passés sous silence. Revenons dès lors sur certaines notions théoriques et concepts élaborés dans le champ féministe, qui nous aideront à saisir les mécanismes qui tout à la fois produisent, articulent et occultent la violence
Penser et visibiliser les violences de genre :
quelques concepts clés
Patriarcat et genre
Un demi-siècle de luttes a réussi à dévoiler et nommer la violence masculine comme une institution fondamentale du patriarcat, ce dernier pouvant être compris comme une forme d’organisation sociale fondée sur « un système de règles et de valeurs, de codes et de lois visant à spécifier la manière dont les hommes et les femmes doivent se comporter et être au monde » (Gilligan et Snider, 2019). Dans cet ordre établi, le masculin prime et l’emporte sur le féminin ; les hommes concentrent privilèges et pouvoirs entre leurs mains.
Cette structure de domination et d’inégalité repose sur les principes de dualité et de complémentarité des sexes – supposés naturels et universels – et érigés en vérité et préceptes moraux, sacralisés par les épistémologies occidentales. Elle institue une division sexuelle des rôles et du travail – aux hommes, la raison, la sphère publique et le pouvoir ; aux femmes, l’affectivité, la sphère privée et la sujétion – et légitime ainsi la relégation des femmes dans des espaces privés de droits, de ressources, de reconnaissance et de voix.
Pour mieux appréhender les systèmes de relations asymétriques entre les hommes et les femmes, le genre s’est aussi révélé un outil critique précieux, à la fois en termes scientifiques et politiques. Dans son interprétation la plus classique, le sexe se rapporte au « donné » physique et biologique et le genre au construit social, même si des analyses plus récentes sont venues interroger la « fabrique du biologique » et le caractère socialement construit du sexe, en prenant notamment appui sur des travaux consacrés à l’« intersexuation ». Au-delà des débats contradictoires, le concept de genre a permis de dénaturaliser la subordination sociale, économique et politique des femmes, et a mis en lumière les injonctions tacites de genre dans les processus de socialisation des personnes, amenant celles-ci à se comporter, à penser et à voir le monde au prisme de la différence des sexes.
C’est dans ce cadre façonné par le patriarcat et les normes de genre que les contours des « bonnes » féminité et masculinité se sont dessinés au fil des lieux et des époques, figeant les individus « dans des identités sociales non choisies », leur donnant mandat de s’y conformer. Le pouvoir patriarcal prend pour cible les femmes, mais pas seulement. La domination genrée s’attaque aussi « aux autres », aux masculinités « marginalisées » en termes ethniques, religieux ou d’orientation sexuelle. Dès lors, comme le rappelle Maria Luisa Femenias, ayons à l’esprit que « si toute violence contre les femmes est une violence de genre, la violence de genre ne se réduit pas à la violence contre les femmes » (Femenias, 2014).
Par ailleurs, le patriarcat, s’il cible les femmes et les corps féminisés, n’est pas la seule cause des violences faites aux femmes, loin s’en faut. Il s’articule à d’autres rapports de pouvoir qui ont des répercussions concrètes sur les corps. Les catégories de sexe n’étant pas homogènes, de multiples tensions et lignes de fracture les traversent (classe sociale, « race », orientation sexuelle, etc.) et conduisent à des expériences différenciées des rapports de genre, ce que Kimberlé Crenshaw (2005) a nommé l’intersectionnalité.
Conceptualisation « politique » de la violence
L’imposition des construits sociaux « types » de masculinité et de féminité – seuls jugés légitimes, appropriés et convenables – constituent une forme de violence symbolique. Non seulement ils agissent comme de « véritables camisoles de force sur les individus » (Fermenias, 2014), qui stigmatisent, disqualifient et excluent les personnes qui s’en écartent (injonctions esthétiques, amour romantique, femme mère et épouse, abnégation et sacrifice, etc.), instituant des normes essentialisantes et universelles, mais ils autorisent et légitiment également l’emploi de la violence physique afin de discipliner les corps et de préserver un ordre moral soi-disant menacé. Cette mécanique sophistiquée d’assujettissement, en permanence produite et refondée, maintient ainsi la trame de l’autorité patriarcale à travers le temps.
