Médiapart, par François Bougon, 7 décembre 2021
Le militant hongkongais Au Loong-Yu réside temporairement à Londres, alors que sa ville, région semi-autonome de la Chine, subit une vaste répression. Auteur de « Hong Kong en révolte », un ouvrage sur les mobilisations démocratiques de 2019, cet auteur marxiste est sévère avec ceux qui célèbrent le régime totalitaire de Pékin.
À bientôt 65 ans, Au Loong-Yu est un spécimen rare : un auteur marxiste d’une lucidité peu fréquente sur le Parti communiste chinois, un analyste capable de mettre au jour le système totalitaire qui a malheureusement les faveurs d’une certaine gauche occidentale aveuglée par un anti-américanisme primaire, au point notamment de nier les crimes contre l’humanité à l’encontre de la minorité musulmane de la région du Xinjiang.
Les éditions Syllepse ont publié en mai 2021 son dernier ouvrage, Hong Kong en révolte, qui porte sur la mobilisation sociale de 2019 dans l’ancienne colonie britannique. Dans son texte, il donnait au territoire semi-autonome cinq à dix ans de répit avant d’être totalement asservi par la République populaire de Chine. Dans la réalité, cela a pris un an, sous la double peine de la pandémie et de la loi sur la sécurité nationale (LSN) adoptée en juillet 2020. Là où les thuriféraires de Pékin dénoncent un complot ourdi par la CIA, lui, le Hongkongais internationaliste qui refuse tout nationalisme, décrypte un engagement d’une multitude de secteurs et d’organisations aujourd’hui en danger.
Militant pour les droits des travailleurs et travailleuses à Hong Kong et en Chine continentale, il a été l’un des piliers du China Labor Net et du Globalization Monitor, deux sites basés à Hong Kong, avant d’en laisser les rênes il y a quelques années. Depuis Londres, où il réside temporairement, il était de passage à Paris, où il a multiplié les rencontres avec des militant·es, des syndicalistes et des journalistes. Nous avons assisté à son intervention au siège de l’union syndicale Solidaires à Paris, puis l’avons rencontré pour une discussion à bâtons rompus. J’ai repris la première en l’enrichissant avec ses remarques lors de notre rendez-vous.
Que se passe-t-il en ce moment à Hong Kong ?
Au Loong-Yu : Une grande purge est en cours à Hong Kong. Au total, 153 personnes ont été poursuivies en vertu de la loi de sécurité nationale de Pékin, imposée en juillet 2020. La menace de Pékin a incité de nombreuses organisations à se dissoudre. Entre janvier et fin septembre 2021, 49 organisations ont choisi de s’effacer face aux menaces ou à une éventuelle répression. Il s’agit notamment de l’opposition politique, de grands et petits syndicats, d’organisations étudiantes, d’ONG, d’églises et de leurs affiliés, et de médias. Le 11 septembre, le PTU (Professional Teachers’ Union) a voté sa dissolution. Cette décision a été suivie par celle de la CTU (Confederation of Trade Unions) le 3 octobre.
Cette grande purge vise à écraser la société civile et à contrôler la pensée et l’âme du peuple. Il n’est pas étonnant que le gouvernement de Hong Kong, après avoir imposé un serment de loyauté aux fonctionnaires, essaie maintenant de le faire pour les enseignants. Cela s’ajoute à sa politique de longue date visant à remplacer le cantonais par le mandarin comme moyen d’enseignement de la langue chinoise. Alors qu’il jouissait de la liberté de créer, le secteur culturel se retrouve soudain à la merci de la censure et du harcèlement, à tel point que même le visionnage de documentaires sur la révolte de 2019 dans des cercles privés est une infraction punissable.
Si un Hong Kong « libre » valait encore la peine d’être défendu par les travailleurs sur place, c’est parce que la ville abritait également une variété dynamique de mouvements sociaux locaux, même s’ils étaient encore à l’état embryonnaire. En un an seulement, cet espace public a été détruit par Pékin.
Cette vague de répression a-t-elle des répercussions en Chine ?
La grande purge ne concerne pas seulement Hong Kong. En raison de l’imbrication des sociétés civiles de Hong Kong et du continent, ce qui se passe dans la première a de profondes répercussions dans la seconde. Prenons, par exemple, la Hong Kong Alliance in Support of Patriotic Democratic Movements of China (HKA), très détestée par Pékin pour son soutien continu au mouvement démocratique sur le continent. Pendant plus de trois décennies, elle a organisé une veille en mémoire des victimes du massacre du 4 juin 1989 dans la ville, faisant de celle-ci le seul endroit en Chine à pouvoir commémorer la répression tragique. Jusqu’à l’année dernière, où elle a été interdite. Cette interdiction a été suivie d’un harcèlement de l’Alliance par les autorités, jusqu’à ce qu’elle soit contrainte de se dissoudre le 25 septembre.
Tout un secteur d’organisations civiles qui se sont dissoutes ou ont été désactivées au cours des deux dernières années a rarement été remarqué : il est constitué d’organisations hongkongaises ayant soutenu la société civile chinoise, soit en prêtant main-forte aux avocats persécutés du continent, soit en soutenant le militantisme syndical. Elles figurent parmi les premières victimes de la répression de Pékin, mais cela est généralement sous-estimé. Depuis trente ans, ces groupes de Hong Kong, couvrant un large éventail de domaines allant de l’environnement, du travail aux questions de genre, ont joué un rôle crucial dans l’introduction de pratiques d’auto-organisation sur le continent.
Pouvez-vous nous donner des exemples de ce qu’était leur engagement ?
Je connais mieux la situation des groupes de Hong Kong qui se sont engagés à soutenir le militantisme ouvrier en Chine. Depuis le début du siècle, une dizaine de groupes hongkongais ont travaillé dans ce domaine. La plupart dirigeaient des centres communautaires ou ouvriers dans le delta de la rivière des Perles, d’autres ont choisi de soutenir plutôt des partenaires du continent, ou les deux. Au début, ils ont été tolérés par les autorités locales, et certains ont même pu avoir une collaboration discrète avec les bureaux locaux de l’ACFTU [le syndicat officiel chinois – ndlr]. Mais cela n’a pas duré. Aujourd’hui, avec un environnement de plus en plus hostile en Chine continentale, la plupart des organisations de Hong Kong ont vu leur enregistrement en Chine continentale annulé. Après la promulgation de la loi sur la sécurité nationale de Hong Kong, certaines ont même dû annuler « volontairement » leur enregistrement à Hong Kong.
Mais leur disparition avait déjà commencé en 2015, lorsque, le 9 juillet, les autorités du continent ont commencé à rafler près de 300 avocats qui avaient aidé au « weiquan », le mouvement de défense des droits légitimes des classes défavorisées ou des dissidents. À peu près au même moment, deux douzaines de défenseurs des droits des travailleurs ont également été arrêtés. Trois ans plus tard, une autre vague d’arrestations a eu lieu, cette fois-ci visant principalement les étudiants qui étaient sortis en masse pour aider les travailleurs de la Shenzhen Jasic Technology Co. [une usine située à Shenzhen, ville frontalière de Hong Kong – ndlr] à s’organiser.
Au cours de cette opération, les autorités ont également arrêté des membres du personnel travaillant pour des groupes de travailleurs fondés par des citoyens de Hong Kong, bien qu’ils n’aient pas participé à la lutte contre Jasic. Depuis lors, ces groupes ont été harcelés et la plupart d’entre eux ont cessé leurs activités ou ont dû les réduire considérablement. Pour les quelques groupes qui sont restés, la situation est devenue de plus en plus difficile. Ce fut le début de la fin pour les groupes de Hong Kong soutenant la main-d’œuvre chinoise.
Avec la promulgation de la LSN, certains de ces groupes ont commencé à s’inquiéter de leur présence à Hong Kong, surtout lorsque les médias du Parti communiste chinois, comme d’habitude, ont non seulement condamné les organisations qui recevaient des fonds américains, mais aussi, pour la première fois, les organisations européennes qui contribuaient au financement du développement des groupes de Hong Kong, des syndicats aux groupes religieux. Par conséquent, certaines d’entre elles se sont également dissoutes.
Avec la mort de Hong Kong, la chute de la société civile chinoise naissante est presque certaine, du moins pour le moment. On peut se demander si tel était précisément l’objectif de Pékin au départ.
Que reste-t-il aujourd’hui comme alternative à tous ces mouvements sociaux ?
Sous le coup de massue de Pékin, l’opposition et la société civile se sont nécessairement tournées vers une position défensive pour minimiser les pertes supplémentaires. L’heure est au repli tactique. Il faut parfois sacrifier les chevaliers pour sauver la reine. Le problème, toutefois, est de savoir si la retraite est ordonnée ou chaotique, dominée par la panique et aboutissant à l’anéantissement complet des forces en présence. Les événements récents font craindre de plus en plus que les choses aillent dans ce sens. Mais la répression actuelle a également mis à l’épreuve ceux qui ont encore la volonté de résister, même si leur résistance est plutôt de nature symbolique et morale.
