Imelda Njiki, membre du collectif Jeunesse du FSMI
Une assemblée des résistances s’est mise en place dans le cadre des assemblées des intersections du FSMI le samedi 31 mai à la Maison du citoyen Joseph-François Perrault. L’objectif : dénoncer les actes outrageux du capitalisme d’une part, et, d’autre part, proposer des pistes d’idées pour s’insurger contre le système économique mondial en place.
C’est dans des sous-groupes de cinq personnes que des alternatives de contre-pouvoir pour ébranler le capitalisme ont émergé. Pour rappel, le capitalisme voit le jour vers le 16e siècle et a comme effet pervers l’impérialisme, à travers la conquête et la domination de nouvelles terres occupées par d’autres peuples.
Un témoignage de la Guadeloupe
Nina, jeune Guadeloupéenne présente à l’assemblée, témoigne des enjeux environnementaux et économiques auxquels est confrontée la Guadeloupe depuis plusieurs années. En effet, en 1993, l’utilisation de pesticides, en particulier le chlordécone, utilisé dans les bananeraies, a largement contaminé les sols, l’eau et la faune, entraînant des problèmes sanitaires et des restrictions pour la pêche.
Aujourd’hui, la révolution des nouvelles technologies entraîne un besoin toujours accru d’exploitation des sols, des sous-sols et de la recherche de terres rares riches en matériaux exploitables — d’où la naissance du capitalisme extractiviste. Si l’on parle de pôles de résistance, c’est que, de l’autre côté de la barrière, se pose une menace à l’égalité sociale, au bien-être environnemental et à la paix.
L’extractivisme, un néocapitalisme
Le 21e siècle est marqué par une révolution technologique et un mouvement vers la durabilité, à travers une transition énergétique importante, qui justifie parfois à tort la recherche effrénée de terres rares en vue d’y mener des activités d’extraction minière. En effet, les énergies renouvelables sollicitent d’énormes quantités de matériaux rares à travers leur exploitation (Catherine Viens, 2023). Ce procédé d’extraction de la biomasse se nomme «extractivisme». C’est un concept qui voit le jour en Amérique du Sud vers la fin du XXe siècle.
Il examine, d’un point de vue critique, l’industrie des ressources naturelles, un secteur accaparé par les pays du Nord global et la Chine (Langlois, Magana, Rolando, 2023), au détriment des pays d’Afrique subsaharienne, d’Afrique du Nord, d’Asie occidentale et orientale (Catherine Viens, 2023).
Ce concept met en évidence le rapport de domination et de dépendance qui perdure. D’une part, les pays du Nord possède le pouvoir politique et économique au plan de la consommation et de la transformation des produits de l’extraction. D’un autre côté, le Sud, producteur, dont les contrats d’extraction reposent sur des relations sociales et économiques inégales.
Les pays périphériques (Sud) assurent le mode de vie des pays du centre (Nord). Cependant, certains Territoire du Nord occupés par des peuples autochtones sont également confrontés à des enjeux territoriaux liés à l’installation de projets sur des terres traditionnelles, sans leur consentement libre et éclairé.
La supercherie des pays occidentaux
Aujourd’hui, on se rend compte de la supercherie des pays occidentaux, masquée par l’incitation à exploiter les ressources minières sous prétexte de favoriser la relance économique des pays du tiers-monde et de leur permettre de rembourser leur dette. Ce discours incitatif mène à l’établissement de réformes où l’État n’est plus souverain sur son propre territoire, afin de garantir un climat favorable à l’exploitation.
Ce «climat favorable» consiste, en réalité, en des réformes où il n’existe ni contrôle rigoureux, ni lois ou sanctions obligeant la population consommatrice à endosser ses responsabilités. Résultat : les multinationales minières n’assument presque jamais les devoirs liés à leurs activités sur le terrain, notamment en matière de respect des populations locales. L’État, n’ayant plus le pouvoir de réguler, se retrouve dans un rôle de pseudo-facilitation et d’observation (Boni Campbell, 2008).
La surexploitation des ressources minières est par ailleurs souvent génératrice de dynamiques de violence. Le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) estime que plus de 40 % des conflits internes sont liés aux ressources naturelles (Viens, 2023). C’est le cas notamment à l’est du Congo, au Nord-Kivu, où perdure une guerre civile depuis 1994, en lien avec l’extraction du coltan, et qui a causé, à ce jour, près de 5 millions de morts en 30 ans.
Dans ce type de contexte, les droits humains sont bafoués et les femmes en sont les principales victimes. Des féministes témoignent que l’arrivée des travailleuses et travailleurs miniers est une porte ouverte aux maladies sexuellement transmissibles, à la prostitution, aux grossesses adolescentes, aux abus et à la violence sexuelle (Catherine Viens, 2023).
On peut voir le capitalisme extractiviste comme un système économique basé essentiellement sur la conquête des terres minières et l’accumulation des richesses. Il peut aussi prendre diverses autres formes, notamment en ce qui concerne le capital humain et les politiques incitatives en matière d’immigration. Il est cependant essentiel de penser au post-capitalisme et aux moyens de mettre en place des pôles de résistance.
Angles de résistance : le post-capitalisme
L’exploitation extractiviste fait l’objet de dénonciations intersectionnelles dans les milieux académiques et militants. Elle croise diverses formes de lutte, notamment l’écologie, la décolonisation et l’anticapitalisme.
Pendant l’assemblée des résistances tenue dans le cadre du Forum Social Mondial des Intersections, plusieurs propositions ont été émises dans le but de créer un nouveau système économique capable de remplacer le capitalisme. Parmi ces propositions :
- Écouter la voix des personnes les plus affectées par l’industrie capitaliste, notamment les femmes et les personnes marginalisées;
- Créer une économie sociale et locale;
- Décoloniser nos savoirs sur certains enjeux;
- Éduquer les populations;
- Utiliser les réseaux militants, comme celui du FSMI, pour organiser une grève mondiale et faire plier le capitalisme.
Étant donné les besoins actuels en énergie, les activités extractivistes ne sont pas près de s’arrêter. Pourtant, si elles continuent sur cette lancée, cela aura des conséquences graves sur la biomasse. D’autant plus que leur extraction rapide et continue empêche la biodiversité de se régénérer.
Une solidarité internationale, transnationale et translocale doit s’imposer pour contrer les effets du capitalisme, à travers l’action toujours plus forte des mouvements sociaux. Il est également important de faire porter au capitalisme et aux multinationales le poids de leur responsabilité, afin de mettre un véritable STOP aux ravages environnementaux et aux inégalités socioécologiques et économiques en recrudescence.