La naturalisation de l’inégalité et la normalisation des hiérarchies différenciées du masculin et du féminin constituent une « structure symbolique profonde qui organise nos actes et nos fantasmes et leur confère une intelligibilité » (Segato, 2021). Ce postulat est au fondement de la thèse féministe selon laquelle les crimes sexuels ne sont pas l’œuvre de « malades mentaux » ou de déviants, ils ne sont pas une anomalie sociale. Les agresseurs sont des hommes « normaux » qui partagent donc avec la collectivité « un même imaginaire de genre, parlent une même langue et peuvent s’entendre » (Segato, 2021).
Les rapports sociaux de sexe sont couramment niés comme cause de la violence. Or, ne pas nommer, c’est invisibiliser. Cette tolérance sociale se vérifie notamment dans le traitement médiatique des féminicides, « maquillés » en crimes passionnels et pulsionnels, en simples homicides ou en faits divers dramatiques, sans aucune perspective de genre, alors que ces femmes ont été tuées parce qu’elles étaient femmes. « Depuis les violences sexuelles comme politiques de terreur jusqu’à l’exclusion du champ littéraire, c’est un même rapport qui est à l’œuvre, une même violence symbolique qui naturalise la domination, rend possibles l’impunité et l’effacement de la violence – une impunité et un effacement qui sont eux-mêmes générateurs de violence » (Autre part, 2018).
Dans l’imaginaire collectif, mais aussi dans les représentations d’une majorité d’États, la notion de violence de genre, fondée sur des rapports de pouvoir inégaux, est loin d’être acquise et intégrée. Sa compréhension demeure parcellaire et morcelée, tendanciellement dépolitisante, tantôt réduite aux violences physiques envers les femmes, qui ne sont pourtant que l’« excès qui émerge d’une violence structurelle plus profonde » (Femenias, 2014), tantôt limitée à la sphère privée et domestique occultant ainsi les violences institutionnelles et structurelles, telles que dénoncées par Las Tesis.
Les études féministes ont néanmoins de longue date mis en avant les liens existants entre expériences quotidiennes et celles « extra »-ordinaires de violation des droits des femmes. Liz Kelly (1988) a développé il y a plus de trente ans l’approche de continuum, qui expose l’éventail très large de comportements et d’agissements violents, allant des formes les plus extrêmes de violence sexuelle aux manifestations les plus courantes de harcèlement ou d’abus (verbaux ou physiques) autour desquelles la vie des femmes est souvent structurée.
La chercheuse démontre le caractère omniprésent, indivisible et multiforme de la violence, qui s’exerce à toutes les étapes de la vie, dans les espaces publics ou domestiques, en temps de guerre comme en temps de paix. Le terme de continuum permet ainsi de « rendre visible ce que des situations apparemment différentes ont en commun » (Garance, 2016). Il met du lien, il crée des connexions entre des récits en plusieurs actes qui disent pour l’essentiel « la même chose » et qui peuvent dès lors être abordés comme un phénomène global.
Il est donc erroné d’affirmer que la violence est le fruit d’un acte privé. Le patriarcat s’impose et se stabilise par une politique de la violence publique. De nombreux mouvements féministes, en particulier latino-américains, se sont saisis de cette question et ont cherché, comme nous le verrons dans les pages qui suivent, à le complexifier et à le politiser, en faisant apparaître la dimension structurelle des dynamiques de pouvoir et en s’attaquant à l’impunité de la violence et à la négligence institutionnalisée des États, voire à leur complicité tacite.
La violence structurelle contre les femmes
dans une perspective intersectionnelle
La violence patriarcale a ses propres spécificités, mais pour l’aborder dans sa complexité, elle doit être articulée à d’autres structures de domination, telles que le mode de production capitaliste, particulièrement abusif pour les femmes, et la matrice coloniale, qui exerce des effets concrets et durables sur les territoires et les corps. Pour rendre compte de la dimension politique de la violence intersectionnelle et de genre, analysons à présent trois cas significatifs, celui du covid-19 et de la crise de la reproduction sociale, de l’extractivisme et de ses impacts et enfin celui des violences sexuelles comme stratégies de domination de groupes subalternes.
