Canada : ventes d’armes et violations des droits humains

Canada : ventes d’armes et violations des droits humains

 

 Stéphanie Bacher, McLeod    18 octobre 2019 

 

Dans sa plate-forme 2019, le Parti libéral affirmait que «le Canada a gagné sa place dans le monde, ancré dans la réputation de défendre la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit». Cette déclaration semble totalement en contradiction avec la position du gouvernement Trudeau sur les exportations d’armes du Canada vers l’Arabie saoudite, qui préoccupe grandement de nombreuses organisations de défense des droits de la personne.

En 2014, le gouvernement conservateur de Stephen Harper a négocié un accord secret entre une société ontarienne, General Dynamics Lands System, et l’Arabie saoudite, portant sur la vente de plus de 900 véhicules blindés légers (VBL) et leur entretien, d’une valeur d’environ 15 milliards de dollars. Le gouvernement Trudeau a par la suite approuvé l’accord, avant de faire face à une pression supplémentaire pour l’annuler, après la publication de photos montrant ces véhicules blindés canadiens dans la guerre menée par le Saoudien au Yémen. Cependant, le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Stéphane Dion, a répondu que l’annulation de l’accord entraînerait des pénalités financières énormes pour les contribuables.

La pression pour annuler la vente a refait surface l’année dernière après l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi dans le consulat du royaume à Istanbul, qui aurait été ordonné par le prince Mohammed bin Salman. Ce n’est qu’alors que le gouvernement canadien a annoncé un examen de ses exportations d’armes en Arabie saoudite et interdit toute nouvelle vente d’armes. L’entente sur les VBL est toutefois demeurée en vigueur.

Un an a passé et le gouvernement est resté silencieux sur cette question, en dépit des nombreux appels d’organisations de la société civile et d’autres acteurs à agir. Le statut de l’examen n’est pas clair.

Le 6 août, une coalition de 12 organisations de la société civile canadienne a envoyé une lettre ouverte au premier ministre Justin Trudeau dans laquelle il s’inquiétait du fait que le Canada n’avait pas encore achevé son examen des exportations militaires en Arabie saoudite, ou au moins communiqué les résultats de cet examen. . Ils n’ont reçu aucune réponse du gouvernement libéral.

Dans une autre tentative visant à contraindre le gouvernement à agir dans ce domaine, le professeur de droit de l’Université de Montréal, Daniel Turp, a adressé une lettre à la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, l’invitant début septembre à mettre un terme aux exportations d’armes actuelles et futures vers l’Arabie saoudite. Saoudite. Elle n’a pas répondu à sa lettre. Turp envisage maintenant de poursuivre en justice pour forcer le gouvernement à annuler les exportations restantes de véhicules blindés légers en Arabie Saoudite.

Il y a deux semaines, une nouvelle vidéo montrait des véhicules blindés légers fabriqués au Canada et capturés par les rebelles au Yémen. En réponse, le porte-parole du GAC, Adam Austen, a déclaré que le gouvernement n’avait pris aucune décision finale concernant ses permis d’exportation vers l’Arabie saoudite.

Pourquoi les libéraux mettent-ils tant de temps à rendre publique le résultat de leur examen? Est-ce par peur des répercussions économiques et que les autorités saoudiennes ne paieront pas pour les véhicules déjà livrés? Ou est-ce pour des raisons électorales , y compris les emplois dans le sud de l’Ontario qui sont en jeu? Et combien de preuves supplémentaires le gouvernement canadien aurait-il besoin d’agir enfin? Après tout, le droit canadien n’exige pas de preuve de l’utilisation abusive des exportations d’armes, mais seulement qu’il existe un «risque important» d’utilisation abusive . À ce stade, ce seuil a clairement été atteint.

Les quatre autres partis politiques fédéraux ont une position claire sur les accords d’armement en cours avec l’Arabie saoudite. Alors que le Parti Vert, le Nouveau Parti Démocratique et le Bloc Québécois l’annuleraient tous, seul le Parti conservateur procéderait à la vente.

Le gouvernement canadien devrait faire connaître sa position sur les accords d’armement actuels et futurs avec l’Arabie saoudite. Il ne devrait pas laisser les tribunaux décider à sa place, sapant les revendications canadiennes selon lesquelles leur pays serait un défenseur mondial des droits de la personne.

D’autres pays, notamment le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Suède et le Danemark, ont déjà suspendu ou annulé leurs accords avec l’Arabie saoudite. Même le Congrès des États-Unis a été actif dans cette affaire, en adoptant une résolution visant à empêcher les ventes d’armes militaires à l’Arabie saoudite par crainte de victimes civiles au Yémen. Il est trop tard pour que le gouvernement canadien soit un chef de file mondial dans ce domaine, mais au moins, il pourrait respecter les engagements du Canada en matière de droits de la personne.

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