Table ronde sur les perspectives de forums sociaux mondiaux à l'Université d'été des mouvements sociaux et de solidarité - Bobigny France, 27 août 2023 @ Luna Choquette Loranger

Jade Saint-Georges, participante à la délégation jeune à l’UÉMSS et Ronald Cameron, rédacteur au JdA-PA

L’UÉMSS a abordé les démarches de certains FSM pour 2023 et 2024.  D’abord, le 16e FSM en février 2024 à Katmandou le FSM des intersections en mai 2025 àMontréal, et le FSM Éducation à l’automne 2024 à Marrakech.


Cet article présente le contenu des ateliers qui ont porté sur les prochains forums sociaux mondiaux. Ces ateliers étaient à l’initiative du Centre de recherche et d’information sur le développement (CRID), ATTAC France, Caritas International, AlterGen, Katalizo (Québec), le Journal des alternatives – Plateforme altermondialiste (Montréal), Forum marocain des alternatives sociales (FMAS), dans le cadre de l’Université des mouvements sociaux et des solidarités (UÉMSS).


L’UÉMSS n’a pas manqué d’aborder les démarches de Forums sociaux pour 2023 et 2024.  D’abord, le 16e Forum social mondial aura lieu du 19 au 25 février 2024 à Katmandou. Un Forum social mondial thématique sur les intersections est aussi prévu en mai 2025 à Montréal. Par ailleurs, un atelier a porté sur un Forum mondial Éducation prévu à l’automne 2024 à Marrakech. Tous ces rendez-vous sont prévus être en personne, mais des moyens seront mis en place pour la participation à distance.

Le FMS 2024 au Népal : la continuité d’une tradition de plus de vingt ans

La tradition des Forum sociaux mondiaux a débuté en 2001 afin de permettre un espace de rencontre pour les mouvements sociaux du monde entier. Le prochain FSM de février 2024 se tiendra sur le continent asiatique au Népal. Petit pays de 30 millions de personnes, il est situé entre la Chine au Nord et l’Inde au Sud, ce qui correspond au tiers de la population mondiale qui vit dans cette partie du globe. La démarche pour la tenue de ce FSM au Népal est amorcée depuis plus d’un an, alors que la tenue du Forum social Asie-Pacifique (APSF) a eu lieu en février 2022 à Bangkok en Thaïlande. Il a constitué une sorte de répétition générale de mobilisation en vue de l’échéance de 2024.

Un enjeu particulier du FSM de Katmandou concerne justement la participation chinoise et indienne. Une préoccupation majeure des groupes asiatiques initiateurs du projet est de garder la porte du dialogue ouverte avec les mouvements et réseaux indépendants de masse de ces pays, tout autant que de pas les mettre en difficulté dans leur pays du fait de leur participation. Par ailleurs, la volonté de protéger l’autonomie de l’événement a été l’objet de discussions entre le Conseil international du FSM et les groupes initiateurs asiatiques, pour convenir de ne pas faire du FSM un exercice de dénonciation de la Chine ou de l’Inde, tout en permettant la tenue d’ateliers qui puissent jouir d’une totale liberté d’expression.

Par ailleurs, il est nécessaire de mettre en place des espaces de dialogues ouverts, sans compromettre l’installation d’espace sécuritaire pour tous et toutes et non oppressants. Une piste en ce sens est d’instaurer des espaces en non-mixité en dehors des espaces de dialogues ouverts, comme ce fut le cas à l’UÉMSS. À cet effet, il peut être intéressant de s’inspirer d’initiatives que nous avons au Québec, comme Grand dialogue régional pour la transition qui s’appuie notamment sur ces principes.

À ce jour, 400 réseaux, organisations et mouvements sociaux de différents secteurs de la société asiatique appellent à participer au FSM 2024 au Népal. Un grand nombre d’organisations de masse sont au rendez-vous. Rappelons que le FSM de 2006 en Inde a réuni 150 000 personnes à Mumbaï en Inde.. On doit s’attendre à une mobilisation sociale et communautaire non seulement importante en nombre, mais aussi très diversifiée.