Crise de la reproduction sociale
Aborder isolément la domination patriarcale, la considérer comme l’« ennemi principal », conduit immanquablement à hiérarchiser les luttes et à lisser « la catégorie des femmes » sur le modèle des femmes blanches, hétérosexuelles, de la classe moyenne. Cette approche a conduit le féminisme majoritaire à méconnaître des combats qu’il percevait comme secondaires et à négliger d’autres femmes en révolte « contre leurs conditions de naissance » (Davis, 2020) ou contre des discriminations qu’elles subissaient. Le mouvement féministe n’a pas toujours eu – et n’a pas encore véritablement – conscience des différences de classe, ce qui a pu le rendre aveugle à l’exploitation et aux privations économiques qu’engendre le système capitaliste ; ni de certains de ses privilèges, ce qui l’a conduit à ne pas tenir compte des femmes et des hommes qui souffrent de violences racistes ou de préjugés liés à leur orientation sexuelle.
La violence est patriarcale, mais elle est « indissolublement liée au capitalisme néolibéral […] qui ne cesse de porter atteinte aux conquêtes sociales, d’ubériser, de précariser » (Vergès, 2020). Selon les chiffres d’ONU femmes, « quasiment les trois quarts des personnes vivant en dessous du seuil extrême de pauvreté sont des femmes » (Naves, 2020). Elle s’articule aussi à un « capitalisme racial » qui, lors de la pandémie de covid-19 s’est traduit notamment par la surcontamination des femmes « racialisées », indigènes et appauvries, en première ligne dans les métiers et rôles essentiels de soin (rémunérés ou non), ou de contact, derniers maillons des chaînes de production et d’approvisionnement. Cette crise a eu ceci d’inédit qu’elle a mis à nu et exacerbé à l’échelle mondiale les structures de violence qui reproduisent insensiblement de profondes injustices sociales.
En dépit d’un discours public euphémisant – « On est tous et toutes dans le même bateau » – alimentant l’illusion d’égalité devant le virus, le covid-19 a affecté différemment les groupes sociaux et amplifié les déséquilibres préexistants. Otamandi, Barroso et Calazans soulignent dans leur contribution à cet Alternatives Sud qu’au Brésil, les principales victimes de féminicides durant cette période ont été des femmes noires qui, d’« ordinaire », sont déjà « le segment de la population où se concentre le plus grand nombre de féminicides, en plus d’être celles qui souffrent le plus de la violence domestique et obstétrique, de la mortalité maternelle et de la criminalisation de l’avortement ».
Plusieurs enseignements sont actuellement tirés de cet épisode pandémique. Le premier, implacable et cynique, est que toutes les vies ne semblent pas avoir la même importance et que certains corps peuvent dès lors, plus que d’autres, être sacrifiés. Le second rappelle la prégnance et les implications de la division sexuelle du travail entre un travail productif1 à dominante masculine et un travail reproductif à majorité féminine. Dans cette répartition sexuée des rôles traditionnels, les hommes ont la main sur des métiers à forte valeur sociale ajoutée, mais de moindre utilité sociale. Tandis que les femmes occupent des métiers sous-valorisés, mais par ailleurs jugés « essentiels » pour la « production de vie » et pour « faire tourner l’économie ». Ici réside l’une des contradictions majeures du capitalisme, qui dénigre et sous-évalue celles dont il a besoin pour reproduire la force de travail et qui produisent une vraie richesse sociale (Farris, 2020).
Comme le souligne Follegati Montenegro et Ferretti dans cet ouvrage, un « résultat » de la vague féministe actuelle a été la critique soutenue d’une « série de situations profondément ancrées dans les pratiques culturelles et les structures sociales », ce qui a eu pour effets d’« augmenter la reconnaissance des cas de violence et d’élargir le sens commun en la matière ». Pour cette raison, « la violence contre les femmes et les corps féminisés intègre ainsi désormais la question de l’économie de la reproduction sociale comme fondement de la domination et de l’articulation des formes de violence faite aux femmes ».
L’extractivisme ou l’exploitation des femmes et des territoires
L’extractivisme est un modèle économique et politique violent, fondé sur la marchandisation et l’exploitation effrénée de la nature, à la croisée des logiques capitaliste, néocoloniale et patriarcale. Il s’opère sous l’impulsion d’entreprises, avec la complicité des gouvernements qui usent de multiples stratégies pour aboutir à leurs fins, telles que le recours à des milices armées ou l’adoption de lois ad hoc. Le contrôle des richesses, dans une logique d’« accumulation par dépossession » (Harvey, 2010), n’est pas neuf. Il a été au cœur d’entreprises prédatrices à travers le temps et trouve ses racines dans le processus de conquête et de spoliation des terres « vierges » et de leurs ressources par les colons, en Amérique latine, en Afrique et en Asie.
