Les réfugiés, victimes du militarisme

Pierre Jasmin, Le Devoir, 18 juillet 2018

Face à l’inhumanité de l’extrême droite, amplement démontrée aux États-Unis par la séparation d’enfants réfugiés de leurs parents et par l’hostilité de l’Italie face aux boat people d’Afrique, les médias du monde ne préconisent que des solutions humanitaires. Alors qu’ils creusent les conflits en diabolisant les « méchants » Hussein, Kadhafi, al-Assad, Poutine, Maduro ou Ortega tout en épargnant les dictatures alliées des Américains au Honduras, au Salvador, au Guatemala, en Arabie saoudite, au Qatar, au Myanmar ou aux Philippines, le Mouvement québécois pour la paix leur propose quatre sujets de réflexion sur le militarisme, source indéniable de l’épidémie de réfugiés.
Trudeau a l’intention d’augmenter de 73 % les dépenses militaires du Canada (jusqu’à plus de 30 milliards annuels) pour se plier à l’exigence des 2 % du PIB national que cherchent à lui imposer l’OTAN et Donald Trump. Ce dernier arme son propre pays grâce à des dépenses militaires qu’il vient de porter, avec l’aide du Congrès, à environ 2300 $ par habitant, encourageant par ailleurs les armes individuelles. Notre gouvernement veut prélever des centaines de dollars sur nos impôts pour des armes militaires offensives qui détruiraient maisons et villes et mettraient sur les routes de l’exil davantage de réfugiés. Cette intention de Justin Trudeau, hélas partagée par les conservateurs d’Andrew Scheer, peut être infirmée par une pression populaire, comme cela a été fait en 1993, avec l’aide des médias, à l’égard du gouvernement Kim Campbell.
Il y a pire que la secrète corruption aggravée par les paradis fiscaux des industries militaires : il y a les morts causées par les interventions de l’OTAN. Ses bombes ont tué des dizaines de milliers de civils en Afghanistan, en Irak et en Syrie et détruit deux hôpitaux tenus par les médecins sans frontières dirigés par l’urgentologue montréalaise Joanne Liu. L’ONG Humanité et Inclusion fait circuler une pétition signée par près d’un demi-million de personnes dénonçant les bombardements et affirmant que « bombarder des civils, ce n’est pas faire la guerre, C’EST COMMETTRE UN CRIME ». En 2011, l’OTAN a trahi le mandat de protection de Benghazi confié par le Conseil de sécurité de l’ONU en choisissant plutôt de bombarder toute la Libye de Kadhafi. L’OTAN a laissé ses dépôts d’armes tomber entre les mains de groupes islamistes qui ont répandu la terreur en Afrique du Nord jusqu’au Nigeria. Le général canadien commandant les attaques aériennes de l’OTAN a été récompensé en étant nommé à la tête ($) de Lockheed Martin Canada.
Lockheed Martin USA fabrique non seulement les avions furtifs F-35, au coût exorbitant, mais aussi des bombes nucléaires. Or l’OTAN brandit la menace terroriste de ses armes nucléaires jusqu’en Turquie, pays membre, où Erdogan consolide son emprise et agresse les Kurdes jusqu’en Syrie. L’OTAN a forcé tous ses pays membres, dont le Canada, à refuser, comme l’ont fait les pays nucléarisés — Russie, Chine, Israël, Inde, Corée du Nord et Pakistan —, de soutenir le Traité d’interdiction des armes nucléaires.
Avancé par l’ambassadrice d’un rare pays sans armée, le Costa Rica, ce traité fut approuvé à l’ONU en juillet 2017 par 122 pays courageux et indépendants. L’International Campaign to Abolish Nuclear Weapons (ICANW.org) a reçu le prix Nobel de la paix, déléguant à Oslo une survivante d’Hiroshima, la Canadienne Setsuko Thurlow, pour le recevoir. L’organisme vient, après le sommet de Singapour entre Donald Trump et Kim Jong-un, de soumettre un plan ambitieux en vue d’une VÉRITABLE paix dénucléarisée.
La Désunion européenne arrive à un accord bancal qui rejette les migrants sur les côtes de la Libye au moment tragique où le Haut Commissariat pour les réfugiés (ONU) évalue leur nombre (en hausse) à 68,5 millions de victimes. Rappelons que l’achat et le prolongement projeté au montant de 12 milliards de dollars du pipeline Kinder Morgan par les libéraux répondent à une commande de la Chine énergivore (Nexen) et à la demande accrue de pétrole par son plus gros consommateur mondial : l’armée américaine et son extension, l’OTAN. L’exploitation des sables bitumineux, le plus grand facteur localisé de réchauffement climatique, fait fondre les glaces des pôles et provoque la montée des eaux et le déchaînement d’ouragans qui augmentent le nombre et la détresse des réfugiés.
Revenons, en conclusion, sur nos premières constatations : des milliers de réfugiés se noient chaque année dans la Méditerranée en fuyant la Libye et la Syrie, victimes récentes de l’OTAN. Cet organisme militariste pousse ses pays membres, comme le Canada, à accroître leurs dépenses militaires, à refuser de signer le Traité d’interdiction des armes nucléaires, et a été reconnu coupable de nombreuses morts civiles, donc d’une diminution de la sécurité mondiale. De plus, ses activités accroissent le réchauffement climatique. C’est pourquoi nous poursuivons avec détermination et constance notre campagne humanitaire antimilitariste « Canada, hors de l’OTAN ».

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