La dissolution du PTU – le plus grand syndicat de Hong Kong – représente la manière la plus controversée de se retirer. Techniquement, la motion de dissolution a finalement été décidée par un vote démocratique des délégués des membres. Pourtant, avant cela, la direction avait déjà décidé que le syndicat serait et devrait être dissous face aux menaces verbales d’un certain « intermédiaire » [un agent d’influence – ndlr] au nom de Pékin (le PTU avait rendu cela public).
Afin d’atteindre cet objectif, la direction s’est empressée de modifier la charte du syndicat, de sorte qu’au lieu d’exiger une majorité des deux tiers de tous les membres pour consentir à la dissolution, il suffit désormais d’une réunion des délégués pour que celle-ci ait lieu. En fin de compte, au lieu de permettre à près de 100 000 membres de voter sur la motion de la direction ou d’observer la réunion s’ils le souhaitaient, seuls 140 délégués ont voté, 132 en faveur, 6 contre et 2 abstentions.
Le principal argument avancé par la direction pour dissoudre le syndicat avec une telle hâte et de telles manipulations était l’argument de la « dissolution en échange de la clémence ». Ironiquement, même lorsque les dirigeants ont rendu publique leur décision, les médias du Parti ont immédiatement fait savoir que même si le syndicat était dissous, Pékin continuerait à s’en prendre aux syndicalistes.
Un mot encore sur les « intermédiaires » de Pékin. Leur tâche consiste à se lier d’amitié avec toute personne ayant une certaine influence ou potentiellement dangereuse pour Pékin, puis à la coopter – ce n’est là qu’un des piliers de la stratégie bien connue du « tongzhan » (littéralement « front uni ») de Pékin. Non seulement son ampleur à Hong Kong est prodigieusement énorme et longue, mais elle est aussi très méticuleuse, souvent sur mesure, en fonction de la personne. Les « intermédiaires » de Pékin se lient d’abord d’amitié avec vous, découvrent ce qui vous intéresse le plus (pas nécessairement l’argent), puis vous proposent une aide à laquelle vous ne pouvez résister.
La personne qui est approchée se trouve alors sur une pente glissante sans en avoir pleinement conscience. Même dans les cas où cela ne fonctionne pas, le régime peut toujours manipuler la personne par toutes sortes de menaces et de chantages. C’est probablement l’une des raisons pour lesquelles aujourd’hui, parmi la plupart des organisations de masse et des partis démocratiques de Hong Kong, on peut toujours trouver quelques figures de proue dont les paroles et les actes sont si identiques à ceux des partisans de Pékin.
Mais d’autres résistent-ils encore ?
Il y a aussi des gens incorruptibles. La façon dont l’Alliance de Hong Kong (HKA) a été dissoute s’est avérée malgré tout un peu plus réjouissante. En apparence, elle a suivi un schéma similaire à celui du PTU, mais au stade de la délibération par la direction, l’opposition à la motion de dissolution a été plus forte : elle a été adoptée à une courte majorité de quatre contre trois.
L’opposition était menée par Chow Hang-tung, une jeune avocate et militante. Au moment du vote des membres, elle était déjà détenue, mais avant le vote, elle a écrit un appel public aux membres pour leur demander de ne pas céder. Elle a fait valoir que la tactique de la « dissolution en échange de la clémence » était erronée et qu’en refusant de capituler, elle montrerait au monde la détermination du peuple de Hong Kong à poursuivre la lutte. Ses partisans ont perdu le vote, mais elle et ses camarades ont sauvé l’honneur de la résistance de Hong Kong. Beaucoup de gens la considèrent comme un nouveau symbole de la résistance.
Pourquoi cet acharnement de Xi Jinping à vouloir dompter Hong Kong ?
Pékin doit en finir avec l’autonomie de Hong Kong car elle est dangereuse pour son monopole continu du pouvoir et son appropriation des richesses de la nation. Une deuxième raison pour Pékin est qu’en mettant fin à Hong Kong, il peut également se débarrasser de l’influence politique des États-Unis et du Royaume-Uni pour exercer son pouvoir. Hong Kong devient donc également un champ de bataille pour la compétition mondiale entre la Chine et les États-Unis.