Le Forum social mondial des intersections à Montréal en 2025

L’atelier sur les perspectives des FSM à l’UÉMSS visait aussi à présenter le projet de Forum social mondial des intersections (FSMI) prévu à la fin du printemps 2025 à Montréal. Le FSMI vise à reconnaître – depuis le concept d’intersectionnalité – le croisement des systèmes d’oppression. Plus encore, cet espace a également pour ambition de rappeler l’importance des intersections positives et des apprentissage croisés entre cultures, espoirs, pratiques, expériences, etc.

Comme l’a souligné Carminda MacLorin, directrice du réseau international Katalizo qui a son siège principal au Québec, le FSMI vise à susciter des changements systémiques dans une perspective transnationale et de bâtir dans une culture politique transnationale de la complémentarité basée sur respect, le soin et l’amitié transnationale.

Parmi les enjeux spécifiques du FSMI, on retrouve la question des visas, qui s’ajoute à la distance pour les personnes provenant des pays du Sud global. Ajoutons aussi dans l’équation, les absences prolongées qui peuvent être plus difficile, notamment pour les femmes hors des élites. Ceci s’ajoute à d’autres enjeux qui sont restés dans l’angle mort des personnes participantes de l’atelier. Parmi les démarches porteuses pour le FSMI de 2025, c’est de permettre, en plus du format hybride, le soutien à la réalisation d’activités délocalisées et simultanées hors du Québec ou du Canada.

Le Forum mondial en éducation 2024 à Marrakech

Un Appel pour un Forum social mondial en éducation en 2024 au Maroc fut également présenté à Bobigny au cours de l’UÉMSS. Déjà quelques organisations ont exprimé leur soutien, dont notamment la Campagne mondiale pour l’Éducation, la Campagne arabe pour l’éducation pour toutes et tous, Alternatives, Atergen, Intercoll, la Campagne pour l’éducation aux adultes en Amérique latine.

Un premier appel invite les collectifs, réseaux et organisations du monde de l’Éducation comme des mouvements sociaux de la planète, à se mobiliser sur un projet de Forum social en éducation. L’orientation proposée concerne entre autres la valorisation de la diversité en éducation, des différentes formes d’apprentissage, du droit à l’éducation tout au long de la vie et de la valorisation de l’éducation populaire et à la citoyenneté.

Le FSMÉ vise à construire un plaidoyer fort en faveur des autres éducations, à l’intérieur et à l’extérieur des systèmes scolaires traditionnels. Nous pouvons créer un mouvement qui encourage la prise de conscience collective des enjeux multiples auxquels nous sommes confrontés et qui favorise l’action citoyenne. Ce combat en faveur d’une éducation alternative et inclusive est essentiel pour l’avenir de notre planète et de ses habitants.

Des enjeux communs à tous les FSM

Un enjeu essentiel de tous les FSM est le renforcement et la nécessité des dialogues constructifs. Nous ne vivons pas dans un monde bienveillant, et même les espaces dit de solidarité ne sont pas libre d’oppression et d’exclusion. Certan·e·s collègues ont d’ailleurs senti cette semaine lors de l’UÉMSS qu’ielles ne pouvaient pas exprimer librement leur point de vue et pensée complexes et nuancés lors de certains ateliers. Il s’agit d’un défi si on veut mettre en œuvre des changements sociaux structurant pour un monde plus juste et écologique.

Dans la même veine et pour assurer la participation la plus large possible, en particulier des populations les plus socialement et historiquement marginalisées, les échanges de l’atelier ont abordé comment faciliter et encourager la participation des mouvements des Suds. Il importe de garder en tête cet aspect de la réalité des forums qui accueillent des participant.es venant des contextes privilégiés.

Or, un des rôles des organisations occidentales dans le cadre des FSM et plus particulièrement du FSMI pourrait être de réunir et partager des ressources – notamment financières – pour la participation d’organisation hors Occident. Par ailleurs, au-delà du partage des informations, les comités d’organisation en s’appuyant sur les organisations occidentales doivent assurer une participation la plus élargie possible dans le processus d’élaboration et d’organisation de l’évènement, afin de couvrir les intérêts et besoins d’une diversité de mouvement, notamment dans les pays du Sud Global. La diversité doit également aller plus loin que l’origine et la situation géographique, mais inclure un souci d’« integénérationnalité », sans oublier les populations les plus marginalisés des différents contextes puisque leurs luttes bénéficient généralement de moins de ressources et de visibilité et que ces espaces se doivent d’en être qui font tout pour rééquilibrer ces rapports inégalitaires.