Nina Morin
« Si la CIJ échoue, il ne nous reste plus que Dieu »
Fahmi Al-Rubai, un palestinien de 32 ans, déporté plusieurs fois à travers Gaza
Après le dépôt par l’Afrique du Sud, le 29 décembre 2023, d’une plainte pour violation de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, la Cour internationale de Justice (CIJ), la plus haute juridiction des Nations Unies, a sommé Israël de prendre « toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir et punir l’incitation directe et publique à commettre le génocide ».
Israël estime pour sa part que ce sont des accusations « totalement dénaturées » et « une description délibérément organisée, décontextualisée et manipulatrice de la réalité ». Le pays hébreu n’applique donc aucune des directives et intensifie encore plus les attaques envers les habitants de Gaza, sans que même les démocraties occidentales lui forcent la main, qui pourtant doivent voir aussi à l’application des décisions.
Composition et mandat de la CIJ
La Cour Internationale de Justice est composée de 15 juges, élu.es pour neuf ans par l’Assemblée générale des Nations Unies et le Conseil de Sécurité, qui sont chargés.es de se prononcer sur des litiges tels que les questions de souveraineté, de gouvernance, d’environnement… La CIJ ne peut être saisie que par les États eux-mêmes et les juges en tant que tel, contrairement à la Cour Pénale Internationale, qui elle s’occupe en particulier de juger les individus pour crimes de guerre.
Selon la Charte des Nations unies, chaque membre « s’engage à se conformer à la décision de la Cour internationale de justice dans tout litige auquel il est parti ». En d’autres mots, le fonctionnement de la CIJ repose sur la confiance que les États appliqueront les décisions, conformément au droit international. La CIJ n’émet pas de contraintes ou de sanctions envers les parties et, dans les faits, Israël ne respecte pas les conclusions de la CIJ. En fait, ces décisions s’apparentent davantage à des « recommandations ». Or, quand la vie de milliers de personnes en mise en jeu, la CIJ est impuissante.
François Dubuisson, professeur en droit international à l’Université de Bruxelles insiste : « l’avis rendu par la Cour, n’est, comme son nom l’indique, qu’un avis. ». Il ajoute toutefois qu’un tel avis serait
« […] une tentative de remettre au centre la question palestinienne, un petit peu en sommeil. Les instances internationales essaient de recréer un moment particulier autour de cet avis consultatif, en amenant un certain nombre d’États à prendre position dans le cadre de cette
procédure. ».
Finalement, la seule requête concrète de la CIJ envers Israël est de « fournir un rapport sur l’ensemble des mesures qu’il aura prises » pour prévenir tout acte génocidaire d’ici un mois, malgré les doutes.
Les limites des institutions internationales et la mobilisation citoyenne
Les différentes instances internationales de l’ONU qui se préoccupent du respect des droits humains fondamentaux sont incapables d’offrir des garanties de résultat, car un tel pouvoir appartient à chaque gouvernement. Malgré l’adhésion de 176 pays à la convention de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) sur le travail des enfants, on estime à 160 millions d’enfants qui travaillent dans le monde en violation de cette convention, ce qui correspond à une augmentation de 8,4 millions depuis quatre ans.
Face à cette réalité institutionnelle, la mobilisation citoyenne apparaît comme le levier essentiel pour provoquer un changement concret. Il est temps que les populations et les mouvements citoyens expriment leur indignation et exigent des actions concrètes de la part de leurs gouvernements pour qu’ils cessent de soutenir la politique l’agression militaire d’Israël. Les décisions comme celles de la CIJ sont surtout des leviers de mobilisation pour accroître la pression collective et faire bouger les lignes pour mettre fin à l’injustice et à l’impunité.
Pétition embargo sur la fourniture d’armes du Canada à Israël: https://www.noscommunes.ca/petitions/fr/Petition/Details?Petition=e-4745