Au plus fort de la révolte de 2019, Mike Pence, alors vice-président américain, a prononcé un discours visant Pékin, que certains considèrent comme l’annonce d’une nouvelle guerre froide. J’hésite toutefois à utiliser l’expression de « nouvelle guerre froide ». Pendant l’ancienne guerre froide, il y avait littéralement une guerre chaude en Asie, et celui qui était à l’offensive était l’empire américain, tandis que les Chinois et les Vietnamiens étaient plutôt sur la défensive. Derrière cette dichotomie offensive-défensive se cachait également l’opposition entre colonialisme et anticolonialisme. Quiconque était attaché à la démocratie et à l’autodétermination des nations opprimées n’aurait pas choisi la neutralité, et encore moins la position aux côtés des États-Unis.
La situation actuelle est très différente. La lutte actuelle de Pékin contre les États-Unis n’est pas une lutte contre l’impérialisme en soi, elle n’est pas destinée à le remplacer par quelque chose de meilleur. Il s’agit d’une lutte pour savoir qui a le dernier mot dans la répartition de la chaîne de valeur mondiale, une lutte qui est également profondément injuste. Il suffit de regarder ce que font les entreprises chinoises dans le monde, leur investissement est le même que celui de tout régime impérialiste ou d’exploitation, à savoir poursuivre la maximisation du profit aux dépens de la terre et des travailleurs.
En essayant de se positionner dans la compétition entre la Chine et les États-Unis, les gens débattent du régime politique de la Chine. Certains disent que la Chine est un régime autoritaire, mais cette description n’est pas très satisfaisante, car un régime autoritaire ordinaire n’est pas capable de déployer un tel niveau de contrôle sur l’ensemble de la population, du contrôle social, économique, au contrôle de la pensée.
Avec un tel niveau de contrôle, il est tentant de dire que la Chine est plus totalitaire qu’autoritaire. Encore une fois, ce terme a une forte connotation avec l’ancienne guerre froide, bien qu’il semble que le terme lui-même ait précédé la guerre froide.
Je pense que l’une des difficultés réside dans le fait que la Chine est un peu de tout. Selon certaines mesures, c’est un pays en développement, mais selon d’autres, c’est un pays impérialiste émergent. D’une part, c’est l’atelier du monde, ce qui signifie que ses usines ne peuvent obtenir qu’une petite proportion de la chaîne de valeur mondiale, ce qui est un cas typique d’accumulation dépendante. D’autre part, l’État chinois consacre d’énormes sommes d’argent à la promotion de l’innovation indigène et connaît un certain succès. Aujourd’hui, la Chine présente également une forte caractéristique d’accumulation autonome.
La Chine est un ensemble de contradictions multiples. Il n’y a qu’une seule caractéristique du PCC qui soit restée très constante depuis 1949, à savoir son hostilité à ce que les travailleurs puissent jouir de la liberté de la presse et des droits démocratiques, et son insistance sur son droit divin à laver le cerveau du peuple. J’ai un jour discuté avec un dissident du continent. Il a été détenu pendant un mois pour son activité. Lorsqu’il a été libéré, la police secrète lui a dit : « Notre Parti respecte la liberté de pensée et vous pouvez certainement avoir votre propre pensée, tant que vous ne l’exprimez pas. » Vous voyez, c’est ainsi qu’ils respectent la liberté de pensée.
Comment voyez-vous l’affrontement entre les États-Unis et la Chine, que certains décrivent comme une nouvelle guerre froide ?
Je pense que dans le débat sur la compétition entre la Chine et les États-Unis, certains se concentrent trop sur les mérites ou les inconvénients de tel ou tel État, oubliant qu’en tant que socialistes, nous devrions toujours placer le bien-être du peuple au centre de nos préoccupations. Certains peuvent s’empresser de proclamer qu’ils sont d’accord avec cette idée, puis ils publient des articles montrant les performances de Pékin en matière d’amélioration de l’économie, par exemple dans quelle mesure Pékin a éradiqué la pauvreté, ou combien de lois sur le travail ont été adoptées, et ainsi de suite, pour prouver que, « oh, grâce au gouvernement du PCC, le bien-être du peuple chinois a été pris en charge, ce qui prouve encore une fois que l’État chinois est progressiste, alors que l’État américain est réactionnaire ».
