Élections québécoises : La ruée vers le centre

Tout ne va pas très bien pour la droite pendant les présentes élections. Les milliards de dollars accumulés dans les coffres de l’État empêchent d’alarmer la population à propos d’un déficit abyssal à éliminer. On ne peut plus créer un drame autour de notre dette publique qui demeure sous contrôle et bien gérée. On ne parvient plus attirer les électeurs en affirmant qu’il faut couper du gras dans la fonction publique alors qu’il ne lui reste plus que la peau et les os.

À force d’avoir appliqué un remède de cheval pendant des années, d’avoir affamé nos services publics, réduit les budgets, éliminé plusieurs programmes sociaux, il n’y a plus que très peu de matière pour alimenter des programmes économiques de droite, au risque de perdre les élections.

La CAQ a entrepris un vigoureux virage révisionniste et cache du mieux qu’elle peut les idées qui ont toujours été les siennes. Les médias ont mentionné la disparition de quelques mots-clés de leur programme : « gaz de schiste », « pétrole », « natalité ». On ne parle plus de « réduire les impôts des Québécois », d’un « répit fiscal » nécessaire à cause d’un gouvernement qui ne cesse de « piger dans les poches des citoyens », comme on le constatait sur le site en février dernier. Du côté de la fiscalité, le parti se contente désormais d’une baisse de la taxe scolaire.

Lors de la présentation de leur équipe économique, on a soigneusement caché Youri Chassin, un libertarien bien connu, qu’on avait pourtant annoncé comme une excellente candidature pour le parti. Par contre, on met de l’avant la populaire Marguerite Blais, préoccupée du sort des aînés, et Danielle McCann, riche d’une longue expérience de gestionnaire dans le système de santé public.

Le PLQ, quant à lui, a adopté l’ironique slogan « Pour faciliter la vie des Québécois », lui qui l’a rendue si difficile avec ses nombreuses compressions budgétaires. Son programme se caractérise par son grand vide, qui montre bien l’usure découlant de tant d’années au pouvoir — un programme anecdotique qui tente de faire croire que ce que les libéraux ont accompli depuis quatre ans n’a jamais existé.

Depuis ces dernières années, jamais les partis de droite n’ont été aussi gênés de mettre de l’avant les idées qu’ils ont toujours défendues. Notre droite est complexée et a mauvaise conscience. Ses choix économiques ont été critiqués par un mouvement social demeuré très actif, tout en subissant durement les effets des compressions. Les syndicats, les regroupements citoyens comme la Coalition Main rouge, les personnes qui ont formé des chaînes humaines autour des écoles ont sans cesse rappelé les effets destructeurs de l’austérité budgétaire.

Le recentrage du PLQ et de la CAQ semble bien fonctionner auprès des électrices et des électeurs. Ces deux partis continuent à se maintenir confortablement en tête de sondages. Plutôt que de les pénaliser, on s’apprête à les réélire.

Pourtant, il leur reste encore beaucoup de chemin à parcourir avant d’arriver à des propositions véritablement progressistes. Les deux partis semblent viser une sorte de statu quo qui ne permettra en rien de compenser les pertes majeures subies entre autres dans l’éducation et la santé. Leurs politiques environnementales timorées ne permettront pas de relever les défis causés par les changements climatiques.

Ce que proposent ces deux partis, ce sont de bons gestionnaires, qui vont gérer sagement une province sans vision et sans ambition. Des politiciens toujours au service des entreprises et qui compteront sur ces dernières pour faire ronronner une économie au service des plus riches. Des élus sans convictions qui attendront la prochaine crise pour recommencer à faire ce en quoi ils ont toujours cru : des compressions budgétaires, des privatisations, de la déréglementation.

Le lendemain des élections pourra être dur pour celles et ceux qui ont une conception un peu plus noble de l’État. Il faudra reprendre les batailles là où elles avaient été laissées, continuer à intervenir dans la sphère publique pour limiter les dégâts ou corriger les erreurs accomplies dans les derniers mandats. À moins, bien sûr qu’un miracle ne se produise.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît, entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici