Trump, la droite radicale et la gauche au Québec

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Le 21 février dernier s’est tenu un panel organisé par le réseau Révolution écosocialiste, avec pour sujet une question qui a alimenté bon nombre de réponses ; comment la gauche québécoise envisage-t-elle la bataille avec l’extrême droite ?  

Amir Khadir, Karine Cliche, Andrés Fontecilla, Josée Chevalier et André Frappier ont apporté leur vision d’une gauche à reconstruire, face à la menace imminente d’une droite radicale sans limites dirigée par Donald Trump. Ce panel, composé de cinq membres du parti Québec solidaire (QS), fut l’occasion de faire le point sur l’avenir politique du parti, à l’heure des grands bouleversements de notre société par la droite, et à celle de la remise en question des expertises.

Bien que les peuples dominés vivent une « onde de choc et d’effroi » affirme Amir Khadir, cette peur a des répercussions sur la population de « classe moyenne ». Malgré l’approche de Trump axée sur le privilège des richesses pour les milliardaires et l’appauvrissement des autres, monsieur Khadir appelle au calme ; « Il ne faut pas tomber dans le piège d’être devant un obstacle insurmontable, puisque le discours de Trump possède en lui-même beaucoup de failles et de faiblesses ».

Devant un public de près d’une centaine de personnes, les cinq invités ont, à leur tour, proposé leurs solutions, leurs recherches et leurs objectifs en vue de faire face à ce mastodonte américain, dont plusieurs croient qu’ils ne pourra pas tenir ses promesses bien longtemps. 

Tour de table

Andrés Fontecilla, député solidaire à Montréal, a profité de cette tribune pour faire un bref retour en histoire sur la montée de la droite par le passé, en qualifiant la présente droite de « réactionnelle ». Une droite qui prétend faire rêver les fidèles quant au désir de revenir dans un passé qui n’a jamais existé. Cette droite réactionnelle fait opposition à la traditionnelle droite « conservatrice », qui a fait rage dans les années 80, avec la montée du néo-libéralisme.

Amir Khadir mentionne qu’aujourd’hui, cette peur est en partie due au rôle des médias qui, par son narratif de la situation, présentent cette stratégie et qui « portent la marque de ce capitalisme avancé ».

Karine Cliche, candidate de QS, présente la gauche actuelle comme une gauche éteinte, peu active en raison de la perte de motivation et d’espoir par les militants. Cette flamme se doit de rester allumée, car en ce moment, dit-elle, « même une gauche beige paraît extrémiste ». À ce sujet, monsieur Khadir rappelle que ce sont « toutes les propositions de centrisme politique qui finissent par faire le jeu de la droite ». Mais « Québec solidaire a progressé lors de la montée des mouvements socialistes », précise-t-il.

Madame Cliche souhaite que le parti demeure le principal véhicule de gauche, et qu’il conserve ses valeurs écologiste, féministe et antiraciste. Elle parle d’initiatives qui peuvent permettre le rassemblement de la gauche québécoise ; « Il faut réseauter, travaillons sur la capacité de transmettre nos idées, la gauche est diversifiée, multiple, c’est à notre avantage ». La candidate mentionne la cause climatique comme pilier de la bataille, soulignant que cette cause permet de lutter contre ce capitalisme de ressources, duquel découlent la pauvreté et les inégalités sociales.

La candidate Josée Chevalier, quant à elle, s’est concentrée sur la cause féministe aux États-Unis ; « Si les femmes n’ont pas le contrôle de leur vie, elles deviennent des citoyennes de second rang et cela contribue à leur appauvrissement ». Elle fait un rapprochement avec la crise féministe que le parti a traversé dans les dernières années, à la suite du départ  de Catherine Dorion et d’Émilise Lessard-Therrien. Ces deux députées phare ont dénoncé un manque d’écoute envers les femmes. Une occasion de rappeler, dit-elle, que l’on se doit de les écouter.

Enfin, André Frappier, militant et membre du parti depuis sa création, a abordé la position de Québec solidaire dans l’échiquier politique ; « QS essaie d’être populiste, et ce n’est pas notre terrain ». Il insiste sur le « retour aux revendications qui ciblent les responsables, les multinationales ». Il appelle de plus à lier les causes sociales du mouvement ouvrier au Québec et au Canada et également avec les populations autochtones ; « Il faut créer une vision internationaliste du Québec, et non une bulle locale où nous sommes heureux ».

Un débat tous azimuts

Certaines questions en ont alimenté d’autres auprès de l’audience. Un spectateur propose la subvention de l’alimentation de base. Un autre se dit déçu du virage centriste qu’a pris le parti dans les dernières années, et l’appelle à ne pas chercher à tout prix l’acceptabilité des grands médias ; « Québec solidaire doit se battre pour aller chercher la respectabilité de toutes et de tous ».

Un père a mentionné les actions de sa fille, une militante de gauche qui vit de l’anxiété, qui a cherché des solutions auprès d’économistes, de droite. On rejette l’idée de la privatisation des réseaux, on souhaite multiplier les espaces communs, on déplore l’absence de la question de l’indépendance, qui refait doucement surface après des années de silence.

Quelles solutions ?

Amir Khadir se voit convaincu que cette assemblée du 21 février « amorce une réflexion dans une certaine direction » et est une occasion en or de se retrouver en personne. Il insiste sur la présence humaine et non numérique, de sorte à casser ce lien asynchrone normalisé par la pandémie.

Madame Chevalier, quant à elle, mise sur le contrôle de la liberté d’expression, en mentionnant le contrôle de la classe dominante sur les sujets couverts par les médias de masse. Monsieur Fontecilla demande l’investissement dans les lieux de pouvoir. Et André Frappier souhaite interrelier les causes entre elles, sans qu’elles ne soient nécessairement identiques.

Avec ces solutions, conclut monsieur Khadir, « cela devrait permettre à Québec solidaire d’enrichir son discours d’une critique réelle, solide du capitalisme ».