Afghanistan : le jeu dangereux du Pakistan

The Wire, 9 septembre 2021

Selon l’ancien sénateur pakistanais Afrasiab Khattak, les talibans sont un instrument pour l’armée pakistanaise. Khattak qui a été le président de la Commission des droits de l’homme du pays et l’un des experts pakistanais les plus réputés sur l’Afghanistan et les talibans « les talibans sont un instrument de la profondeur stratégique du Pakistan destiné à déconstruire l’identité afghane ».

Il estime que le puissant appareil de sécurité pakistanais ISI utilise les talibans « pour remodeler la nation afghane » et que « les généraux pakistanais veulent refondre l’Afghanistan à leur image », en mettant l’accent sur la partie musulmane de l’identité afghane et en sapant ou en tentant d’éradiquer la partie afghane de cette identité.

C’est pourquoi, dit-il, les talibans ont remplacé le drapeau afghan très apprécié, l’hymne national du pays et rejeté le concept de Jirga, qui, selon eux, ne fait pas partie de la charia.

Sur le nouveau gouvernement intérimaire annoncé la semaine passée, le sénateur Khattak a déclaré que les 33 ministres représentaient des factions des talibans issues des madrassas pakistanaises. Il a déclaré que la visite du chef de l’ISI à Kaboul, le lieutenant-général Faiz Hameed, était conçue pour garantir que les bonnes personnes soient placées dans des postes critiques au sein du gouvernement.

Selon lui, le véritable pouvoir des talibans réside dans leurs factions militaires, au cœur desquelles se trouve le réseau Haqqani. Ce groupe a peu a voir avec les représentants talibans qui négociaient avec les États-Unis à Doha. Ceux-ci que plusieurs estiment « modérés » ont été créés pour projeter une fausse image qui ne reflète pas la vraie nature des talibans. « les talibans n’ont pas changé ». La rhétorique et les déclarations de Zabiullah Mujahid est «limitée à Kaboul. Dans les provinces, ils tuent des gens »comme à Badakhshan, à la frontière avec le Tadjikistan.

Depuis 1974, le réseau Haqqani est le favori du Pakistan, lorsque Jalaluddin Haqqani, son fondateur, avait sa base sa base dans la région du Waziristan. Les fils de Haqqani sont nés et ont grandi au Pakistan. Les Haqqanis selon lui, sont sont « un pur produit de l’ISI ».

Les Haqqanis ont été les premiers à arriver à Kaboul et à prendre le contrôle de la capitale. Les talibans de Kandahar sont venus plus tard. En phase avec la politique pakistanaise,  Sirajudin Haqqani, le nouveau ministre de l’Intérieur, à déclaré qu’il cherchera à réduire le rôle de l’Inde.

Selon Khattak, le peuple afghan n’acceptera pas cela et se battra pour réaffirmer l’identité de l’Afghanistan.

À court terme, l’avenir est incertain quant au système politique final que les talibans souhaitent mettre en place. « Les talibans eux-mêmes ne le savent pas ». Les responsables d’ISI leur conseillent « de placer leur émirat islamique sous le couvert de la Constitution afghane de 1964, qui était la constitution monarchique sous l’ancien roi Zahir Shah ». Cela pourrait conduire à élever le chef suprême Haibatullah Akhundzada au rang de roi. Selon Khattak, « l’ISI estime que cela serait acceptable pour la communauté internationale cet que cette  » solution » serait adaptée aux exigences des talibans.