Ce processus d’extraction à grande échelle, en raison de ses effets « militaires, sociaux, politiques, idéologiques et culturels dans les territoires exploités » (Red Chilena, 2020), a perturbé les rapports sociaux, notamment de genre. La perte des espaces communautaires et des moyens de subsistance a ainsi impacté négativement les femmes, qui vivaient auparavant en interdépendance directe avec la terre et l’environnement. La réorganisation de l’économie locale autour de la place centrale de l’entreprise extractive s’est traduite par une recrudescence des schémas patriarcaux, des normes de genre inégalitaires et d’une division sexuelle accrue du travail et des espaces.
Les femmes se sont retrouvées confinées dans la sphère privée et cantonnées aux activités domestiques et de soin, celles-ci (production alimentaire, approvisionnement en eau et en énergie, etc.) étant rendues plus complexes au regard de la détérioration des lieux de vie. Leur dépendance économique s’est dès lors accentuée et elles ont perdu en autonomie, en mobilité et en prise de décisions.
Ce modèle de dépossession et de domination du territoire a imposé une discipline et un contrôle sur le corps des femmes par l’exercice de la violence. Plusieurs théoriciennes féministes et de nombreux mouvements de femmes paysannes, indigènes ou afro-descendantes, en lutte pour la « défense du territoire-Terre » (Falquet, 2017), ont envisagé le corps comme un territoire et dressé une analogie entre la domination de l’espèce humaine sur la nature et la domination des hommes sur les femmes. Même processus de division, de hiérarchisation dans les relations sociales et les rapports au monde. Une répartition binaire entre, d’un côté, la dévalorisation de la nature, des femmes, de la subjectivité, des émotions. De l’autre, la plus-value de la culture, des hommes, de l’objectivité et de la raison.
Selon cette logique, dans les zones extractives, territoires et corps – particulièrement ceux des femmes autochtones – ont été chosifiés et brutalisés, destinés à être conquis et sacrifiés sur l’autel du profit et de la croissance. La violence extractiviste s’est concrétisée par la pollution des eaux et des sols qui s’est répercutée sur les corps par la maladie et la mort ; elle s’est aussi matérialisée par les harcèlements, les agressions allant jusqu’aux féminicides afin d’intimider la population et la chasser des zones convoitées.
Loin de constituer des violences inédites ou exceptionnelles, celles-ci sont une nouvelle fois à placer dans un continuum qui est « au fondement des anciennes logiques coloniales comme des nouvelles » (idem). Les conflits sociaux-environnementaux, en augmentation depuis les années 1990, en particulier dans les régions du monde les plus riches en ressources naturelles (Amérique latine, Afrique subsaharienne, Asie du Sud-Est), ont réactualisé des stratégies prédatrices, des procédés opératoires dans lesquels la violence à l’encontre des femmes et des corps féminisés revêt une dimension instrumentale au service d’institutions comme l’État, les forces de l’ordre ou les multinationales.
Les analyses féministes portant sur les politiques extractivistes, au même titre que celles sur la crise du coronavirus, mettent le doigt sur un même problème et suggèrent une même issue de sortie. Elles dénoncent, à la manière de Follegati Montenegro et Ferreti dans ces pages, « la crise générale produite par le néolibéralisme et la nécessité de réorienter l’organisation sociale de telle sorte que la reproduction de la vie soit au centre des préoccupations et ne soit pas subordonnée à la “loi de la valeur” ».
Cette forme de résistance visant à « prendre soin » s’inspire de l’éthique du care qui désigne globalement la préservation, la réalité ordinaire du maintien de la vie, la réparation du monde. A contrario des sacro-saints préceptes de liberté et d’efficacité soutenus par la modernité et solubles dans la doxa néolibérale, cette approche insiste sur les conceptions de vulnérabilité, d’interdépendance et d’indispensabilité et les applique à l’ensemble des êtres humains et à tout ce qui dans notre environnement est fragile et doit être protégé.