Et puis ils ont décidé de soutenir Pékin dans cette lutte mondiale pour l’hégémonie. Mais cela passe largement à côté de l’essentiel car, premièrement, les chiffres officiels sont toujours trompeurs, voire carrément faux. Deuxièmement, si l’on veut connaître la situation réelle au niveau de la base, il faut apprendre ce que disent les gens ordinaires et comment ils vivent leur vie. Malheureusement, les rares personnes qui ont soutenu Pékin dans son opposition aux États-Unis se préoccupent rarement des personnes réelles.
Troisièmement, je soutiens que, dans la situation de la Chine, le bien-être économique des travailleurs est un critère secondaire par rapport au critère de la jouissance des droits politiques par le peuple. Je soutiens que la question de savoir si le peuple jouit de droits politiques devrait être notre critère primordial. Lorsque le peuple a été privé de tels droits, il a littéralement tout perdu, tôt ou tard.
Dans cette situation, même s’ils ont des revenus raisonnables pour le moment, cela ne peut jamais être sûr, le danger d’être à nouveau dépossédé par l’État ou par des promoteurs immobiliers de connivence avec le Parti est toujours présent. Il suffit de regarder ce qui est arrivé aux paysans à l’époque de Mao.
Ils se sont vu attribuer des parcelles de terre lors de la réforme agraire au début des années 1950, pour tout perdre en quelques années au profit des prétendues communes. Ils n’ont récupéré leurs terres que dans les années 1980, pour recommencer à les perdre dans le cadre de l’accaparement actuel, souvent dirigé par des responsables locaux du Parti.
Quant au droit du travail, depuis l’extermination des ONG du travail en 2015, sa non-application s’est également généralisée. Ce déni des droits politiques fondamentaux par le Parti-État est suffisant pour dire que le régime chinois est totalement injuste et qu’il doit être remplacé par un régime démocratique, et que la compétition Chine-États-Unis devrait être jugée en fonction de l’intérêt du peuple dans sa lutte historique pour l’émancipation.
De plus, Pékin n’est peut-être pas aussi mauvais que Washington, et il n’est certainement pas aussi fort, mais il l’est assez pour écraser son peuple, et il le fait depuis des décennies. Par conséquent, les vrais socialistes qui placent le bien-être politique et économique au centre de leurs préoccupations devraient donner la priorité à la lutte pour l’émancipation par-dessus tout, et ne devraient juger la compétition entre la Chine et les États-Unis qu’à l’aune de cette propre lutte primordiale.
En Occident, beaucoup de gens respectables détestent l’empire américain. Mais vous n’avez pas besoin de soutenir Pékin pour exprimer votre colère contre ce dernier. Tout comme les habitants de Hong Kong n’ont pas besoin de soutenir Trump pour exprimer leur colère contre Pékin.
À ces gens respectables d’Occident, je voudrais dire que le Parti-État chinois n’a pas besoin de leur soutien, c’est plutôt le peuple chinois qui en a besoin. Mais qu’est-ce que le « peuple chinois » ? La difficulté réside dans le fait que vous ne l’entendez pas beaucoup. Vous rencontrez rarement ses véritables représentants dans la plupart des réunions internationales. Parce que les vrais militants socialistes, en plus d’être empêchés d’aller à l’étranger pour dire ce qu’ils pensent, sont constamment pourchassés et mis en prison.
Malheureusement, pour ces partisans internationaux de Pékin, le bien-être du peuple chinois réel est rarement leur préoccupation. Pourtant, cette absence de voix du peuple chinois est le cri le plus fort du monde ! Si quelqu’un n’en a pas entendu parler, c’est uniquement parce que ses oreilles ne sont pas tournées dans la bonne direction. C’est précisément parce que le peuple chinois est sans voix que nous devons avertir le monde entier avec notre voix la plus forte, afin de l’aider à retrouver la sienne et à se faire entendre.
Pourtant, il arrive que le peuple chinois soit entendu. Il y a quelques années, certains médias en ligne ont publié un article sur une possible guerre entre la Chine et les États-Unis, et un commentaire a attiré beaucoup d’attention. Il disait que le peuple chinois devait soutenir l’effort de guerre en appelant d’abord les membres du Bureau politique du Parti à faire la guerre. Et s’ils ne pouvaient pas gagner la guerre, alors nous enverrions tous les membres du Comité central sur la ligne de front, et ensuite tous les membres du Parti. À la fin, le peuple chinois serait victorieux.
Ce commentaire montre qu’il y a des gens qui savent que dans la situation actuelle, une guerre entre la Chine et les États-Unis n’est pas leur guerre. Le peuple a sa propre guerre à mener, celle pour restaurer son estime de soi et ses droits politiques et économiques pour obtenir la liberté.