Des violences sexuelles comme stratégies de domination de groupes subalternes
La violence sexuelle est une manifestation de la violence patriarcale qui se manifeste à la fois en termes physiques – harcèlement, abus sexuels, viols – et en termes symboliques. Le hashtag « MeToo », prolongement de la vague féministe « Ni Una Menos », a déversé sur les réseaux sociaux depuis 2017 un torrent de témoignages révélant des violences sexuelles omniprésentes à tous les étages de la société. Une parole libérée à l’échelle mondiale, même si dans certains pays, les mobilisations sont restées virtuelles, sans traduction collective concrète ni débats publics transformateurs. « Mon corps m’appartient », « Non, c’est non » sont des slogans qui ont repris vigueur et reçu une certaine écoute, mais le consensus politique affiché contre les violences s’est révélé illusoire par bien des aspects, inapte à remettre en cause la perpétuation de la domination masculine.
Si l’on porte un regard historique sur les violences sexuelles dans une perspective féministe et décoloniale, on remarquera que les auteurs et autrices s’accordent pour souligner que le patriarcat a « gagné en intensité » par l’entremise des États modernes et coloniaux, qu’il s’est façonné et renforcé par le biais de la violence structurelle. Dans cet ouvrage, Linda Mshweshwe relève ainsi qu’en Afrique du Sud, l’apartheid qui a permis « l’oppression des populations noires et leur soumission à une violence systématique », a par ailleurs « profondément bouleversé les relations de genre, engendrant des niveaux élevés de violence sexiste ».
Globalement, la violence sexuelle et de genre a joué un rôle central dans la « matrice de domination coloniale » (Perreault, 2015) et a constitué un outil du colonialisme d’État, un instrument qui a concouru au contrôle et à l’assujettissement de communautés et de peuples entiers. « À travers la violence sexuelle, le projet colonial a assis l’idéologie voulant que les corps autochtones puissent être violés impunément, de même que, par extension, les terres autochtones » (idem). Cette violence déshumanisante a ainsi créé une frontière, un marquage qui entretient la différence, qui se dessine dans les représentations sociales et qui ordonne le réel. Cette fabrication de l’altérité, cette production sans cesse renouvelée d’un « nous » et d’un « eux » est aujourd’hui encore à la base des divisions sociales dichotomiques qui prévalent par exemple dans le racisme, le sexisme ou l’homophobie.
Le viol a été, par-delà les lieux et les époques, une arme de domination physique et morale de l’autre, une arme d’intimidation et de répression à l’adresse des femmes – pour les punir et les discipliner –, mais aussi un « moyen de communication » à l’adresse des hommes rivaux ou subordonnés. Selon les théories de Segato, il a pu aussi être un discours dirigé vers les pairs perçus comme « les garants de la violence patriarcale et de sa reproductibilité » (2020), comme on le voit par exemple dans les gangs (maras) en Amérique centrale (Bahr, 2020). Dans ce schéma, la masculinité devient alors une sorte de statut qui s’obtient et se mérite en démontrant son agressivité et son pouvoir de mort.
Dans sa contribution à cet Alternatives Sud, Jyoti Diwakar analyse comment, en Inde, le sexe est utilisé par les communautés des castes dominantes pour affirmer leur pouvoir et « remettre à leur place » les contestataires. Dans les différends entre castes supérieures et Dalits marginalisés, notamment dans le cadre de litiges fonciers, les viols de femmes « intouchables » servent à rétablir un contrôle social sur la communauté dalit dans son ensemble, en particulier lorsque celle-ci fait valoir ses droits contre les hiérarchies de caste et de classe.
Les femmes étant considérées comme les gardiennes de l’honneur de la famille et de la caste, elles deviennent alors des cibles vulnérables de la violence intercommunautaire et ethnique. Lorsqu’une femme dalit est violée, « ce n’est pas un acte sexuel commis sur une personne, mais un acte de violation des droits humains du groupe social auquel elle appartient », nous dit Diwakar. La prise en compte des structures intersectionnelles – ici le « patriarcat brahamique » –, ainsi que le statut de l’agresseur et de la victime, sont donc indispensables à la compréhension de l’exercice de la violence et de la justice sélective qui s’ensuit.
Le genre est une composante essentielle de la politique de la violence qui se vérifie en temps de paix comme en temps de guerre. Comme dans la situation indienne évoquée, les violences sexuelles qui ont été infligées aux femmes yézidies, en Irak, en 2014, s’expliquent par des facteurs structurels multiples et entremêlés. Zeynep Kaya souligne ainsi dans son texte que des groupes radicaux, tels que Daech, se sont appuyés sur des normes morales et de genre spécifiques et sur des représentations identitaires et religieuses pour cautionner la violence. Située « à la périphérie de la périphérie », la minorité yézidie était déjà menacée et discriminée avant les attaques de l’« État islamique », en raison de l’absence de mécanismes de protection de la part du gouvernement irakien. La violence sexuelle dans ce conflit n’est donc pas un fait à part, autonome ou spontané, il s’inscrit dans la continuité des formes quotidiennes de violences et de discriminations vécues par les femmes et la communauté yézidies.
Cette violence sexuelle s’exprime également sans discontinuité dans les parcours des femmes migrantes, « comme l’une des raisons qui les poussent à migrer, mais aussi comme un élément continuellement présent dans leurs parcours migratoires ». Almudena Cortes, dans cet Alternatives Sud, revient sur les relations hiérarchiques de pouvoir qui caractérisent les espaces frontaliers et qui se retrouvent des deux côtés de la frontière.
Dans les contextes de départ, la féminisation de la pauvreté, la violence sexiste par l’époux ou la belle-famille, les mariages arrangés, les mutilations génitales placent les femmes en situation de vulnérabilité, en particulier lors de conflits armés où la violence sexuelle peut constituer une arme de guerre. Durant le voyage, le genre est un principe qui va, là aussi, organiser la mobilité des femmes. Sur la route, dans les campements ou durant la traversée des frontières, les violences commises par des hommes intermédiaires (garde-côtes, forces de l’ordre, autres migrants, etc.) sont courantes et participent d’un contrôle des espaces, des mouvements et des corps caractéristique de la gouvernance néolibérale.
Dans les trois situations évoquées – mettant en scène des femmes dalits, yézédies, migrantes ou réfugiées –, les violences sexuelles et de genre exercées contre les femmes ne sont jamais isolées ou marginales, elles s’articulent à des facteurs structurels. Elles sont constitutives de rapports sociaux inégalitaires et relèvent de rapports de pouvoir multiples. L’intersection de plusieurs systèmes d’oppression contribue dès lors à l’exacerbation des violences. Mais si la violence sexuelle est contrainte et subie, cela ne doit pas faire oublier que les femmes ne sont pas passives face à ce phénomène et font preuve d’« agencéité ». Par des stratégies individuelles ou collectives, elles tentent de supporter, résister et combattre ces violences.
Luttes et résistances contre les violences de genre
Le tableau sombre qui vient d’être brossé ne doit pas occulter les combats historiques menés par les mouvements de femmes, ni les avancées obtenues.
Avancées et limites des luttes institutionnelles
Sur un plan institutionnel, ces luttes ont conduit à une reconnaissance graduelle au cours des dernières décennies de la question des violences envers les femmes et à sa mise à l’agenda international. C’est en 1985, lors de la 3e conférence des Nations unies sur la femme à Nairobi, que fut dénoncé pour la première fois le caractère systématique de la violence contre les femmes. En 1993, avec la ratification par l’Assemblée générale de l’ONU, de la Déclaration pour l’élimination de la violence contre les femmes, les États se sont engagés à « assumer leurs responsabilités et à mettre fin à la violence à l’égard des femmes ». Celle-ci est désormais reconnue comme une négation des droits humains et s’inscrit, avec ce texte, dans le cadre d’une analyse structurelle de genre.
En 1996, la violence domestique est assimilée à une forme de torture, qui doit être sanctionnée légalement. Deux ans plus tard est créé le Tribunal pénal international contre les crimes de génocide, les agressions, les violations des conventions de guerre et les crimes contre l’humanité, qui incluent le crime de viol utilisé comme une arme de guerre et les grossesses forcées (Autre part, 2018).
Ce climat politique constructif qui prévalait dans les années 1990 et qui a conduit à des avancées notables s’est toutefois aujourd’hui détérioré. L’affaiblissement du multilatéralisme et la montée en puissance d’une coalition offensive d’acteurs étatiques et non gouvernementaux conservateurs se sont traduits par un recul en matière de droits des femmes et des filles, constaté par les Nations unies dans différentes régions du monde.
Des mobilisations réactionnaires en faveur d’un ordre sexuel « traditionnel » et contre les droits des femmes et des minorités sexuelles, qui avaient déjà vu le jour à la suite de la Conférence mondiale sur les femmes de Pékin (1995), ont pris une ampleur nouvelle dans les années 2010. Elles se sont combinées aux attaques lancées par le Vatican contre le concept de genre, que ce dernier entendait réduire à une « théorie » ou une « idéologie », et ont également trouvé un écho dans la politique officielle de plusieurs gouvernements ultranationalistes, ouvertement sexistes, racistes et homophobes, en particulier en Amérique latine et en Europe, mais aussi aux États-Unis et dans certains pays africains et asiatiques.
L’ONU a également tiré la sonnette d’alarme concernant les menaces qui pesaient sur la santé et les droits sexuels et reproductifs. Le droit de disposer de son corps est loin d’être un acquis pour les femmes. En Amérique latine, l’une des régions du monde les plus restrictives en termes de droit à l’avortement, sa légalisation est un domaine « où l’Église ne lâche pas prise et où le pouvoir patriarcal se crispe », nous dit Marta Lamas dans cet ouvrage. L’interruption volontaire de grossesse est ainsi seulement autorisée à Cuba, à Porto Rico, en Guyane, en Uruguay, dans deux États du Mexique et en Argentine depuis fin 2020. Partout ailleurs sur le continent, elle est pénalisée, sauf dans des situations d’« avortement thérapeutique » et, selon les cas, après un viol. Dans ces contextes hostiles, la majorité des avortements sont pratiqués dans l’illégalité, mais toutes les femmes ne sont pas exposées aux mêmes dangers pour leur vie et leur santé.
La légalisation totale de l’avortement est l’une des revendications les plus anciennes du mouvement féministe et constitue, là où elle a été obtenue, l’aboutissement de plusieurs décennies de combats. Sur cette question qui crispe plus que toute autre, il transparaît avec évidence que le système patriarcal pèse sur les structures politiques et que la domination masculine est institutionnalisée à travers le langage et le fonctionnement de la loi. Dès lors, si les lois peuvent constituer des avancées et des garde-fous importants, celles-ci nécessitent d’être soumises à un examen féministe, pour corriger les failles et les manquements, mais aussi pour déconstruire les systèmes de valeurs dominants qui les traversent.
À l’ère du numérique, les cadres juridiques sont également défaillants face au harcèlement sexiste en ligne et à la cyberviolence. Gurumurthy et Jha relèvent ainsi dans leur contribution qu’en Inde, « le système judiciaire […] a conservé son obsession pour les traditions d’“honneur” et les préoccupations dépassées pour tout ce qui relève de l’“obscène”, du “vulgaire”, de la ‘“lascivité”, etc., tout en reléguant au second plan ce qui touche à la vie privée, au consentement et à la dignité des femmes ». Les deux autrices concluent dès lors, elles aussi, que « la loi doit être considérée comme un champ de bataille » pour les féministes.
Mobilisations féministes contre les violences de genre
L’État façonne les structures mentales à travers les institutions et concourt à la (re)production d’un ordre symbolique, et ce faisant, d’un ordre social. Les institutions, si elles peuvent participer de la solution, demeurent néanmoins pour de nombreuses féministes, des actrices susceptibles de produire certaines formes de violence. La violence institutionnelle contre les femmes, comprise comme une manifestation de la violence patriarcale au sein des institutions de l’État, se décline de multiples façons : non-respect des conventions internationales, absence de politiques publiques pour prévenir, éradiquer et punir les violences, droits fondamentaux bafoués (comme l’accès à des soins de santé), violences policières, misogynie dans l’appareil judiciaire, etc.
« L’institution étatique est donc loin de jouer un rôle mineur dans l’organisation et la perpétuation de la violence contre les femmes » (Vergès, 2020). Elle n’est pas un organe neutre au-dessus des rapports de domination. Elsa Dorlin estime que l’État est « le principal instigateur des inégalités et qu’il est vain de lui demander justice, car il est précisément l’instance première qui institutionnalise l’injustice sociale » (Dorlin, 2019). Cette condamnation, qui fait écho aux paroles d’un « violeur sur mon chemin » du collectif Las Tesis, explique la raison pour laquelle de nombreux mouvements féministes estiment illusoire de vouloir réformer la société par la seule action de l’État. Seules la résistance et la mise en place d’un rapport de force permettent, selon elles, l’obtention et l’exercice effectif de nouveaux droits.
La première manifestation « Ni Una Menos2 », en mai 2015 en Argentine, s’est inscrite dans cette logique. Elle a réuni 300 000 personnes et a marqué le point de départ d’un nouvel élan de mobilisation contre les violences et les discriminations faites aux femmes, parfois qualifié de « quatrième vague » ou de « révolution féministe ». Plusieurs mouvements massifs de femmes contre les violences avaient déjà émergé sporadiquement dès le début des années 2010, comme en Inde, suite à l’affaire sordide d’un viol collectif à Delhi en 2012, mais vers le milieu de la décennie, Ni Una Menos s’est pérennisé et s’est propagé au reste de l’Amérique latine, avant de s’étendre au-delà du continent.
La quatrième vague a ceci de spécifique, selon Aurore Koechlin (2019), qu’elle forme une sorte de synthèse des deux précédentes vagues féministes, en cherchant à en dépasser les contradictions. De la deuxième vague, elle retient la forme massive des mobilisations et la teneur de certaines revendications. En plus de la lutte contre les féminicides qui embrasent le mouvement et soulèvent une indignation généralisée, ce renouveau féministe place au cœur de ses revendications l’éducation non sexiste et la question des droits sexuels et reproductifs, notamment celle, centrale, du droit à l’avortement, qui avait fédéré une partie du mouvement féministe dans les années 1970. De la troisième vague, elle hérite de l’analyse critique de la catégorie « femmes » et prend en compte l’imbrication des formes d’oppression (race, classe, genre…) qui influe de façon déterminante sur la manière dont vivent les femmes et dont elles sont perçues par la société.
La « révolution féministe » à l’œuvre tente ainsi de dépasser certains travers de l’approche intersectionnelle qui, dans certains cas, effaçait les traces des analyses matérialistes de la domination de genre et de « race » et en arrivait dès lors à cliver en essentialisant les positions sociales « dominant/dominé ». Elle vise à défaire « un système intégré et combiné des différents rapports de domination ancrés dans l’histoire et les sociétés considérées (classe, race, genre), produits et reproduits par des structures économiques, sociales et politiques (État, justice, police). Ce système intégré a pour base matérielle un mode de production et un mode de reproduction qui sont corrélés » (Koechin, 2019).
Pour s’attaquer à ce système, la quatrième vague pose, davantage que les générations précédentes, la question de la stratégie. Elle met en évidence « la trame économique de la violence patriarcale » (idem) et place la question du travail au cœur des préoccupations – rémunéré ou non, productif ou reproductif – et recourt à la grève, comme outil de contestation.
La grève féministe n’est pas une forme inédite de protestation sociale. Des appels avaient déjà été lancés par le passé, mais elle prend toutefois un tour nouveau. Le 8 mars 2017, pour la première fois, à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, des organisations d’une cinquantaine de pays se coordonnent et se mobilisent pour une « journée sans femmes ». Le succès est colossal et ira grandissant au fil des ans. Dès l’édition 2018, des millions de femmes seront à l’arrêt et occuperont les rues.
La lutte contre les violences de genre et la précarisation de la vie des femmes ont été des ferments d’unité et ont rassemblé de larges secteurs sociaux, comme on a pu le voir au Chili. Le slogan « Jusqu’à ce que la vie vaille la peine d’être vécue » témoigne de cette préoccupation de récupération d’une « souveraineté collective » sur les conditions d’existence et la vie, afin de ne pas aboutir au « désastre auquel conduit le projet néolibéral, extractiviste et patriarcal » (Follegati et Montenegro).
Plus globalement, l’élan féministe autour et dans le sillage de Ni Una Menos traduit « l’émergence d’une politisation féminine et d’un nouveau type de participation politique » (Le Monde, 2020). La performance de Las Tesis, « Un violeur sur ton chemin », en est une expression forte. L’objectif du collectif visant à retranscrire dans un langage accessible, créatif et artistique, certaines thèses féministes, a offert à un public élargi des clés de compréhension quant aux enjeux et aux aspects structurels des violences et des inégalités de genre. La viralité et la massivité du mouvement ont reflété la centralité de cette problématique dans tous les champs de la vie sociale et l’urgence de repenser et réorganiser les rapports de production et de reproduction, condition indispensable à l’émancipation des femmes et des minorités de genre.
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